Ivan III Le Grand

« cet État, naguère rival de Moscou.

La même année, un autre prétexte lui permit de mettre la main sur la principautéde Vereïa.

Il fit également payer à ses frères les concessions qu'il avait dû leur faire en 1480, au moment del'attaque mongole : dès 1481, il hérita seul d'André de Vologda, puis, en 1491, confisqua la principauté d'Andréd'Ouglitch. Après la mort d'Ibrahim (1486), Ivan intervint militairement à Kazan pour y installer l'un des fils de son adversairedéfunt, Mahmet Amin (juillet 1487) qui devint un client de Moscou.

Cela permit au grand-prince d'asseoir sonautorité dans la région de la Viatka sur les anciennes colonies novgorodiennes (août 1489).

De là, les Russesatteignirent l'Oural et firent à la fin du règne quelques incursions en Sibérie. L'État moscovite s'étendait ainsi de la Baltique à l'Oural, de la mer Blanche à l'Oka.

Ivan III et ses contemporainsprirent rapidement conscience de cette puissance nouvelle.

Vassien Rylo, pendant les dramatiques événements de1480, avait déjà développé, pour inciter Ivan à la fermeté, l'idée que le prince chrétien tenait ses pouvoirs de Dieuet ne devait dépendre d'aucune puissance de ce monde.

La fin du joug mongol, l'annexion de la grande principautéde Tver — où la notion d'État monarchique était plus développée qu'à Moscou, ratifièrent les affirmations théoriquesde l'archevêque de Rostov.

En 1488, celles-ci furent officiellement répétées à l'ambassadeur du Saint-Empire par Th.Kouritsyn, conseiller d'Ivan III.

En 1492, le métropolite Zosime formula pour la première fois l'idée que, désormais,après la chute de Constantinople, c'était à Moscou qu'incombait la mission de défendre et de répandre l'orthodoxie.La doctrine de la “ Troisième Rome ” était née. L'idée monarchique se traduisait progressivement dans les faits : dès 1485, apparut dans les chartes le titre de “grand-prince de toute la Russie ” ; en 1493, en écrivant au grand-duc de Lituanie, Ivan s'intitula “ par la grâce deDieu souverain de toute la Russie ” et même, plus tard, tsar (caesar) en s'adressant à des princes allemands.

En1497, les sceaux portèrent l'emblème de l'aigle bicéphale, hérité de Byzance ou de Tver.

Les usages de la courchangèrent également : l'ancien hobereau et chef de guerre, dont l'abord était des plus simples, devenait unmonarque auquel on accédait difficilement.

La nouvelle conception de la monarchie moscovite fut affirmée éclat, le 4février 1498, lorsque Ivan III, dont le fils aîné, Ivan, était mort en 1490, couronna en grande pompe son petit-filsDimitri, introduisant un rite inconnu jusque-là. Simultanément, naquirent timidement les organes administratifs du nouvel État, les prikazy, et fut promulgué (1497)le premier recueil de lois de la Russie moscovite qui nous soit parvenu ; il fixe en détail la procédure judiciaire etconsacre le droit à la propriété foncière.

Celle-ci commençait à inclure les paysans.

Les possibilités que ces derniersavaient eues, durant tout le Moyen-Âge, de quitter leurs terres, furent strictement limitées ; leurs propriétairesétaient des nobles qui, moyennant des obligations militaires, recevaient du prince une terre, un pomestie, qu'ilsexploitaient mais sur lequel ils n'avaient plus les pouvoirs dont jouissaient les féodaux des siècles précédents. Cette nouvelle conception de l'État se traduisit également par l'apparition d'une politique étrangère.

Dès 1472, Ivan,veuf depuis 1467 de Marie de Tver, avait épousé Sophie ou Zoé Paléologue, nièce de Constantin IX, dernierempereur de Byzance.

Cette union fut conclue sous le patronage de Rome qui, par ce mariage avec une princesseorthodoxe élevée à la cour romaine, espérait attirer en son sein le prince schismatique.

Mais l'entrevue entre lecardinal Bonumbre, qui avait accompagné Sophie à Moscou, et le métropolite Philippe II n'eut aucun résultat.

Quantà l'importance de l'événement pour le développement de l'idée théocratique à Moscou, elle est aujourd'huicontestée.

Quoi qu'il en soit, on ne peut nier le fait que ce mariage est le premier d'une longue série d'événementsqui illustrent l'entrée de la Russie dans le concert des puissances européennes. En 1483, le prince héritier, Ivan, épousa Hélène, fille du hospodar de Moldavie, Étienne le Grand, qui devint un alliéfidèle de Moscou.

La même année, Ivan III noua de bons rapports avec Mathias Corvin, roi de Hongrie.

En 1486,commença un échange d'ambassadeurs avec l'empereur Frédéric III.

Si le mariage projeté entre son fils, Maximilien,et une fille d'Ivan ne se réalisa pas, un traité d'amitié fut cependant signé (1490).

En 1493, fut conclue une allianceavec le duc de Mazovie, voisin septentrional de la Pologne, alors qu'au sud, celle-ci était harcelée par Étienne deMoldavie et Mengli-Gireï, khan de Crimée, allié de longue date d'Ivan.

Après la mort de Casimir IV (1492), lesMoscovites entreprirent sur les frontières des opérations militaires locales, à la suite desquelles de nombreux princesrusses de Lituanie passèrent dans l'obédience moscovite.

En 1494, le grand-duc de Lituanie, Alexandre, dutabandonner à Ivan les terres à l'est de l'Oka et du Dniepr supérieurs et reconnaître au prince de Moscou le titre de “souverain de toute la Russie ”.

La fille de celui-ci, Hélène, épousa Alexandre (1495).

Mais ce mariage entre uneprincesse orthodoxe et un souverain catholique devint la cause d'une nouvelle tension.

Contre ceux qui portaientatteinte à la liberté de conscience de sa fille, Ivan eut beau jeu de se présenter en défenseur de la “ loi grecque ”,revendiquant rapidement le droit de protéger tous les sujets orthodoxes de son gendre. L'attention du grand-prince était également tournée vers la Baltique.

Dès 1492, les Russes avaient édifié en face deNarva la forteresse d'Ivangorod.

Pour encercler la Suède, Ivan conclut en 1493 une alliance avec le roi deDanemark.

En 1495, à la suite du meurtre d'un marchand russe à Revel, il mit fin brutalement à la présence desnégociants allemands à Novgorod.

Cependant la guerre de 1495-1496 contre la Suède ne profita qu'à Christian IX deDanemark.

Néanmoins, relativement rassuré de ce côté, Ivan put se retourner une nouvelle fois contre la Lituanie.En 1500, les troupes russes s'avancèrent jusqu'à la Desna et défirent les Lituaniens près de Drogobouj, à l'est deSmolensk (14 juillet).

L'alliance de la Lituanie avec l'Ordre teutonique (1501) mit les Russes momentanément endifficulté, mais rapidement, les Allemands, minés par la maladie, furent défaits, ce qui permit une nouvelle victoiremoscovite sur les troupes d'Alexandre, près de Mstislavl au sud de Smolensk (4 novembre).

L'année 1502 fut moinsheureuse : Ivan III perdit l'appui du hospodar de Moldavie, à la suite d'une intrigue de palais à Moscou dont fut. »