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La Commune de Paris - Soixante-douze jours qui ont profondément marqué le mouvement ouvrier

Publié le 18/11/2018

Extrait du document

PARIS CONTRE VERSAILLES
 
La Commune de Paris est un épisode relativement bref de l'histoire de France, qui s'est soldé par un échec souligné par une issue dramatique. Pourtant, elle occupe une place importante dans la mémoire collective : elle est encore aujourd'hui régulièrement commémorée et sert de référence à plusieurs courants de pensée. Le paradoxe que représente cette permanence historique de la Commune s'explique à la fois par les origines de ce mouvement sa signification idéologique et sa portée politique.
LES SOURCES HISTORIQUES
• En dépit de son caractère spontané, qui la fait apparaître comme une réaction à un contexte de crise, la Commune ne peut être considérée comme un événement isolé. Elle s'inscrit dans une suite d'épisodes révolutionnaires à caractère insurrectionnel.
 
• Les décennies précédentes ont en effet été marquées par les différentes phases de la Révolution française, puis par la « Révolution bourgeoise » de 1830 et surtout par l'insurrection de juin 1848, sous la IIe République. À cet égard, la Commune de Paris apparaît bien comme un mouvement populaire destiné à faire valoir les revendications de populations urbaines réduites par les mécanismes du capitalisme de la révolution industrielle à des conditions d'existence mêlant indigence et précarité.
LE CONTEXTE IMMÉDIAT
La défaite
 
• Confronté à une opposition réformiste interne, l'empereur Napoléon III tente de redonner du lustre à son règne en déclarant la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870.
• Mal préparée et insuffisamment nombreuse, l’armée française cède rapidement. Napoléon III capitule dès le 2 septembre à Sedan.
Le 4 septembre, la République est proclamée à Paris.
Ce bouleversement n'empêche par la guerre de se poursuivre. Tandis que le gouvernement républicain s'exile à Bordeaux, Paris est assiégé par les Prussiens. Après le départ en ballon, le 2 octobre, du ministre de l'intérieur Léon Gambetta, qui tente en vain d’organiser depuis Tours la résistance aux forces d'invasion, la capitale, défendue par 200 000 soldats et 340 000 gardes nationaux, est rapidement isolée.
 
• Aux rigueurs de l'hiver s'ajoute bientôt le manque de nourriture. Confrontés à ces dures conditions de vie, les habitants de la capitale se rebellent contre les représentants du pouvoir, et avant tout contre le commandement militaire, qu'ils accusent de les avoir sacrifiés. Une émeute éclate le 31 octobre, après l'annonce de la défaite du maréchal Bazaine à Metz et de la chute du fort du Bourget ; une autre survient le 22 janvier 1871, quatre jours après le couronnement de Guillaume II comme empereur d'Allemagne à Versailles. Elles sont sévèrement réprimées par le général Vinoy, commandant de la place de Paris.
L'armistice
• Le 28 janvier, le gouvernement signe l’armistice avec l'Allemagne. Le 8 février ont lieu des élections législatives que les droites, emmenées par Adolphe Thiers,
défaite de Sedan et proclamation de la République Siège de Paris par les Prussiens Élections législatives Échec de la confiscation des canons par l'armée Départ du gouvernement pour Versailles Élections et proclamation de la Commune Échec de la marche sur Versailles Déclaration au peuple français
« Semaine sanglante »
• Après la capitulation de Sedan, Paris assiégé a de fait agi de façon très indépendante, s'opposant parfois vivement aux décisions du pouvoir. La composition de la nouvelle Assemblée, qui compte une majorité de notables de province, contribue à cette coupure entre le gouvernement conservateur et une ville qui compte déjà deux millions d'habitants et présente un profil sociologique très différent de celui de la France rurale.
 
• La signature de l’armistice par le gouvernement Thiers exacerbe cette tension, les Parisiens demeurant hostiles à la paix et se sentant humiliés par la capitulation. Le 27 février, ceux-ci installent les canons de la garde nationale, qu'ils ont financés par souscription, dans les lieux élevés de la capitale de façon à en empêcher la prise par les Prussiens.
 
• Les Parisiens majoritairement républicains redoutent de surcroît le retour de la monarchie. Cette crainte est renforcée par la conclusion, le 10 mars, du « pacte de Bordeaux » par lequel les partis du gouvernement décident de ne pas se prononcer sur la nature du régime, laissant la porte ouverte à une éventuelle restauration.

« LES tlECTJONS • Les élections se préparent dans un climat de vive tension entre Paris et Versailles.

Le comité central affirme aux Parisiens : « Les hommes qui vous suivront le mieux sont ceux que vous choisirez parmi vous, vivant de votre vie, souffrant des mêmes maux », pendant que depuis Versailles, on fustige les « criminels » qui ont pris Paris en main.

Dans le même temps, une« délégation de Paris», composée des maires et de leurs adjoints ainsi que des députés de la capitale, propose, sous l'impulsion de Geor ges Cle menceGu, d'engager des négociations avec Thiers, notamment en vue de faire reconnaître par l'Assemblée un statut particulier pour la capitale.

LA COMMUNE A L' ÉPREUVE DU POUVOIR LA PROCLAMATION DE LA COMMUNE • Les élections municipales se déroulent le 26 mars.

Quelque 230 000 électeurs sur les 485 000 inscrits y participent.

L'abstention est due pour une bonne part au fait que de nombreux Parisiens ont quitté la capitale à l'occasion du siège puis des émeutes.

La participation est plus forte dans les faubourgs ouvriers que dans les « beaux quartiers • de l'ouest parisien.

Thiers commente: « Les élections ont été désertées par les c�oyens amis de l'ordre.

» • Les résu�ats sont proclamés le 28 mars devant 200 000 Parisiens rassemblés devant l'Hôtel de Ville.

Une fois proclamé le nom des élus, Gabriel Ranvier s'écrie : «Au nom du peuple.

l11 c-mune est procltlmée.

)) Les membres du comité central remettent alors leur pouvoir aux nouveDux élus.

LEs MEMBRES DE LA COMMUNE • Le conseil de la Commune de Paris apparaît bientôt comme un groupe hétérogène traversé de courants contradictoires.

Les petits bourgeois républicains qui s'y trouvent en majorité y côtoient des ouvriers, pour la plupart affiliés à l'Internationale et dont les préoccupations sont d'un autre ordre.

Les courants idéologiques y reflètent les prises de position politiques antérieures.

La majorité regroupe des blanquistes- bien qu'incarcéré, Blanqui a obtenu de nombreux suffrages-, des jacobins comme ChDrles parmi lesquels leD n-Bt�ptlste ····�li� Clément ou G Jules Vallês, inspirés des théories de Proudhon.

En revanche, ni Marx ni Bakounine n'ont influencé �2ii!!::I·E� le mouvement.

• D'autres républicains, comme Jules Ferry, abandonneront rapidement la Commune.

L'absence de cohérence politique de l'institution amènera nombre d'élus à s'abstenir de siéger.

Lors des élections complémentaires organisées le 16 avril pour pourvoir trente et un sièges vacants, l'abstention est massive, preuve du désintérêt ou de la lassitude des électeurs.

LES MESURES OE LA COMMUNE • Après avoir pris quelques mesures symboliques, dont la plus spectaculaire est l'adoption du drapeau rouge, la Commune s'organise en dix commissions correspondant aux ministères dont le comité central avait pris la direction.

• C'est sous l'impulsion de la commission du Travail.

de l'Industrie et des Échanges que sont prises les mesures les plus significatives : prorogation du moratoire sur le paiement des loyers -supprimé par Thiers -, réquisition de logements vacants, réorganisation du Mont-de­ Piété afin d'aider les moins favorisés ...

• Parallèlement des décisions de principe sont proclamées ou envisagées, sans être toujours mises en pratique, comme l'abolition du travail de nuit ou la suppression des bureaux de placement et de bienfaisance.

• La politique scolaire relève de la commission de l'Enseignement dirigée par Édouard Vaillant, qui incarne le courant anticlérical de la Commune.

Le 2 avril, le Conseil prononce ainsi 1--------------l la séparation de l'Église et de l'État et LES AUTRES • COMMUNES • DE lm • Paris n'est pas la seule ville à réagir à la cap�ulation face aux Prussiens et aux décisions du gouvernement Thiers.

En mars 1871, plusieurs grandes villes - Lyon, Marseille, Toulouse -ainsi que des villes industrielles -Saint-Étienne, Le Creusot- se soulèvent et s'organisent en « Communes ».

Mais ces mouvements insurrectionnels sont maîtrisés en quelques jours.

sauf à Marseille où la résistance au gouvernement est plus longue.

supprime le budget des cultes, affirmant que « le clergé a été complice des crimes de la monarchie contre la liberté ».

• Sur le plan financier, la Commune, qui pourrait s'emparer des titres et du numéraire entreposés au ministère des Finances et à la Banque de France, fait preuve d'une prudence notable, se contenant d'emprunter à cette dernière les moyens de sa subsistance.

LA « DtCLARATION AU PEUPLE FIANÇAIS » • Enfin, sur un plan plus général, la Commune élabore, dans une « déclaration au peuple français » publiée le 19 avril, un schéma politique national suggérant un modèle fortement décentralisé, selon lequel la République résulterait de la fédération de toutes les communes de France.

Dans ce schéma, celles-ci seraient dotées d'un certain nombre de pouvoirs -vote du budget communal, organisation de la magistrature, de la police, de l'enseignement, recrutement de tous les fonctionnaires par élection ou concours, administration des biens appartenant à la commune -, tout en étant garantes d'un certain nombre de droits fondamentaux -liberté individuelle, liberté du commerce, liberté du travail.

intervention permanente des citoyens dans les affaires de la commune, organisation de la garde nationale par l'élection de ses chefs.

UNE ORGANISAnON INCERTAINE LES ERREURS DE LA GARDE NATIONALE • Le sort de la Commune est rapidement scellé par la volonté du gouvernement de Versailles de mettre fin à l'insurrection.

Parallèlement des erreurs d'organisation et d'appréciation la fragilisent.

• En raison de la menace permanente que font peser les troupes régulières au service de Versailles, le comité central de la garde nationale a conservé la responsabilité du maintien de l'ordre et des opérations militaires.

font particulièrement violents.

Le 2 avril, Ptlris est bombordé tandis que les généraux Gallifet et Vinoy s'emparent de Courbevoie.

Le lendemain, les chefs de la garde nationale, sans en référer à la Commune, entreprennent de marcher sur Versailles.

Leur opération tourne au désastre .

Gustave Flourens, figure emblématique de la Commune, est tué.

L E « DtCRET DES OTAGES li • Dans le même temps, face à l'intensité des combats, la Commune prend une décision maladroite, le « décret des otages », qui établit que tout suspect de complicité avec Versailles sera arrêté et gardé comme otage.

Thiers explo�e cette disposition pour convaincre l'opinion nationale et les élus de l'Assemblée du caractère brutal de la Commune.

Dans les faits, cent vingt personnes, parmi lesquelles plusieurs personnalités comme Mgr Georges Darboy, archevêque de Paris, ou le président de la Cour de cassation, Louis Bernard Bonjean, seront mises en prison.

Cinquante-deux d'entre elles, dont Mg r Dllrboy, seront exécutées au cours de la « semaine sanglante ».

LA" SEMAINE SANGLANTE » L'ASSAUT DE PARIS • Le 10 mai, aussitôt signé le traité de paix avec l'Allemagne, Thiers obtient la libération anticipée de plusieurs milliers de soldats.

Une fois ses forces réorganisées, il lance une armée de 130 000 hommes à l'assaut de Paris, sous le commandement du maréchal de MDC-MIIhon.

• Le 21 mai, les troupes versaillaises entrent dans la capitale par la Porte de Saint-Cloud.

Durant les sept jours de la « semaine sanglante », la capitale sera le théatre d'une véritable guérilla urbaine.

Père-Lachaise, contre un mur appelé depuis lors « mur des fédérés ».

LE BILAN DES COMBATS • Il est difficile d'établir un bilan des victimes des la Commune.

Si 877 morts sont dénombrés dans les troupes régulières, les pertes dans les rangs des fédérés sont estimées à 30 000 morts.

• À l'issue de la semaine sanglante, quelque 35 000 personnes sont arrêtées, dont un grand nombre de femmes et une ma)orité d'ouvriers.

Les tribunaux militaires prononceront 13 450 condamnations, dont 268 à la peine de mort et des centaines d'autres aux travaux forcés ou à la déportation, notamment en Nouvelle-Calédonie.

Des milliers de Communards sont contraints de s'exiler en Belgique, en Suisse ou en Angleterre.

LA PORTÉE HISTORIQUE DE LA COMMUNE • Sur le plan politique, la Commune se caractérise avant tout par son idéal égalitaire.

Celui-ci a été fortement revendiqué par la pensée communiste : Marx, dans la Guerre civile en France, parue à Londres en mai 1871, laisse percer son admiration pour le « Paris ouvrier[ ...

] pionnier d'une société nouvelle », tandis que Lénine en fera un modèle d'insurrection du prolétariat contre l'oppression bourgeoise.

Le mouvement anarchiste y puise aussi une légitimité fondatrice, incarnée par les héros du mouvement comme Charles Delescluze ou Louise Michel.

• Plus généralement, la Commune apparaît comme le symbole du soulèvement ouvrier et populaire soutenu et accompagné par des bourgeois éclairés.

• Sur le plan historique, les apports fondamentaux de la Commune préfigurent ceux de la Troisième République.

Ses dirigeants se sont en effet attachés dês les premières heures à appliquer les point forts du « programme de Belleville », symboles de l'idéal républicain, qui seront mis en œuvre au cours des trente années suivantes : liberté de la presse (1881), instruction gratuite et obligatoire (1882), liberté d'association (1901), séparation de l'Église et de l'État (1905).

• Ce sont ces avancées, ainsi que son caractère utopiste et romantique, qui font de la Commune un élément incontournable de la mémoire collective de l'histoire de France.

• Dans la nuit du 18 au 19 mars 1871, ,_.,._ Mldlel monte à l'assaut de la butte Montmartre à la tête du com�é de vigilance républicain du XVIII' arrondissement qu'elle préside, afin de défendre les canons de la garde nationale.

Durant la Commune, cette institutrice se fait ambulancière, et anime le dub de la Révolution.

Appartenant à la frange la plus radicale des Communards -elle proposera d'aller elle-même assassiner Thiers à Versailles -, elle gagne le surnom de « louve rouge ».

• Arrêtée à la fin de la Commune, elle réclame la peine de mort, mais y échappe en tant que femme.

Son attitude inspire à Victor Hugo le poème Viro major- • Tu faisais ce que font les grandes ames folles 1 Et lasse de lutter, de rêver de souffrir, 1 Tu disais : • j'ai tué ! " car tu voulais mourir.

» Déportée en Nouvelle-Calédonie d'où elle revient en 1880, Louise Michel se voue à la cause anarchiste, continuant jusqu'à sa mort de braver l'ordre êtabli.. »

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