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La découverte des camps nazis : De la découverte fortuite de Majdanek par les Soviétiques à l'entrée des Américains à Mauthausen

Publié le 10/11/2018

Extrait du document

CONFRONTÉS A L'HORREUR

 

En resserrant leur étau sur le Reich, les Alliés découvrent au fil de leur progression les camps mis en place par le régime nazi pour anéantir les juifs d'Europe et éliminer les opposants, les Tziganes et les homosexuels. Dans la plupart des cas, c'est le hasard qui préside à la découverte des camps et des nombreux Kommandos - camps de travail rattachés aux camps principaux. Ni Britanniques, ni Américains, ni Soviétiques ne sont préparés au spectacle de l'horreur qui les attend. Leur découverte du système concentrationnaire nazi suscite dans le monde une immense émotion.

LE MONDE SAVAIT

Des camps d'internement

La grande majorité des populations du « monde libre » n'a découvert l'existence des camps nazis qu'au lendemain de la chute du IIIe Reich. Le système concentrationnaire est pourtant très étroitement lié au régime nazi, dont il a accompagné les premiers pas. Comment a-t-on pu dire - et singulièrement en Allemagne - : « On ne savait pas »?

Dès les premières années du pouvoir nazi, les informations concernant l'ouverture de nombreux camps, en particulier en Allemagne, sont disponibles. De fait, le nouveau chancelier du Reich ne cherche guère à cacher qu'il entend faire des camps un instrument privilégié de sa politique de lutte contre les opposants au régime. L'exclusion et l'enfermement accompagnent donc les premiers pas du régime national-socialiste.

Le système concentrationnaire voit le jour le 28 février 1933, au lendemain de l'incendie du Reichstag dans le cadre du décret sur « la défense contre les actes

de violence communiste dangereux pour l'État ». C'est au nom de ce décret que 4 000 militants communistes sont internés dans le camp provisoire de Böyermoor, près d’Osnabrück.

En l'espace de quelques mois, le territoire de l'Allemagne se couvre de camps dont la seule évocation ne tarde pas à imposer la peur. En mars, la création du Konzentrationlager (KL ou KZ) de Dachau, dans les environs de Munich, précède d'un mois l'installation, non loin de Berlin, du camp d'Oranienburg. D'autres camps ne tardent pas à voir le jour, dont Buchenwald, près de Weimar, et Mauthausen, créé par Himmler après l'annexion de l'Autriche en mars 1938.

• Dès 1935, on dispose de témoignages sur le système concentrationnaire dont la presse du monde libre se fait l'écho.

Le tournant De la cuerre

Dans un premier temps, la population concentrationnaire est principalement composée d'opposants politiques - des communistes dans leur immense majorité - et de quelques détenus de droit commun, en particulier à Oranienburg.

Si les décisions d'internement appartiennent encore à l'appareil

Découverte de Majdanek par l'Armée rouge Entrée de l'Armée rouge à Auschwitz Découverte d'Ohrdruf par les Américains Entrée des Américains à Nordhausen et Buchenwald «Visite» du général Eisenhower à Ohrdruf Entrée des Britanniques à Bergen-Belsen Arrivée à Paris des premiers rapatriés de Buchenwald Libération de Dachau par les Américains Entrée des Américains à Mauthausen

LES PREMIÈRES IMAGES EN FRANCE

• La presse hésite avant de montrer les photographies de la tragédie. Les premières images sont consacrées au camp du Struthof, où les Américains et les Français sont entrés le 23 novembre 1944. Le 15 décembre, Libération-Soir reprend les clichés du camp alsacien déjà parus dans le New York Times. L'hebdomadaire Action présente des photos similaires - miradors, enceinte électrifiée, potence, prisonniers allemands - mais y ajoute un document sur un four crématoire.

• Le 23 février 1945, Action publie les clichés des fosses du stalag de Siedlce, en Pologne orientale, montrant les corps décharnés de « juifs » polonais et de « Russes ».

L'impact du déclenchement de la guerre sur la population des camps est spectaculaire. Non seulement les effectifs croissent de manière démesurée, mais les camps s'ouvrent à de nouvelles catégories de détenus et de déportés. Ainsi, Polonais et Alsaciens, mais aussi prêtres catholiques « ennemis du Reich » viennent grossir la population du camp de Dachau.

On exécutera à Oranienburg plusieurs milliers de prisonniers de guerre soviétiques, tandis que seront concentrés à Mauthausen des détenus de toute l'Europe occupée : déportés polonais, républicains espagnols, prisonniers de guerre et civils soviétiques, résistants français, belges, hollandais, yougoslaves, norvégiens et enfin italiens.

Avec la guerre, le système concentrationnaire gagne les pays d'Europe qui vivent à l'heure allemande. Avec la guerre, c’est aussi l'extermination des juifs qui entre dans sa phase active.

En avril, on découvre les visages des premiers déportés heureux de retrouver le sol de France. Mais tout change début mai 1945, alors que la capitulation de l'Allemagne est acquise, notamment après la publication de Documents officiels sur les camps d'extermination nazis et la visite à Ohrdruf d'Eisenhower, commandant en chef des forces alliées en Europe de l'Ouest.

Dès les premiers jours de mai, la presse française donne à voir les images de charniers. Les actualités cinématographiques prennent le relais. Alors que, fin avril, les plans des charniers d'Ohrdruf étaient coupés, une semaine plus tard, les Actualités françaises montrent les cadavres entassés ou les corps brûlés au lance-flamme.

En juin, les magazines consacrent des numéros spéciaux aux atrocités nazies, bien qu'on ne distingue toujours pas les juifs des déportés politiques. Mais, désormais, la photographie porte témoignage, sans réserve, de ces assassinats de masse.

« • les Soviétiques découvrent bientôt l'immens ité du complexe d'Auschwitz .

la plupart des camps qui le composent ont été vidés de leurs détenus.

les 18 et 19 janvier , alors qu'il ne restait que 31 894 prisonniers à Birkenau et à Auschwitz 1, et 35 118 à Monowitz et dans les camps satellites, quelque 58 000 d 'entre ont été jetés sur les routes par les SS.

Face à l'avance des armées alliées , les Allemands ont ainsi entrepris de transférer des milliers de détenus vers d'autres camps au cours de ces « marches de la mort ».

•l'ou verture du camp d'Auschwitz n'est en rien la conséquence d'un plan préconçu.

Sa découverte tient du fortuit.

Cela explique que rien n'ait été prévu pour alimenter et soigner les survivants.

D 'ailleurs, les Soviétiques procèdent à une mise en scène de la libération du camp.

Mobilisant quelques détenus, ils filment une reconstitution de leur arrivée montrant des soldats de l'Armée rouge accueillis en libérateurs .

la plupart des images qui circuleront par la suite dans la presse proviennent de cette mise en scène.

0HRDRUF • l'impression d'improvisation qu'inspire la découverte d'Auschwitz se poursuit avec l'entrée des Américains dans les camps situés plus à l'ouest.

• les 4 et 5 avril 1945, des unités appartenant à la 4 • division blindée de la Ill ' armée américaine font route en direction de Gotha et d'Ohrdruf , dans la région.

les villes de Gotha et d'Ohrdruf sont occupées sans difficulté.

le centre secret reste introuvable.

En revanche, une patrouille d'éclaireurs découvre, à l'abri d'une colline, un camp comme personne n'en a encore vu.

• À l'intérieur , éparpillés dans les allées ou empilés dans les barraquements gisent des milliers de corps.

Dans un bûcher élevé à la limite du camp subsistent des restes humains à moitié carbonisés.

Comme dans bien d'autres camps, les Allemands ont choisi de transférer les détenus plutôt que de laisser les Américains , dont ils savent l'avance inexorable, les libérer .

Ceux qui ne pouvaient pas marcher ont été exécutés sur place .

NORDHAUSEN ET DORA • le 11 avril, c'est la division américaine « Timberwolf >> qui entre à Nordhau sen, à moins de 100 km .

au nord -~·~ ·~o!l d'Ohrdruf, où elle découvre quelque J IHHI Clldlllfi'I!S et seulement 700 survivants.

Certains de ceux-ci , affaiblis par le manque de nour riture et atteints par la tuberculose, ont été blessés la semaine précédant l'arrivée des Américains par des bombardements alliés qui visaient les usines d'assemblage des fusées V2.

• Nordhausen n'est que le camp souche de Dora, un Kommando dont l'essentiel des installations dévolues à l'assemblage des V2 est enterré.

à environ 150 km au nord-est de Frandort .

Elles sont à la recherche d'un centre secret de communication que les nazis auraie nt install é Sur les 60 000 personnes déportées f--------------1 à Dora , 20 000 y ont trouvé la mo~ la plupart entre l'automne 1943 UNE VISITE IMPOSÉE À BUCHENWALD • Sommé de faire rlslfer le ,.., tle ~le maire de Weimar adresse à ses administrés la directive suivante : • le général commandant a ordonné la nuit dernière qu'au moins 1 000 habitants de la ville, dont la moitié de femmes, visitent aujourd 'hui le camp de Buchenwald et les hôpitaux qui existent afin de se rendre compte des conditions qui y régnent avant qu'elles ne soient changées.

Doivent prendre part à cette visite des hommes et des femmes de 18 à 45 ans -en premier lieu les membres du NSDAP dissous [ ...

].

Ils doivent être suffisamment forts pour supporter la visite (durée : environ 6 heures ; marche : en gros 25 km) .

De la nourriture doit être apportée avec soi, mais elle doit être consommée avant la visite.

Il n'arrivera rien aux participants .

la marche sera accompagnée de véhicules de la Croix-Rouge allemande et de médecins de façon qu'il puisse être porté secours à ceux qui ne supporteraient pas ces efforts.

» et l'hiver 1944.

BUCHENWALD • le même jour , les Américains découvrent Buchenwald, près de Weimar, l'un des tout premiers camps mis en place par les nazis en 1937.

Dans le camp se trouvent encore une vingtaine de milliers de détenus.

Les autres -en nombr e à peu près équivalent - , dont la moiti é de juifs , ont eux aussi été jetés sur les routes où la plupart sont morts entre le 8 et le 10 avril.

Comme à Auschwitz et à Nordhausen , c'est le hasard qui préside à l'arrivée des Américains à Buchenwald.

• le 11 avril à midi, un groupe de combattants appartenant au 9 ' bataillon de la 6 • division blindée , entré dans la ville de Hottelsted~ capture une quinzaine de SS qui se révèlent être des gardes d'un camp de concentration voisin.

le capitaine Robert Bennet décide alors d'y envoyer quatre hommes en reconnaissance.

Ceux-ci pénètrent dans l'enceinte du complexe par un trou aménagé dans la palissade du camp principal.

Accueillis avec enthousiasme par quelques détenus, ils leur distribuent leurs rations et leurs cigarettes et préviennent le QG de leur découverte .

les quatre éclaireurs n'ont vu que le grand camp que les Allemands ont abandonné sans combat.

• À côté de ce grand camp existe un « petit camp >> bondé de détenus et notamment de prisonniers évacués d'autres camps.

Percy Knauth, un journaliste américain présent lors de l'entrée des Alliés, note : « Buchenwald est au-delà de la compréhension.

Vous ne pouvez comprendre , même si vous avez vu.

>> BERGEN-BELSEN ·le 15 avril.

les Britanniqu es arrivent à Bergen-Be/sen, un camp situé non loin de Hanovre .

Destiné à l'origine à la détention des prisonniers de guerre , Bergen-Belsen devient à partir d'avril1943 un camp de détention pour les juifs qui, possédant la double nationalité ou étant citoyen d'un pays neutre, peuvent être échangés contre des prisonniers allemands.

la plupart des« juifs de l'échange> > sont internés au « camp de l'étoile >>.

Bergen-Belsen abrite d'autres camps comme le « camp des neutres >> et le « camp des Hongrois >>.

• la décomposition du Reich, dans les semaines précédentes, s'est traduit par l'arrivée à Bergen-Belsen d'un afflux de déporté s en provenance de divers autres camps.

Jusqu'aux derniers jours précédents sa découverte par les Alliés, des convois y déversent leurs cargaisons de déportés.

la mortalité y devient très vite effarante, des millier s de malheureux sont emportés par la tuberculose, le typhus ou la fièvre typhoïde.

Au moment de la libération de Bergen-Belsen, 60 000 détenus sont encore vivants.

Alors qu'il n'était pas dédié à l'extermination -il ne disposait pas de chambre à gaz -, Bergen-Belsen est devenu en quelques mois le plus grand mouroir de l'Europe .

• Dans l'encein te de Bergen-Belsen se trouvent un camp militaire et deux camps de concentration.

Dans le camp n • 1, les Alliés découvrent une dizaine de milliers de Clldlllfi'I!S et 45 000 agonisants.

les quelque 15 000 détenus du camp n• 2 sont dans un meilleur état car ils viennent d'arriver .

Aussi sont-ils encore capables de manifester un peu d'enthousiasme le jour de l'arrivée des Britanniques .

DACHAU • Contrairement aux camps précédents, la découverte de Dachau ne doit rien au hasard .

En elfe~ deux régiments américains ont reçu l'ordre de faire route en direction de Dachau .

• le 29 avril, le 157' régiment d'infanterie de la 45 • division et le 222 • régiment de la 42 • division pénètrent dans l'enceinte du camp .

un non-événement militaire dans la mesure où le camp n'est défendu que par le Volkssturm, la « troupe d'assaut du peuple> > constituée en septembre 1944 par Hitler et composée pour l'essentiel d'adolescents ou d'hommes ayant dépassé l'âge de porter les armes.

• Accueillies dans la liesse, les unités américaines trouvent une quarantaine de wagons de marchandises remplis d 'environ 2 000 corps .

la première décision des libérateurs est de ne laisser personne entrer ou sortir du camp par crainte de la propagation du typhus .

MAUTHAUSEN • Situé en Autriche, non loin de linz, Mauthausen compte parmi les camps au régime les plus durs, où la mortalité des détenus a été parmi les plus élevées.

• le 4 mai, des unités de la 71' division de la lll' armée américaine s'approchent du camp de Gunskirchen, l'un des Kommondos de Mauthausen .

les soldats sont frappés, selon le récit du capitaine Pletcher, par« l'odeur presque visible qui pèse sur le camp comme un brouillard de mort >>.

• le 5 mai et les jours suivants, les Américains pénètrent dans le camp principal et dans les autres Kommandos , notamment Gunsen et Ebensee, où ils découvrent le même spectacle d'horreur .

UNE LIBÉRATION DIFFÉRÉE Lfs PIEMIERS SOINS • Pour les détenus , l'investissement des camps par les Alliés ne signifie pas pour autant la libération immédiate .

Les libérateurs redoutent une propagation du typhus .

Aussi les camps demeurent-ils dans un premier temps hermétiquement clos.

De plus , rien n'a été prévu pour faire face aux immen ses besoins en soins, en médicaments et en nourriture que réclame l'état des détenus.

• À Bergen-Belsen , les Britanniques sont débord és par l'ampleur de la tâche .

les premiers secours apportés le 16 avril se révèle bien insuffisants et les détenus pillent les maigres rations .

les premières livraisons sont constituées de conserves de viande et de légumes, autant d'aliments peu adaptés à l'état des prisonniers .

• Tandis que les détenus trop faibles agonisent faute de pouvoir disputer la nourriture à leurs congénères , d'autres meurent de trop manger d'un coup .

Il faut attendre plusieurs jours pour que les Britanniques comprennent que les détenus ont besoin d'une nourriture spécifique : riz, gâteaux secs, lait frais.

Aussi des milliers de personnes continuent­ elles de mourir dans les jours qui suivent la libération.

• la question de l'inhumation des corps est également préoccupante.

le 17 avril commencent des entelftmtnts de m11sse effectuées par le personnel SS sous les yeux des survivants.

Six semaines après la découverte du camp , quelque 23 000 corps ont été ains i enfouis, dont ceux de 13 000 déportés morts depuis l'arrivée des Britanniques.

L'tNrriAnVE DU GtNtRAL PATTON • En découvrant les camps, les Alliés s'interrogent sur ce que savait de leur existence la population des villes environnantes.

Pour le moins sceptiqu e s quant aux dénégations des habitants, les autorités militaires forcent ces derniers à une visite systématique des camps .

• le 15 avril, le général Patton impose au maire de Weimar qu'il fasse visiter Buchenwald à ses concitoyens.

la décis ion de Patton est bientôt imitée.

Partout, les populations alleman des se trouvent obligées de faire face à la réalité des camps.

• Ceux qui découvrent les camps entendent informer le monde de ce qu'ils y ont vu.

Peu après avoir visité Ohrdruf , le général Eisenhower ordonne que chaque unité non engagée sur le front se rende dans le camp.

À cette occasion, le général américa in déclare : « On nous dit que le soldat américain ne sait pas ce pour quoi il combat.

Maintenant, au moins, il saura cont re quoi il se bat.

>> • Eisenh ower demande également que des déléga tions d'officiels et de journali stes se rende nt dans les divers camps afin de témoigner.

Un comité du Congrès visite Buchenwald le 24 avril, Nordhausen le 1" mai et Dachau le lendemain .

Sénateurs et membres de la Chambre des représentants rédigent un rapport qui comporte un bref historique des camps, l'analyse de leur fonction ainsi que la description des trois sites visités.

• Parallè lement, les journalistes se press ent à Bergen-Belsen.

leurs premiers reportages publiés dans la presse anglo-saxonne suscitent une immense émotion.

• Cet intérêt retombe toutefois assez vite.

Le film réalisé par l'Anglais Sydney Bernstein sur le camp de Bergen-Belsen afin de conserver la mémo ire de la barbarie nazie est ainsi séquestré par les autorités militaire s .

Les priorités militaires sont désormais de « gagner la paix ».

• Dès 1946, l'évocation des camps nazis devient un instrument de la guerre froide.

les Soviétiques stigmatis ent l'Allemagne de l'Ouest, héritière supposée de l'État nazi.

Quant à la destruction des juifs • d'Europe , il faudra attendre le procès d'Adolf E ichmann, à Jérusalem en 1961 , pour que sa singularité commence à s'impose r et que le génocide pénètre la conscience universelle .. »

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