Devoir de Philosophie

La Grèce des Colonels

Publié le 05/04/2013

Extrait du document

• Depuis la fin de la guerre civile en octobre 1949, qui a vu la victoire des forces gouvernementales sur l'Arrnée démocratique (communiste), la vie politique en Grèce est caractérisée par une grande instabilité. Juntes militaires et gouvernements notoirement faibles se succèdent. dont l'unique légitimité - et le seül dénominateur commun - semble tenir au respect de la monarchie. Les formations politiques ne pèsent guère sur les décisions du gouvernement - une impuissance à laquelle fait

« • En déclarant que la Constitution doit être modifiée afin de renforcer le pouvoir exécutif et de subordonner les libertés civiles et politiques à la paix sociale, le roi participe à la radicalisation de la campagne électorale.

Ainsi, en mars 1967, le quotidien Etnos, dirigé par le fils de Georges Papandhréou, Andhréas, affirme que toute violation de la Constitution ne pourra que déboucher sur la révolution .

LE COUP D1TAT DU J1 AVllL LE •CONTIE-COUP D1rlll' » DE CoNstvmN • Le 21 avril 1967, le général Stylianos Pattakos et les colonels Georges Papadh6poulos et Nikola Makarezos effectuent un coup d'État.

•Un -N• ~ voit le jour sous la direction de Konstandinos Kollias .

Papadh6poulos occupe les fonctions de ministre de l'intérieur tandis que le poste de vice-Premier ministre et celui de ministre de la Défense reviennent au général Spandidakis.

• Les trois putschistes déclarent leur fidélité à la couronne, font savoir que les chefs des principaux partis politiques sont aux arrêts forcés à domicile et que le putsch s'est déroulé sans effusion de sang.

Un discours qui se veut rassurant alors même que des milliers de personnes sont déportées sur les nes de Yaros et Leros, dont plusieurs intellectuels, parmi lesquels le célèbre compositeur Mikis Theodorakis.

• Le 13 décembre 1967, le roi Constantin, qui a compris que les colonels entendent le confiner dans un rOle honorifique, tente de reprendre le pouvoir .

En vain.

Les colonels ont épuré l'armée de bon nombre d'officiers royalistes.

• Le 14 décembre, le général Georges Zoitakis est nommé régent du royaume et le colonel Georges Papadh6poulos prend la tête du gouvernement.

Un communiqué officiel fait savoir que le retour du roi, qui a pris le chemin de rex11 • ,,_, •n'est pas opportun• .

• Les colonels proclament l'état de siège, interdisent les partis politiques et les syndicats et rétablissent la censure.

Après avoir imposé l'obligation de rédiger les documents publics en grec ancien, les colonels interdisent le port des cheveux longs aux hommes, des pantalons aux femmes.

lEs llUcMN$ ElltllEUIU • La plupart des pays européens condamnent le coup d'État du 21 avril.

et des manifestations contre le régime des colonels se multiplient dans la plupart des capitales européennes, notamment à hrls .

• Le 31 janvier 1968, à l'issue de mois d'auditions qui permettent de prendre la mesure de la répression en cours en Grèce, le Conseil européen, faisant état des tortures et des violations des droits de l'homme, décide d'exclure la Grèce de l'organisation .

Mais il aura fallu un vote houleux pour y parvenir, les États-Unis, qui ont reconnu le régime putschiste, ne manquant pas de faire pression sur le Conseil européen pour qu'il renonce à exclure la Grèce de ses rangs.

•L'hypothèse selon laquelle la CIA aurait favorisé le coup d'État revient à plusieurs reprises au cours des débats du Conseil européen.

Si cette implication n'est pas confirmée, il reste que les États-Unis se sont toujours gardés d'émettre la moindre critique à l'égard du putsch et de la junte au pouvoir à Athènes.

Il est vrai que, dans le contexte de la guerre froide , la Grèce, membre de l'OTAN, représente pour Washington une pièce maitresse dans sa lutte pour contenir le communisme.

La décision du Conseil européen représente un terrible camouflet pour l'équipe dirigeante à Athènes .

•Le 13 août 1968, ~ Prl/lfHlll6pfw/os, qui a entre-temps démis le général Zoitakis et assume à présent les fonctions de régent, est la cible d'un attentat perpétré par Alexandros Panagoulis, poêle et militant issu de la formation de Papandhréou.

C'est un échec.

Mais le geste de Panagoulis surprend par son audace la police politique .

Celle-ci est convaincue, après les arrestations en masse des mois précédents, d'avoir neutralisé l'opposition .

!'.illusion des militaires d'avoir« normalisé» le pays est mise à rude épreuve .

• De son cOté, l'opposition tente de s'organiser à l'extérieur du pays.

La plupart des chefs politiques a en effet pris le chemin de l'exil.

C'est notamment le cas de Constantin Caramanlis et d'Andréas Papandhréou.

Ce dernier prend en 1968 la tête du Mouvement de libération panhellénique (PAK).

Des structures de résistance commune sont créées à Stockholm en avril 1969 à la suite du rapprochement entre le PAK, le Front patriotique (extrême gauche) et le mouvement Défense démocratique (centre gauche).

Mais ces tentatives de fédération de la résistance ne parviennent pas à masquer les profondes divisions de l'opposition.

LA lltVISION CO~NEW • Désavoué à l'extérieur -le régime des colonels a dO accepter le principe du retrait de ses troupes de 111e de Chypre-, Papadh6poulos tente de reprendre la main à l'intérieur en accélérant la procédure qui doit conduire à l'adoption d'une nouvelle Constitution attribuant l'essentiel des pouvoirs à l'exécutif et reconnaissant le rôle prépondérant de l'armée dans l'État Celle-ci est approuvée en septembre 1968 à l'issue d'un référendum transformé en plébiscite (95% de «OUÎt).

• Confortés par le référendum, les colonels décident de relacher la pression.

Estimant que• l'ordre règne sur la Grèce t, ils remettent de nombreux opposants en liberté .

Georges Papandhréou, agé et malade, bénéficie de cette mesure.

Mais le 1• novembre 1968, le vieux chef meurt Ses funérailles, ouvertes par le plus haut représentant de l'Église orthodoxe d'Athènes, donnent lieu à une immense manifestation contre la junte des colonels.

Le gouvernement fait donner la police qui procède à des centaines d'arrestations dans les rangs des manifestants .

• Au sommet de l'État, des dissensions se font jour qui conduisent Georges Papadh6poulos à prendre l'ascendant sur ses •coreligionnaires•.

• Hostile à la tenue de nouvelles élections, Papadh6poulos crée au début de 1970 un organe consultatif qu'il pare des vertus de la démocratie.

• En réalité , cet organe, composé de membres nommés par le gouvernement ou élus par des organisations socioprofessionnelles, ne pèse guère dans la vie politique .

Si la création de cet organe consultatif s'accompagne d'une certaine libéralisation, celle-ci laisse vite voir ses limites.

ALEXANDIOS PANAGOUUS • Dès le coup d'éat du 21 avril 1967, Alexandros Panagoulis, qui est alors conscrit, choisit de déserter en raison de ses convictions démocratiques et fonde l'organisation Résistance hellénique.

Il s'exile à Chypre pour y élaborer un plan d'action .

De retour en Grèce.

il projette, avec ses proches collaborateuls.

l'assassinat du colonel Papadh6poufos le 13 aoOt 1968 près de vartyza.

C'est un échec.

• Arrêté et jugé par les tribunaux militaires grecs le 3 novembre 1968, il est condamné à mort le 17 llO'o'ell1bre.

Mais, grace à l'intervention de la communauté internationale, la sentence est commuée en peine de prison.

• Après avoir refusé de bénéficier de l'amnistie générale accordée par le répne des colonels aux détenus politiques.

il est finalement libéré à l'été 1973.11 s'exile, cette fois à Florence.

bien décidé à poursuivre la résistance.

• Lors du rétablissement de la démocratie, Panagoulis se présente aux élections de novembre 1974 et est élu député d'Athènes.

Le l"mai 1976, à l'age de 38 ans, Panagoulis se tue dans un accident de voilure dans des conditions à œ jour encore mystérieuses.

LA PROCUlllATION DE LA lbPtJSUQUE • Le 25 mars 19n, jour anniversaire de l'insurrection contre les Turcs de 1821, une centaine de personnalités appartenant soit à la gauche soit à la droite monarchiste exigent le rétablissement de la souveraineté populaire.

Aux arrestations succèdent des procès politiques qui, de nouveau, attirent l'attention de la communauté internationale sur la Grèce .

• C'est donc dans un contexte extrêmement tendu que Papadh6poulos s'arroge la totalité des pouvoirs et élimine le régent Zoltakis .

Mais la manifestation du 25 mars ne le laisse pas indifférent Aussi, afin de prendre de court ceux qui dans l'opposition pourraient militer pour un retour du roi, Papadh6poulos décide de proclamer la république.

Celle-ci est ratifiée par référendum le 29 juillet L'homme fort de la junte en profite pour se faire élire chef de l'État En aoilt, Papadh6poulos prête serment et lève la loi martiale en vigueur depuis avril 1967.

Pour autant, le calme et l'ordre sont loin de régner à Athènes.

LA 11tvo1J1 DE L'kou l'OlnlCHNIQUE • Le 4 novembre 1973, à l'occasion du cinquième anniversaire de la mort de Georges Papandhréou, les rues d'Athènes sont envahies par des milliers de manifestants qui crient leur hostilité au gouvernement !'.intervention des forces de l'ordre , loin de ramener le calme, attise les tensions .

Le 16 novembre, les étudiants occupent l'École polytechnique d'Athènes pour protester contre le régime .

Les mn prennent d'assaut les batiments .

À l'issue de l'intervention, on compte une vingtaine de morts et plus d'une centaine de blessés .

• Le 17 novembre, la loi martiale est proclamée tandis que se mettent en place des tribunaux militaires .

Mais les jours de Papadh6poulos sont comptés.

• En effet, prenant la mesure de l'impopularité du chef de l'État et de l'impact négatif de l'intervention des chars, une poignée de militaires décident d'éloigner les protagonistes du coup d'État de 1967 , pensant ainsi rester au pouvoir.

Papadh6poulos est déposé par une junte dirigée par le général Phaidon Ghizikis, lequel se proclame président de la République.

LA FIN DE LA DICTATURE L'AVENTUll MIUJAlll À CllYPllE • Les premières mesures arrêtées par Ghizikis concernent la suspension de la Constitution et la prorogation de la loi martiale sur fond d'amplification de la répression contre l'opposition .

•Aux conwlsions politiques s'ajoutent les effets, calamiteux pour le régime, d'une économie exsangue, dont une inflation qui compte parmi les plus fortes en Europe .

Voulant à tout prix obtenir à l'extérieur un succès qui se dérobe à eux à l'intérieur, les militaires décident de jouer la carte chypriote.

Le général Ghizikis ourdit un complot qui prévoit l'assassinat du président M•k •rlos et l'union de 111e avec la Grèce O'EnOsis), alors même que la Turquie ne cesse de revendiquer ce territoire depuis 1914, date de son annexion par les Britanniques.

• Mis en œuvre le 15 juillet 1974, le plan grec échoue lamentablement Ayant eu vent de l'affaire, Makarios parvient à prendre la fuite .

La junte le remplace par un ancien dirigeant de l'EOKA (Organisation pour la libération de 111e) .

La Turquie réagit en envahissant Chypre le 20.

Dépassés par leur entreprise, les militaires font machine --4:..

• . JA - arrière, ce qui n'empêche pas les fwres lllWfts ,.,.._sde progresser dans 111e dont ils occupent la partie nord.

Quelque 200 ooo Chypriotes grecs doivent abandonner leurs foyers pour se réfugier dans le sud.

LE UTOUI DE CoNsîAllTIN ÙIAllANUS • En voulant sauver son régime dans ce qui ressemble à une aventure militaire insensée, le général Ghizikis aura obtenu l'effet inverse.

Ultime humiliation, l'armée se voit contrainte de rappeler Constantin Caramanlis à Athènes en lui confiant la mission de sortir le pays du chaos.

• Des élections libres sont organisées le 17 novembre 1974 qui voient la victoire du nouveau parti de Caramanlis, la Nouvelle Démocratie.

L'interdit prononcé contre le parti communiste est levé tandis qu'Andhréas Papandhréou fonde le Mouvement socialiste panhellénique (PASOK).

• Un référendum sur le rétablissement de la monarchie est organisé le 8 décembre 1974 auquel les Grecs se montrent largement hostiles (70 % de refus) .

• Fort de sa victoire électorale, le nouveau gouvernement met en chantier une nouvelle Constitution.

Celle-ci, qui établit un régime présidentiel, est approuvée le 7 juin 1975 par la Chambre.

• En faisant appel à Constantin Caramanlis, celuHà même qui incarnait leur adversaire politique par excellence, les militaires auront mis fin à une dictature mort-née .

• Ni la lutte contre la corruption politique, par laquelle ils ont voulu justifier leur intervention d'avril 1967 -jamais le clientélisme n'aura connu de plus belles heures que sous les colonels -, ni le développement économique promis -et jamais venu - ne peuvent atténuer une entreprise dont le bilan restera totalement négatif.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles