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le silence de la mer vercors fiche de lecture

Publié le 01/04/2013

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Le Silence de la mer est une nouvelle de Vercors (pseudonyme de Jean Bruller) et publiée clandestinement aux Éditions de Minuit dès février 1942. La nouvelle est notamment inspirée par les réflexions de l'auteur suite à sa lecture de Jardins et routes d'Ernst Jünger. C'est devenu une nouvelle "classique" abordant des thèmes centraux sur la vie et la guerre. Trame de l'histoire En 1941, au début de l'Occupation, un officier allemand, épris de culture française, réquisitionne la maison d'une famille comprenant un vieil homme et sa nièce. Par des monologues prônant le rapprochement des peuples et la fraternité, il tente, sans succès, de rompre le mutisme de ses hôtes dont le patriotisme ne peut s'exprimer que par ce silence actif. Le Silence de la mer et autres récits est aussi le titre d'un recueil de nouvelles de Vercors qui comporte 6 nouvelles. Autour du livre Un livre est rarement l'objet d'un culte tel que l'a été le Silence de la Mer, pour des raisons plus patriotiques et conjoncturelles que littéraires. Le contexte a donné lieu à de nombreuses allégations comme celle d'Ilya Ehrenbourg qui pensait qu'il s'agissait sûrement d'une « oeuvre de provocation écrite certainement par un nazi pour servir l'action d'intoxication menée par la Gestapo «. Ou encore la majorité des résistants à Londres qui ont lu le livre étaient sûrs qu'il avait été écrit par André Gide... L'histoire est inspirée de faits réels, Vercors ayant accueilli chez lui un officier allemand avec une jambe raide qui jouait au tennis pour la rééduquer. Toutefois, aucun rapport ne s'était jamais établi entre eux mais Vercors avait remarqué que cet officier avait pour la France un certain attachement notamment par sa possession de nombreux livres français et d'un buste de Pascal. À partir de ces éléments, Vercors a écrit l'histoire que nous connaissons aujourd'hui, sa femme étant devenue sa nièce pour créer un lien passionnel plus dramatique. Rédigé au cours de l'été 1941 le livre n'est achevé d'imprimer que le 22 février 1942. Nombre de lecteurs remarquèrent un décalage entre le récit et les réalités de la situation : pour ceux qui ne supportaient pas le joug allemand le temps du silence était dépassé, l'heure de la lutte avait sonné. La dédicace à Saint-Pol-Roux, loin d'être gratuite, confirme et souligne le sens du récit. Le poète, ami de Jean Moulin et de Max Jacob, était mort en décembre 1940 à l'hôpital de Brest six mois après qu'un soldat allemand ivre eut forcé la porte de son manoir, tué sa servante et violé sa fille, Divine (le viol fût réfuté par la suite). L'hommage est explicite ; les autorités qui ont pu couvrir un tel crime ne sauraient être crues lorsqu'elles nous proposent de collaborer avec elles. Les écrivains qui acceptent de collaborer avec elles se font leurs complices. Le manuscrit parvient à Londres, et le général De Gaulle en ordonne une réédition sur le champ aux fins de large diffusion. C'est une de celles-ci qui passera dans les mains de Melville qui l'adaptera pour le cinéma. Vercors est le pseudonyme littéraire adopté pendant la Résistance, durant la Seconde Guerre mondiale, par l'illustrateur et écrivain français Jean Bruller. Jean Marcel Adolphe Bruller est né le 26 février 1902 à Paris XVe et mort le 10 juin 1991 à Paris . L'état civil indique "Brüller" sur l'acte de naissance, mais tous les livres publié et l'usage utilisent "Bruller". Jean Bruller est né d'une mère française (Ernestine Bourbon, institutrice) et d'un père d'origine hongroise (Louis Bruller, éditeur) qui est venu de Hongrie à Paris. L'histoire de son père, arrivé à Paris et auquel des amis de ses parents vont trouver un emploi, a inspiré la nouvelle La marche à l'Étoile publiée pendant l'Occupation. Il effectue ses études primaires et secondaires à l'École alsacienne à Paris. Après son bac, il va obtenir un diplôme d'ingénieur électricien à l'École Breguet (ESIEE-Paris). Dès 1921, il devient dessinateur humoristique et illustrateur dans la lignée de Gus Bofa. Il publie ses premiers dessins dans la revue Sans-Gêne grâce à Maxime Ferenczi. Il rédige ses premières chroniques Les Propos de Sam Howard dans l'hebdomadaire Paris-Flirt en 1923-1924 sous l'influence des Contes profitables d'Anatole France. Il signe ses dessins avec son pseudonyme Joë Mab. Il réalise son premier album (dessins et textes) en 1926 : 21 recettes pratiques de mort violente. Il illustre en 1930 l'album pour enfants Patapoufs et Filifers, fable d'André Maurois sur les méfaits de la ségrégation, Pacifiste jusqu'en 1938, il est mobilisé pendant la Seconde Guerre mondiale à Mours-Saint-Eusèbe près de Romans au pied du massif du Vercors. Il entre ensuite dans la Résistance, encouragé par Pierre de Lescure, et prend le pseudonyme de Vercors, nom d'un massif montagneux, procédé utilisé par de nombreux résistants. En 1941, il co-fonde, avec Pierre de Lescure, les Éditions de Minuit, maison d'édition clandestine et y publie sa nouvelle Le Silence de la mer le 20 février 1942. Il est le concepteur du logo à l'étoile des Éditions de Minuit qui est utilisé après la Seconde Guerre mondiale. Il participe également au Comité national des écrivains (CNE) et au Mouvement de la paix. Il a écrit ses souvenirs dans La Bataille du silence. Il fait partie de la Commission d'épuration de l'édition, mais il en démissionne en raison de l'inégalité des sanctions à l'encontre des écrivains, collaborateurs avec l'Allemagne nazie, et à l'encontre de leurs éditeurs, jamais pénalisés. Il refuse dans le même temps de participer à l'établissement d'une « liste noire « et renvoie les auteurs au jugement de leur conscience. En 1960, il fait partie, avec Sartre, des signataires du Manifeste des 121 écrivains et artistes qui déclarent « le droit à l'insoumission dans la guerre d'Algérie «. En guise de protestation contre la torture pratiquée en Algérie, Vercors refusa la Légion d'honneur. Dans Le Silence de la mer, Vercors ne dédie pas son livre à un grand résistant ou à une figure de la liberté mais à Saint-Pol-Roux, Poète assassiné. Saint-Pol-Roux est un écrivain, vieil homme qui meurt de chagrin en 1940 quand son manoir contenant tous ses textes inédits est pillé, peu après qu'un soldat allemand ait violé sa servante de force et blessé sa fille. Tout comme Le Silence de la mer veut évoquer une résistance muette au bord des cris, cet homme qui meurt brisé, presque futilement, est le symbole même de la lutte silencieuse de Vercors. Il est aussi connu pour un roman philosophique, Les Animaux dénaturés, dont fut tirée la pièce Zoo ou l'assassin philanthrope. Il meurt à Le fonds d'archives de l'écrivain est consultable à la bibliothèque de l'Université du Maine, au Mans, qui a depuis pris le nom de bibliothèque universitaire Vercors. En 1941, en pleine guerre, un jeune soldat allemand, Werner Von Ebrennac, vient s'installer chez un homme et sa nièce. Son arrivée se fait dans un silence insoutenable et à travers un malaise fou. Mais « Dieu merci, il a l'air convenable «. C'est un jeune homme poli qui parle constamment, sans jamais obtenir de réponses, sans jamais même en attendre. Il semble vivre seul dans un monde de statues.Le jeune Werner prend l'habitude, durant l'hiver, de venir se chauffer au feu de foyer, où il égaye son soliloque. Les relations de l'Allemagne et de la France est son sujet le plus fréquent. Il parle d'art, de littérature et de musique, puisqu'il est lui-même France pour pouvoir y apporter quelque chose, mais aussi pour pouvoir y prendre en échange. Un peu à chaque soir, ce sont ses idées que l'on entend dans la maison française. Et les soirées se terminent toujours de la même manière : « Je vous souhaite une bonne nuit «.Un beau jour, Werner apprend à ses hôtes qu'il ira passer ses deux semaines de permission à Paris, où des amis l'attendent. À son retour, il met une semaine avant d'adresser la parole à ses hôtes. Un soir, alors que durant la journée il a croisé le vieil homme, il descend lourdement voir celui-ci et sa nièce. Il leur demande d'oublier tout ce qu'il a pu dire durant les six derniers mois et expose les plans des Allemands contre la France avant de quitter définitivement la maison. Le silence de la mer est un roman fort simple, mais renfermant plusieurs éléments qui demandent réflexion et approfondissement. D'abord, l'action elle-même aurait pu causer un problème à l'auteur si elle avait été connue durant la guerre : un français qui héberge un Allemand, c'est plus que subversif pour des hommes qui ne pensent qu'à leur propre victoire. Mais ce qu'il faut voir à travers l'action des personnages, c'est une philosophie fort humaine : nous sommes tous humains, les limites de nos pays ne sont visibles que sur les cartes que nous dressons. Le roman de Vercors est philosophique et possède une structure narrative qui donne un essor considérable à cette philosophie. Le silence est d'ailleurs un thème et une action qui vient beaucoup influencer la vision que l'on a de l'intrigue. Les premiers mots adressés à Werner Von Ebrennac sont « Entrez, monsieur «, alors que celui-ci est sur le point de partir définitivement, à la fin du roman. Et dire que ces mots sont en fait la cristallisation du sentiment éprouvé par le vieil homme envers le plus jeune : une certaine sympathie, une inquiétude. Et les derniers mots qui lui sont adressés, par la nièce, « Adieu «, ne viennent que quelques minutes après, à peine. Une porte s'est ouverte, mais personne n'a eu le temps d'y passer. Pourtant, toute l'émotion du moment y est et y demeurera. Voilà ce qu'est Le Silence de la mer de Vercors. Citations « Les Anglais, reprit-il, on pense aussitôt : Shakespeare. Les Italiens : Dante. L'Espagne : Cervantès. Et nous [les Allemands], tout de suite : Goethe. Après, il faut chercher. Mais si on dit : et la France ? Alors, qui surgit à l'instant ? Molière ? Racine ? Hugo ? Voltaire ? Rabelais ? Ou quel autre ? Ils se pressent, ils sont comme une foule à l'entrée d'un théâtre, on ne sait pas qui faire entrer d'abord. « « Un chef qui n'a pas l'amour des siens est un bien misérable mannequin. « « J'appris ce jour-là qu'une main peut, pour qui sait l'observer, refléter les émotions aussi bien qu'un visage, - aussi bien et mieux qu'un visage car elle échappe davantage au contrôle de la volonté. « « Il serrait les mâchoires avec une telle énergie que je voyais saillir les pommettes, et une veine, épaisse et tortueuse comme un ver, battre sous la tempe. Soudain, toute la peau de son visage remua, dans une sorte de frémissement souterrain, - comme fait un coup de brise sur un lac ; comme, aux premières bulles, la pellicule de crème durcie à la surface d'un lait qu'on fait bouillir. « IUNE OEUVRE DE CIRCONSTANCE 1) Création et parution de la nouvelle Le Silence de la Mer est intimement lié à la création de la maison d'édition clandestine Les Editions de Minuit. Cette nouvelle, écrite dès1941, devait initialement paraître dans La Pensée libre. Mais cette revue est anéantie définitivement parune perquisition de la Gestapo. Vercors se trouve ainsi sans éditeur ! Il imagine alors de créer avec Pierre de Lescuresa propre maison d'édition dans des conditions qui la rendraient moins vulnérable (pouren savoir plus, consultez la page consacrée aux Editions de Minuit). Cette maison d'édition se veut résolumentun acte de Résistance littéraire et intellectuelle comme s'en explique l'écrivain dans La Bataille du Silence : « la naissance, l'existence et la réalité pratique d'une telle maison avec son mouvement de pensée, ne serait-ce pas pour l'étranger la preuve de la survivance sous la botte nazie de la vie spirituelle française ? «. Le Silence de la Mersort donc le 20 février 1942 dans la clandestinité, sousun nom d'emprunt qui restera mystérieux tout au long de la guerre et qui projettera son auteur dansune nouvelle carrière Du dessinateur-graveur Jean Bruller à l'écrivain Vercors. Vercors a longtemps cherchéun titre à sa nouvelle ; il se décideenfin pourune image symbolique que le courageux éditeur Oudeville- qui s'est lancé dans cette aventure périlleuse- ne comprend pas : « Moi je dirais plutôt le silence de la nièce «. C'est pourquoi Vercors ajoutera à la fin du récitun commentaire plus explicite : « sous la tranquillité trompeuse de la surface des eaux, [se cache] la mêlée incessante et cruelle des bêtes dans les profondeurs «. Ce récit se présente commeune métaphore de la condition de l'homme face à la guerre qui lui interdit la liberté. Le Silence de la Mer est précédé d'une dédicace : A la Mémoire de Saint Pol Roux, Poète assassiné.En effet, pendant l'été 1940 à Camaret, des Allemandsenvahissent le manoir de cet inspirateur des Surréalistes ; ils abattent la gouvernante, violent sa fille Divine et blessent mortellement « ce vieux chantre de l'amour humain «. Ce meurtre apparaît commeun symbole supplémentaire de la barbarie nazie. La nouvelle est courte, ce qui meten exergue la richesse d'une parole concise au pouvoir de suggestion intensifié. Vercors semble avoir choisiune forme littéraire relativement dépouillée pour s'opposer à l'inflation verbale de la Propagande. Ce choix a également des causes plus matérielles à cause du danger de la diffusion clandestine et de la carence du papier. 2) Le réel, source d'inspiration Vercors puise son inspiration dans son propre vécu tant pour les lieux que pour le sujet et les personnages principaux comme secondaires. L'écrivain choisit pour cadre de ce drame sa propre maison à Villiers-sur-Morin qu'il a regagnée avec sa famille au cours de l'été 1940. Ainsi le décor est l'exacte réplique de sa demeure qui abrite le sombre huis-closentre l'oncle, la nièce et l'officier allemand Werner von Ebrennac. Dès l'incipit, le lecteur apprend que la grange attenante à la maison sert d'atelier à l'oncle. Or, dans La Bataille du Silence, Vercors insiste souvent sur son goût pour le travail du bois qui l'a conduit à construire plusieurs meubles,un clapier et même son bateau Paludes,. C'est d'ailleurs, ne l'oublions pas, ce talent qui lui a permis d'être pourun temps menuisier dans son village afin de gagner modestement sa vieentre l'automne 1940 et l'été 1941. De même, l'officier devait au préalable habiter non dans cette maison, mais dans le château du village qui se si ue « un peu plus haut sur le coteau «. Dans le village de Villiers- sur-Morin, ce château existe bel et bien :un Allemand, au cours de l'été1941,entre dans le jardin de la famille Brulleren se croyant arrivé au château ; et plus tard,un autre Allemand, qui servira de modèle pour les traits caractéristiques de Werner von Ebrennac, fait la même erreur que le premier et s'exclame comme l'officier du Silence de la Mer : « Ici c'estun beaucoup plus beau château «. La maison de l'oncle est donc comme le lieu fixe du théâtre où vont se tend...

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