Le tsar Alexandre ler donne un roi à la France
Publié le 30/08/2013
Extrait du document
Les cosaques campaient dans le ruisseau ; ils couchaient dans la boue entre leurs grandes lances et leurs petits chevaux à poils touffus. Ils avaient un profond respect pour Paris qui était pour eux une ville sainte, ils paraissaient presque honteux d'y être « raconte Victor Hugo dans ses souvenirs d'enfance. Le prince de Talleyrand, chez qui loge Alexandre lef, s'em¬ploie à écarter une régence de Marie-Louise et à convaincre les Alliés du bien-fondé du retour des Bour¬bons. A l'Opéra, il organise une représentation de La Ves¬tale pour fêter le tsar. Les dames arborent des cocardes blanches et poussent des cris de joie. Le comédien Lays récite un compliment ampou¬lé, dédié au maître de toutes les Russies : « Vive Alexan¬dre 1 Vive le roi des rois !
«
PETITE REVANCHE
DIPLOMATIQUE
Alexandre 1"' de Russie
trouve un
an plus tard, en
1815, une bonne occasion de
se venger de la morgue avec
laquelle l'a traité Louis XVIII
à Compiègne.
Au moment
des Cent Jours, comme
les alliés européens
monarchistes se mobilisent à nouveau pour chasser
Napoléon de France, la
situation
de Louis XVIII est
devenue plus précaire.
Face
aux troubles et aux menaces
de guerre civile dans le royaume, il doit composer
avec le tsar et avec les autres
puissances, afin de s'assurer
leur soutien.
Le retour d'Alexandre t•• à Paris n'est
plus une visite amicale, mais
une préparation du second
traité de Paris qui limite les
prétentions françaises à
l'étranger et s'assure une
certaine mainmise sur les
affaires intérieures.
Le tsar,
de même que l'empereur
d'Autriche et le roi de Prusse,
fait
clairement comprendre
à Louis XVIII qu'il est son
obligé.
Celui~ci, avec son art
éprouvé du compromis,
donne alors sans sourciller du « Votre Majesté » à Alexandre t•• ....
·
Les cosaques sur
les Champs
...
Éiysées
Les Parisiens, maintenant
sûrs des bonnes intentions
du tsar, assistent à « l'inva
sion » russe avec amusement,
en bons badauds qu'ils sont.
« Quel moment ! » s'excla
ment les témoins.
Cosaques
barbus vêtus de peaux de
bêtes empruntant les grands
boulevards et construisant
leurs huttes sur les Champs
Élysées, chevaux d'Ukraine
foulant les pavés parisiens
parsemés de feuillages en
signe de bienvenue, le spec
tacle est étonnant.
Paris
grouille de Russes, d'Alle
mands et aussi d'Asiatiques,
Kalmouks, Tartares,
Sibé
riens.
En ce soir du 31 mars
1814, la ville ressemble à un
vaste caravansérail qui fasci
ne la foule.
« Les cosaques
campaient dans le ruisseau ;
ils couchaient
dans la boue
entre leurs grandes lances et
leurs petits chevaux à poils
touffus.
Ils avaient un profond
respect pour Paris qui était
pour eux une ville sainte, ils
paraissaient presque honteux 2 d'y être » raconte Victor Hugo Jl
dans ses souvenirs d'enfance.
z
Le prince de Talleyrand, chez ~
qui loge Alexandre t••, s'em- ]
ploie à écarter une régence a.
de Marie-Louise et à
convaincre
les Alliés du bien
fondé du retour des Bour
bons.
A l'Opéra, il organise
une représentation de La Ves
tale pour fêter le tsar.
Les
dames arborent des cocardes
blanches et poussent des cris
de joie.
Le comédien Lays
récite un
compliment ampou
lé, dédié au maître de toutes
les Russies : « Vive Alexan
dre ! Vive le roi des rois ! De
nous
rendre un Bourbon ! »
Le lendemain, 1 •• avril, le
Sénat- qui a été mis en place
par Napoléon -constitue un
nouveau
gouvernement pro
visoire présidé par Talley
rand.
Le 3.
avril, l'empereur
est déclaré déchu.
Le 6 avril,
Napoléon abdique et le
peuple français, par l'inter
médiaire des sénateurs,
appelle « librement au trône
Louis-Stanislas-Xavier, frère
du dernier roi ».
Louis XVIII,
lui, s'apprête à revenir de son
exil
en Angleterre.
La rencontre de
Compiègne
C'est ensuite au château de
Compiègne que le tsar se
rend pour conférer avec Louis
XVlll, arrivé là le 29 avril.
La
rencontre ne se passe pas
comme l'aurait souhaité l'em
pereur de Russie.
Il s'attendait
à être respectueusement
remercié pour avoir rendu la
couronne aux Bourbons, à
être
accueilli en sauveur de la
dynastie.
Mais Louis
XVIII, à
cinquante-huit ans,
après des
années .,d'exil et d'attente,
entend bien monter sur le
trône sans avoir besoin
de se
répandre en hommages.
Il
reçoit Alexandre 1"' avec une
gentillesse qui frise parfois la
condescendance.
Lors
du souper de cérémonie,
Louis
XVIII commet un faux
pas irréparable.
Précédant ·
l'empereur russe sans l'at
tendre, il gagne la salle-à- ·
manger, obligeant le tsar à le
suivre.
Cela se gâte encore à
table.
Louis
XVIII, royal, s'as
soit sur l'unique fauteuil.
Et
ordonne d'être servi le pre
mier.
Alexandre 1"' parvient à
contenir
sa colère devant une
telle offense jusqu'à la
fin ·du
repas.
Mais sitôt sorti de
table, il demande sa voiture et
rentre à Paris, en rage et mor
tellement vexé..
»
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