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Les circonstances de la rupture sino-soviétique

Publié le 17/01/2022

Extrait du document



« La politique est un Jeu et Mao Tsé-toung l'a joué avec la ruse des Asiatiques. (...) Ainsi, je l'entends encore déclarer à l'issue du XXe Congrès : « Le camarade Khrouchtchev nous a ouvert les yeux et il nous a apporté une lumière qui nous permet de voir, il nous a dit enfin la vérité. (...)

Mao Tsé-toung s'est toujours appuyé sur les paysans et non sur le prolétariat. Staline reprochait justement à

Mao son déviationnisme. Mais le fait est que Mao, en s'appuyant sur les paysans et en ignorant le prolétariat, remporta la

victoire (...).

Après l'arrivée de Mao au pouvoir, ses relations avec Staline se tendirent très vite dans les domaines de la coopération commerciale et industrielle aussi bien qu'au niveau idéologique. Malgré nos propres difficultés, nous avions donné gratuitement Port-Arthur et Dalny w aux Chinois et nous avions investi en Chine des sommes considérables.

Certaines déclarations de Mao me choquaient. (...) Je me souviens par exemple qu'il me demanda un jour : « Camarade Khrouchtchev, que pensez-vous de notre slogan Laissons fleurir cent fleurs ? Nous avions fait exprès de ne rien publier dans notre presse au sujet de ces cent fleurs. Mao n'était pas idiot : il avait compris que notre silence signifiait notre désaccord. Puis ii y eut un autre slogan fameux de Mao Tse-Toung : « L'impérialisme est un tigre de papier. « Je trouvais absolument incroyable que Mao pût sous-estimer en le traitant de tigre de papier cet impérialisme américain qui était en réalité un redoutable mangeur d'hommes (...).

Mais notre rupture avec la Chine allait encore s'aggraver. (...) Quand Mao proclama que la Chine pouvait rattraper l'Amérique en cinq ans, il le fit en nous attaquant ouvertement. C'est à peu près à ce moment qu'il mit sur pied ses communes et entreprit la construction de ses hauts fourneaux du genre samovar. A l'instigation de Mao, les chinois commencèrent à affirmer que la distribution de biens matériels en rapport avec la quantité et la qualité du travail fourni telle que la prônaient les Soviétiques était un principe bourgeois. Mao déclarait aussi que la coexistence pacifique était un concept pacifiste bourgeois. (...) Son chauvinisme et son arrogance me faisaient froid dans le dos. Par la suite, la presse chinoise, inspirée par Mao, se mit à proclamer que Vladivostok était en territoire chinois... «

Extraits des Souvenirs de N. Khrouchtchev (2) Édition américaine : 1970 Édition française (R. Laffont) : 1971 (pp. 439-449)

Questions

Le candidat fera un commentaire librement composé du document ou bien répondra aux questions suivantes.

1. Présentez rapidement le document et son auteur. A quelle époque se situe la rupture sino-soviétique ?

2. Expliquez les propos soulignés dans le texte (en précisant le contenu historique des faits auxquels Khrouchtchev fait allusion).

3. Étudiez, en les regroupant et en les classant, les éléments du désaccord sino-soviétique qui apparaissent dans le texte ; en existe-t-il d'autres ?

4. Analysez la manière dont Khrouchtchev présente les circonstances de la rupture. Mao présenterait-il cette rupture de la même façon ?

5. Quelles furent les conséquences de la rupture, notamment pour la Chine, pour le mouvement communiste et pour les relations internationales ?

« personnalité impulsive, et même brouillonne, de Khrouchtchev, qu'on a généralement accepté de le considérercomme authentique. Le récit de la rupture sino-soviétique relatée dans ce passage correspond en tout cas à la version des faits tellequ'elle a toujours été présentée du côté soviétique.

Khrouchtchev y confirme, ce que l'on pressentait déjà enOccident, que les rapports entre Staline et Mao avaient toujours été marqués par la méfiance.

Il montre égalementcomment les divergences idéologiques des deux partis ont fini par déboucher sur les conflits entre les Etats. UNE VIEILLE MÉFIANCE RÉCIPROQUE Officiellement, le camp communiste a toujours affiché son unité.

Une référence commune à une idéologie, lemarxisme-léninisme, qui s'affirme « scientifique », l'impose.

A l'intérieur du camp l'URSS s'est toujours posée commele « grand frère » : la première elle a accompli la révolution socialiste ; c'est elle qui, sous l'égide de Staline, atrouvé les voies de « l'édification du socialisme » ; enfin, après sa victoire de 1945, sa nouvelle puissance militaireest seule capable de protéger les autres pays du camp socialiste des visées, définies comme agressives, du campimpérialiste dirigé par les États-Unis.

La plus expérimentée, la plus puissante, la Russie stalinienne est doncjusqu'alors reconnue par tous les partis et pays communistes comme le guide commun.

L'alignement sur l'URSS et lacopie fidèle de son modèle économique sont considérés comme les conditions, sine qua non, d'une « orthodoxie »idéologique.

Hors de la voie soviétique, point de salut socialiste. Pourtant, même si elles sont feutrées, les différences et les divergences entre Soviétiques et Chinois frappent,depuis longtemps, les observateurs les plus avertis. 1-Les conditions originales de la révolution chinoise Une révolution paysanne.

En URSS, selon le schéma marxiste, c'est le prolétariat ouvrier, investi d'une missionhistorique, qui, dirigé par son « avant-garde éclairée », le parti communiste, a conduit la révolution prolétarienne.

EnChine, le processus fut fondamentalement différent.

Autour de 1930, après l'échec des tentatives insurrectionnellescommunistes menées, dans les villes, selon le schéma bolchevik, par le prolétariat chinois et brutalement écraséespar les forces nationalistes du Guo Min Dang de Jiang Jieski (Tchang Kaï Chek), Mao ZeDong crée, dans lescampagnes, des « républiques soviétiques » rurales. La longue marche, la lutte contre les Japonais puis la victoire des forces de Mao, en 1949, confirment cetteorientation originale.

En effet, les forces de Mao sont avant tout constituées par des paysans séduits par lesréformes agraires que Mao entreprend immédiatement dans les zones qu'il contrôle.

Sa stratégie, « encercler lesvilles par les campagnes », est l'exacte antithèse de l'histoire de la révolution soviétique, essentiellement urbaine.2.

L'ambiguïté des relations Mao-Staline Durant toute la période révolutionnaire, c'est-à-dire pendant près de vingt ans, l'aide de la Russie soviétique auxrévolutionnaires chinois fut pour le moins prudente et mesurée, voire ambiguë.

Un certain nombre d'éléments permetde le penser. - L'aide matérielle de l'URSS à l'armée populaire réfugiée dans le Yennan après la longue marche fut toujours réduite. - L'URSS n'aida pas davantage la Chine dans sa lutte contre le Japon et elle n'intervint militairement en Asie qu'enaoût 1945.

Il est vrai que, depuis la signature du pacte anti-Komintern, en 1936, elle avait à craindre d'être lavictime d'une attaque conjuguée de l'Allemagne et du Japon.

Il n'en reste pas moins vrai que, du point de vuechinois, l'URSS s'est servie de la Chine comme d'un paravent. - En 1945, après la victoire, l'URSS reconnut officiellement le gouvernement de Jiang Jieshi comme le gouvernementlégal de la Chine.

Elle pressa les communistes chinois d'accepter d'entrer dans un gouvernement de coalition avecles nationalistes. - En revanche, après leur entrée en guerre contre le Japon, l'irruption des troupes soviétiques en Mandchouriefavorisa les communistes de Mao, l'URSS leur laissant, le plus souvent, récupérer les armes déposées par lesJaponais après leur capitulation. 3.

L'aide soviétique Après la victoire de Mao, l'URSS, comme le dit Khrouchtchev, fit preuve de « générosité ». - Elle rendit à la Chine des bases comme Port-Arthur et Dairen, situées au Sud de la Manchourie, et que les Russesavaient toujours convoitées en raison de leur intérêt stratégique majeur dans la mer Jaune. - Techniciens et aide matérielle soviétiques furent accordés à la Chine pour lui permettre de reconstruire le pays etd'édifier une puissante industrie lourde, notamment en Mandchourie.. »

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