Les mémoires de la seconde guerre mondiale
Publié le 10/06/2013
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La stratégie unitaire est conservée sous la IVe République : les lois d’amnistie de 1951 et
1953 protègent les fonctionnaires vichystes.
Le renvoi des ministres communistes le 5 mai 1947,
après l’adhésion du PCF au Kominform, marginalise encore la mémoire communiste, alors que la
décolonisation de l’Indochine et la guerre froide naissante imposent l’unité nationale.
Le péril
communiste consacre la victoire de la mémoire gaulliste.
La présidence de de Gaulle apparaît comme l’apogée du résistancialisme .
Revenu en 1958, il
maintient sa lecture du conflit : le transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon (1964)
sacralise davantage la résistance héroïque.
Révoqué par Vichy, rallié à de Gaulle, artisan de la
jonction des résistances, mort sous la torture sans parler, il devient le martyr de la mémoire
gaulliste.
Aucune opinion contraire ne peut être formulée : en 1958, la censure s’abat sur Nuit et brouillard
d’Alain Resnais qui doit retirer de son film la présence d’un gendarme aux ordres de Vichy…
3.
Cette querelle ne saurait faire oublier l’existence d’une autre mémoire, revendicative,
celle des pétainistes
Elle s’organise dès 1945, incarnée dans la personne même de Pétain au moment de son
procès.
Son avocat, maître Isorni, défend la thèse du « bouclier » et du « double jeu » : Pétain
se justifie en expliquant qu’il voulait servir de « paratonnerre » au pays.
La collaboration aurait
été un moyen de préserver la France jusqu’à ce que de Gaulle organise la résistance à
l’extérieur.
Condamné à mort, sa peine est commuée en prison à vie : une association de
défense se crée, l’ADMP , servie par une maison d’édition (Nouvelles éditions latines) et une
presse engagée (Rivarol).
Elle organise des pèlerinages sur l’île d’Yeu où le maréchal est
détenu.
En 1951, les candidats affiliés à cette mémoire rassemblent encore 10 % des voix.
II.
S’opère alors un retour des mémoires refoulées, de plus en plus nombreuses et
émiettées, grâce au cinéma et au travail des historiens (1969-années 1980)
1.
Tout d’abord, la télévision et le cinéma sensibilisent un plus large public à ces
mémoires ; ils contribuent à leur prolifération
En 1971, Le Chagrin et la Pitié de Marcel Ophüls passe dans toutes les salles d’art et d’essai et
démythifie l’unité de la France résistante ; la télévision refuse de le diffuser jusqu’en 1981, où
il attire, sur FR3, 15 millions de téléspectateurs.
Beaucoup découvrent alors le choix fait par
certains Français de revêtir l’uniforme nazi.
Le choix entre résistance et collaboration n’allait donc pas de soi : d’autres films rappellent
cette ambiguïté.
Lacombe Lucien (L.
Malle, 1974) raconte le destin tragique d’un jeune homme
que le hasard fait milicien.
Au revoir les enfants (L.
Malle, 1987) relate le destin de jeunes enfants
juifs chassés de l’école de la République.
Uranus (C.
Berri, 1990) critique les communistes à la
Libération.
Enfin, le Pétain de Marbœuf (1993) passe au crible tout le système de Vichy.
Lanzmann, quant à lui, choisit le documentaire pour aborder ce thème, avec Shoah en 1967.
D’autres préfèrent la dérision, pour pointer les failles de la Résistance, comme J.
M.
Poiré dans
Papy fait de la résistance (1983).
2.
Par ailleurs, les historiens portent un regard critique sur ces mémoires concurrentes et
dénoncent leurs incohérences
En 1973, R.
Paxton publie La France de Vichy et met l’accent sur le rôle primordial de Vichy
dans la politique antisémite .
Il révèle que l’État français est à l’origine de la collaboration avec
l’Allemagne.
À sa suite, de nombreuses vocations d’historiens vont naître (un tiers des thèses
enregistrées en 1978).
En 1990, H.
Rousso revient sur Le Syndrome de Vichy : il explique comment la France a été
victime d’une sorte de refoulement de la mémoire, avant que celle-ci ne ressurgisse et ne vole en
éclats vers 1970.
Depuis, nous serions plongés dans une obsession de ce passé et de la
repentance ..
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