Les ouvriers de Pharaon en grève

« Ils bénéficiaient de nombreux jours de congés et recevaient un salaire et un approvision­ nement en denrées alimen­ taires qui leur permettaient de vivre correctement.

En fait, aussi longtemps que cet approvisionnement fut assu­ ré, les ouvriers de Deir el-Me­ dineh n'eurent pas trop à se plaindre.

Mais, sous les Ra­ messides, l'Égypte traversa une grave crise économique provoquée par les boulever­ sements profonds que subit à l'époque le monde méditer­ ranéen.

Elle perdit son statut de centre économique et cul­ turel, et la corruption généra­ lisée fit le reste.

Bientôt, l'ap­ provisionnement des fonc- tionnaires devint de plus en plus difficile et, dans les dernières années du règne de Ramsès Ill, la Tombe en souffrit particulièrement.

En témoigne cette communica ­ tion du scribe Néferhotep au vizir Ta : « Je travaille très bien ( ...

).

Que mon maître ne se fasse pas de souci à leur su­ jet [les tombes des enfants royaux)].

Mais nous sommes dans un extrême dénuement.

On nous a laissé en carence de toute denrée qui provient de la maison blanche, qui provient du grenier, qui pro­ vient de la réserve.

[Pourtant] ce n'est pas léger un charge­ ment de pierre ! ( ...

) Mon maître devra nous procurer un moyen de subsistance.

Car nous sommes déjà en train de mourir, nous ne sommes plus vivants.

On ne nous l'assure [la subsistance] plus d'aucune manière que ce soit .

» (Tra- duction de Pascal Vernus, Af­ faires et Scandales sous les Ramsès, 1993, Pygmalion.) Les premières grèves L a situation était donc plus que préoccupante.

Pour­ tant, la lettre n'eut pas les suites escomptées, si tant est qu'elle en eut.

Lassés, les arti­ sans de Deir el-Medineh se révoltèrent à juste titre : ni les rations du mois précédent ni celles du mois en cours ne leur avaient été livrées.

Plu­ sieurs documents administra­ tifs, dont le fameux Turin Stri­ ke Papyrus, permettent de suivre le conflit dans ses gran­ des lignes .

Les premières pro­ testations s'élevèrent, d'abord timidement, le dernier jour d'une décade. »