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Paris, ville des révolutions

Publié le 18/03/2020

Extrait du document

[...] Dans le chaos de sentiments et de passions qui défendent une barricade, il y a de tout ; il y a de la bravoure, de la jeunesse, du point d’honneur, de l’enthousiasme, de l’idéal, de la conviction, de l’acharnement de joueur, et, surtout, des intermittences d’espoir. »

« Rien n’est plus extraordinaire que le premier fourmillement d’une émeute. Tout éclate partout à la fois. Était-ce prévu ? Était-ce préparé ? Non. [...] Rive droite, rive gauche, sur les quais, sur les boulevards, dans le quartier latin, dans le quartier des halles, des hommes haletants ouvriers, étudiants, sectionnaires, lisaient des proclamations, criaient : aux armes, brisaient les réverbères, dételaient les voitures, dépavaient les rues, enfonçaient les portes des maisons, déracinaient les arbres, fouillaient les caves, roulaient des tonneaux, entassaient pavés, moellons, meubles, planches, faisaient des barricades. [...] En moins d’une heure, vingt-sept barricades sortirent de terre dans le seul quartier des halles. [...] L’insurrection, brusquement, avait bâti les barricades d’une main et de l’autre saisi presque tous les postes de la garnison. [...] L’insurrection s’était fait du centre de Paris une sorte de citadelle inextricable, tortueuse, colossale. [...] C’est le caractère propre des émeutes de Paris. »

Victor Hugo, Les Misérables, extraits des chapitres « La Charybde du faubourg Saint-Antoine et la Scyila du faubourg Saint-Antoine » et « Les bouillonnements d’autrefois ». 1862.

► Après avoir montré que l’image de l’insurrection de 1848 donnée par Victor Hugo s’applique à d’autres soulèvements parisiens, expliquez comment le souvenir de ces révoltes reste inscrit dans les monuments ou la mémoire de la ville.

■ Lire la consigne

Deux tâches sont à accomplir. Dans un premier temps, il faut s’appuyer sur le texte de Victor Hugo pour en extraire les caractères qu’il attribue à l’insurrection de 1848 et les relier à d’autres exemples. Ainsi, la * jeunesse * des « étudiants * peut être rapprochée des événements de mai 1968 ou « l’acharnement » des « ouvriers » à ceux de 1871.

« DOCUMENT 2 Les barricades de Paris en 1848 « Les deux plus mémorables barricades[ ...

] sortirent de terre dans [ ...

] l'insurrection de juin 1848 [qui fut] la plus grande guerre des rues qu'ait vue l'histoire.

[ ...

] L'une encombrait l'entrée du faubourg Saint-Antoine; l'autre défendait l'approche du faubourg du Temple; ceux devant qui se sont dressés, sous l'éclatant ciel bleu de juin, ces deux effrayants chefs-d' œuvre de la guerre civile, ne les oublieront jamais.

La barricade Saint-Antoine était monstrueuse[ ...

].

De quoi était faite cette barricade ? De l'écroulement de trois maisons à six étages, démolies exprès, disaient les uns.

Du prodige de toutes les colères, disaient les autres.

Elle avait l'aspect lamentable de toutes les constructions de la haine : la ruine.

On pouvait dire : "Qui a bâti cela ?".

On pouvait dire aussi : "Qui a détruit cela ?".

C'était l'improvisation du bouillonnement.

Tiens ! cette pone ! cette grille ! cet auvent ! ce chambranle ! ce réchaud brisé ! cette marmite fêlée ! Donnez tout ! jetez tout ! poussez, roulez, piochez, démantelez, bou­ leversez, écroulez tout ! C'était la collaboration du pavé, du moellon, de la poutre, de la barre de fer, du chiffon, du carreau défoncé, de la chaise dépaillée, du trognon de chou, de la loque, de la guenille, et de la malédiction.

C'était grand et c'était petit.

C'était l'abîme parodié sur place par le tohu-bohu.

La masse près de l'atome ; le pan de mur arraché et l'échelle cassée : une fraternisation menaçante de tous les débris : Sisyphe 1 avait jeté là son rocher et Job 2 son tesson.

En somme, terrible.

C'était l'acropolc3 des va-nu-pieds.

[ ...

] Si l'océan faisait des digues, c'est ainsi qu'il les bâtirait.

La furie du flot était empreinte sur cet encombrement difforme.

Quel flot ? la foule.

On croyait voir du vacarme pétrifié.

On croyait entendre bourdonner, au-dessus de cette barricade, comme si elles eussent été là sur leur ruche, les énormes abeilles ténébreuses du progrès violent.

Était-ce une broussaille? était­ ce une bacchanale? était-ce une foneresse? Il y avait du cloaque dans cette redoute et quelque chose d'olympien dans ce fouillis.

On y voyait dans un pêle-mêle plein de désespoir, des chevrons de toit, des mor­ ceaux de mansardes avec leur papier peint, des châssis de fenêtre avec toutes leurs vitres plantés dans les décombres, attendant le canon, des cheminées descellées, des armoires, des tables, des bancs, un sens des­ sus dessous hurlant, et ces mille choses indigentes, rebuts même du mendiant, qui contiennent à la fois de la fureur et du néant.

On eût dit que c'était là le haillon d'un peuple, haillon de bois, de fer, de bronze, de pierre, et que le faubourg de Saint-Antoine l'avait poussé là à sa pone d'un colossal coup de balai, faisant de sa misère sa barricade.. »

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