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Paul-Henri Spaak

Publié le 22/02/2012

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Nous ne pensons plus que les existences et les oeuvres des hommes s'expliquent entièrement à partir de leurs origines, nationales, sociales et culturelles. La personnalité n'est pas le produit des influences qui contribuèrent à la former. Pourtant, les facteurs du milieu expliquent bien des comportements. En appliquant ces considérations à Paul-Henri Spaak, on peut conclure qu'il fut bien le fils d'un siècle, d'une classe, d'un pays particuliers. Spaak naquit le 22 janvier 1899 dans une famille où les événements du jour étaient commentés à table. Sa formation politique initiale, il la reçut de ses parents, qui appartenaient à la grande bourgeoisie intellectuelle de Bruxelles. Des deux côtés, maternel et paternel, la convergence politique était frappante : les Janson comme les Spaak se plaçaient dans la tradition de l'humanisme " éclairé " qui, pendant longtemps, anima aussi le socialisme. Et ils ne se contentaient pas d'idées abstraites : Mme Spaak, notamment, eut une activité militante sérieuse, et elle siégeait au Sénat lorsque son fils fit ses premières armes comme membre d'un gouvernement. Rien de moins prolétarien que ce milieu-là, mais on y trouvait une adhésion solide aux valeurs morales de la gauche. Spaak, lui, se sentait bien dans la ligne familiale en étant matériellement désintéressé, vivant sans ascétisme mais sans luxe ostentatoire, profondément attaché à son idéal d'équité. Là, se trouvaient les sources de son inspiration socialiste. Mais à travers les luttes politiques, il ne cessa jamais d'être un Libéral, ne détestant rien autant que les régimes qui, sous quelque idéologie que ce soit, voudraient brimer les libertés individuelles.

« souffle de jeunesse.

"C'est à la fin d'un après-midi de printemps, en 1936, que l'aventure a commencé" voilà lapremière phrase de ses Mémoires, Combats inachevés.

Or, en cette année de disgrâce, l'horizon européens'assombrissait de plus en plus.

Sans doute, la crise économique semblait tirer à sa fin, mais le public gardait lesouvenir de l'incapacité économique des gouvernements démocratiques, alors qu'en luttant contre le chômage, Hitleravait pu remporter des succès spectaculaires.

Le public était désorienté. Dans une Europe où les démocraties ont mauvaise conscience, alors que les dictateurs exultent, quelle va êtrel'attitude d'un petit pays comme la Belgique ? La réponse de Spaak est nette : ce sera une politiqued'indépendance.

L'intérêt principal, selon lui, était de prévenir la guerre et, si elle devait éclater, de garder le paysen dehors.

Enfin, si la catastrophe était inévitable, il fallait pouvoir dire que la neutralité belge avait toujours étéirréprochable.

Seulement, dans un conflit où leurs frontières auraient été violées, les Belges se battraient avecconviction.

Ici, le pacifisme du socialiste se confondait avec le pragmatisme de l'homme d'État responsable d'unpeuple qui l'avenir devait le confirmer n'avait pas de réflexes unanimes. Sans doute, ce pacifisme eut des échos dans l'opinion du Parti Ouvrier, surtout en Flandre.

Mais la majorité desWallons resta attachée à l'amitié française.

De plus, l'antifascisme semblait incompatible avec la neutralité.

Enfin,Spaak ne se faisait-il pas des illusions, en pensant que l'expansionnisme hitlérien pouvait être endigué sans guerre ?Pouvait-il espérer que la Belgique aurait une chance de rester en dehors du cyclone ? Son opportunisme fut taxé delâcheté.

Mais, personnellement, il a cru à sa politique.

C'est ce qui explique son indignation envers l'ambassadeurd'Allemagne quand celui-ci vint lui apporter, le 10 mai 1940, la déclaration de guerre : "Moi d'abord, Monsieurl'Ambassadeur !"..., après quoi il lui lut une déclaration où il n'y avait pas un mot de trop. Il fallait se battre.

Sur le sol belge, on ne se battit pas longtemps.

En quelques semaines l'armée se trouva acculéeà la capitulation.

C'est alors qu'éclata le conflit avec le roi Léopold III.

Fallait-il continuer la résistance ? Déposer lesarmes, n'était-ce pas trahir les Alliés ? On peut se demander si la question n'était pas mal posée de cette manière.Militairement, les dés étaient jetés.

Mais il s'agissait de savoir si l'État belge resterait dans la guerre, même si sonarmée était battue.

Or, à cet égard, la position de Spaak fut moins nette qu'on aurait pu le croire.

Francophone, ilattendait tout de la France.

Étranger à la culture anglo-saxonne, il n'apercevait pas que la Grande-Bretagne tenaitla clef du problème alors que la France chancelait déjà.

Il partit donc pour l'Angleterre, mais revint ensuite sur lecontinent et, presque en désespoir de cause, finit par rallier Londres. Pourtant, cette phase londonienne a été décisive pour son orientation ultérieure.

C'est là qu'il découvrit la nécessitéde l'union européenne et qu'il jeta les bases de ce qui allait devenir le Bénélux.

Il y a consacré un chapitre, bref maissignificatif, de ses Mémoires.

Voici une phrase, dans une note destinée au Foreign Office, qui apparaît sous saplume, dès 1941 : "Ce qui se passe en Europe depuis vingt mois prouve qu'il est indispensable que les pays d'Europes'unissent." En un certain sens, l'idée européenne était dans l'air, Churchill y croyait à sa manière, bien qu'il n'eûtjamais considéré que le Royaume-Uni puisse faire partie d'un ensemble continental et que ses conceptions soientrestées vagues.

Pourtant, il encouragea les gouvernements en exil à se consulter sur leurs projets d'avenir.

En fait,il n'y en eut aucun, et quelques rencontres épisodiques s'enlisèrent rapidement.

Danois et Norvégiens préféraient nepas se lancer dans des plans dont la Suède devait rester absente.

La France libre vivait dans un rêve derestauration nationale qui ne laissait place à aucun schéma fédératif.

Seules les trois puissances du delta offraientune possibilité concrète et, en effet, sous l'impulsion de Spaak, un traité fut signé à Londres en 1943. Le retour des "Londoniens" fut tout, sauf triomphal.

Le gouvernement se sentait mal compris par une population quiavait d'autres soucis.

La Résistance belge n'avait pas trouvé, en Angleterre, une figure comparable à celle que lareine Wilhelmine avait constituée pour les Néerlandais.

La Belgique était troublée par la question royale à laquellenous avons déjà fait allusion.

Spaak, contre son gré, y joua un grand rôle.

De part et d'autre, les motifs étaientdivers.

A gauche, un certain anarchisme instinctif et le malaise d'une société mal remise de ses chocs se mêlèrent àl'indignation éprouvée par d'anciens résistants, déçus par l'attitude ambiguë de Léopold III.

A droite, on oublia tropque la vocation d'une monarchie constitutionnelle consiste à faire l'unanimité autour d'elle et à ne pas jouer le jeudes majorités partisanes.

Pendant quelques semaines, en 1950, il put paraître que le pays allait éclater : Flamandsroyalistes contre Wallons et Bruxellois qui rejetaient le roi discuté.

Mais au bord même du précipice, lorsque le sangeut coulé, les Belges s'arrêtèrent.

L'abdication royale n'enthousiasma personne, mais arrêta net la course à l'abîme. Spaak ne fut pas seul, parmi les protagonistes de ce combat, à pousser un soupir de soulagement.

Il mesurait lesdégâts.

Cette crise intérieure avait rompu l'alliance entre Socialistes et Démocrates-chrétiens qu'il considéraitcomme la clef d'une bonne gestion politique.

Éloigné du pouvoir, il se morfondit dans l'opposition jusqu'en 1954,quand il reprit les Affaires étrangères.

Durant cette "traversée du désert" il devint président du Mouvementeuropéen et cette fonction lui permit de ne pas perdre de vue les problèmes internationaux.

Deux préoccupationsdominaient : l'anticommunisme et l'impératif européen. Dans ce premier domaine, un discours de lui fait époque : celui qu'il prononça le 25 septembre 1948 à cetteAssemblée générale des Nations unies que, naguère, il avait présidée avec souplesse.

Discours incendiaire ? Il peutle paraître aujourd'hui que les mots de "détente" et de "coexistence pacifique" sont sur toutes les lèvres.

Mais ilcorrespondait à l'atmosphère d'alors.

L'URSS avait été la seule puissance à avoir annexé des territoiresconsidérables.

En plus, elle avait organisé un glacis de pays à ses frontières occidentales, en y régnant parpersonnes interposées.

Enfin, elle ne cachait pas ses intentions impériales et, le 25 septembre 1948, sonreprésentant Vychinsky avait prononcé une diatribe anti-occidentale d'une violence rare.

Spaak lui répondit et il estmonté, ce jour-là, à l'un des sommets de sa carrière.

Non seulement ses collègues européens l'acclamèrent, mais le. »

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