Devoir de Philosophie

A.Camus:"l'héroïsme est peu de chose, le bonheur est plus difficile." ?

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

camus

C'est en fait comme expérience existentielle que l'héroïsme est « peu de chose «, il est beaucoup d'un point de vue politique ou humaniste (d'un point de vue abstrait quant à l'existence), mais « peu de chose « pour soi.             Camus est en fait tout à fait conséquent quant au sens même de l'héroïsme : l'héroïsme paraît difficile d'un point de vue extérieur, mais pour celui qui l'incarne en première personne on peut dire qu'en quelque sorte cela va de soi puisque précisément choisir de commettre un acte héroïque c'est se mettre au service de quelque chose de plus important que soi. Dès lors se sacrifier ce n'est que « peu de chose « puisque ce que le héros sacrifie ce n'est plus qu'un moyen, en l'occurrence lui-même. Une fois que l'homme fait le choix de subordonner sa propre existence au service d'une cause (et le martyre, par distinction, ne fait pas forcément le choix) l'assumer va de soi en tant que précisément le soi est moindre que la fin qu'il sert. III- De la difficulté du bonheur.                    D'un point de vue existentiel le bonheur est « plus difficile « que l'héroïsme, il est plus difficile de faire l'expérience du bonheur que de risquer sa vie, plus difficile de s'épanouir que de mourir. Le bonheur a toujours été un thème problématique pour la pensée mais généralement la difficulté consistait à trouver un moyen d'atteindre ou de conserver le bonheur, or pour Camus c'est le bonheur en soi, une fois acquis, qui fait problème. Le caractère existentiel du problème est souligné par la comparaison avec l'héroïsme : il en va de mon existence, en un sens vital, dans l'épreuve du bonheur.             Camus suggère même que mon existence se joue peut-être davantage dans l'affection du bonheur que dans l'action héroïque ; autrement dit faire l'épreuve de soi même est une affaire essentiellement privé, l'héroïsme s'il repose sur une décision personnelle est aussi une adresse au monde qui m'entoure, au regard d'autrui. En revanche le bonheur n'engage rien de politique, de transcendant ni de symbolique ; dans le bonheur le Je reste seul avec lui-même, ne se dépasse vers aucune signification ni intention, il est ce que Michel Henry nommerait un mode de l'auto-affection.

La phrase de Camus frappe pour deux raisons : tout d’abord parce qu’elle s’offre à nous comme une affirmation paradoxale, en effet selon le sens commun le héros est un être singulier, rare, courageux, et, suivant la même doxa le bonheur ne fait pas problème, il est une simple circonstance dont on ne peut que se réjouir. Or Camus renverse ces représentations en disant en somme qu’il est plus difficile de faire l’expérience du bonheur que d’être un héros. Mais c’est tout autant pour sa forme que pour son contenu que l’assertion de Camus retient notre intention ; sa concision et sa sécheresse tiennent lieu d’une argumentation implicite qu’il nous appartient désormais de faire surgir.

Liens utiles