Analyse de texte juste la fin du monde
Publié le 05/11/2023
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dimanche 4 septembre 2022
Juste la Fin du Monde - Prologue
Introduction
Ecrite entre 1988 et 1990 par le comédien, dramaturge, metteur en
scène Jean-Luc Lagarce, Juste la Fin du Monde expose le retour de
Louis dans sa famille, un dimanche.
Il veut leur annoncer sa mort
prochaine.
Mais l’annonce n’aura pas lieu ; le drame sera en quelques
sortes avorté.
Le texte proposé à l’étude est le prologue de la pièce.
Louis paraît seul sur scène et annonce au public, avant de le faire à sa
famille sa mort prochaine.
(Le prologue est avant tout un discours d'ouverture dans une œuvre littéraire ou
dramatique.
Il vise à présenter, à introduire ou à avertir.
Dans la tragédie antique
(voir La Poétique, Aristote), c'est la première scène, la scène d'exposition.
Elle
précède l'entrée du chœur sur scène.
Au moyen-âge, le prologue était un récitatif en vers ou en prose qui cherchait à
célébrer le personnage principal et ses intentions.)
- Nous verrons en quoi ce prologue est tragique.
- Il peut se décomposer en 3 mouvements : Dans le 1er mouvement
(lignes 1 à 18), Louis révèle sa certitude de mourir prochainement
(« l’année d’après ») ; des lignes 19 à 30, louis expose sa décision de
revenir l’annoncer à sa famille ; dans le troisième mouvement, il en
donne les raisons.
Remarques préliminaires concernant l’ensemble de l’extrait
- Première remarque d'ensemble : sa mise en page rappelle l'écriture poétique.
Ses
fréquents retours à la ligne donnent un rythme au texte, une musicalité fondée sur
de nombreuses répétitions (figures de style majeures) : tradition du récitatif (le
rythme et la mélodie des paroles deviennent musicales).
- Deuxième remarque d'ensemble : Ce récitatif est une longue phrase contenant la
totalité du discours introductif.
Elle enveloppe à la fois ce que le personnage
principal a à dire, et son état d'esprit (hésitations, volontés), ainsi que les modalités
de ce discours révélant cet état d'esprit (doute, certitude, inquiétude...).
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Premier mouvement : sa certitude de mourir
Contradiction
-Plus tard, l’année d’après
-j’allais mourir à mon tour j’ai près de trente-quatre ans maintenant et c’est à cet âge que je mourrai, l’année
d’après,
de nombreux mois déjà que j’attendais à ne rien faire, à tricher,
à ne plus savoir,
de nombreux mois que j’attendais d’en avoir fini,
l’année d’après,
comme on ose bouger parfois,
à peine,
devant un danger extrême, imperceptiblement, sans vouloir faire de bruit
ou commettre un geste trop violent qui réveillerait l’ennemi et vous détruirait
aussitôt,
l’année d’après,
malgré tout,
la peur, prenant ce risque et sans espoir jamais de survivre,
malgré tout,
l’année d’après,
Contradiction entre l’emploi de l’imparfait de l’indicatif et les
compléments circonstanciels de temps (« plus tard », « l’année
d’après »).
Cette contradiction apparaît clairement avec l’expression mise entre
tirets « j’allais mourir à mon tour ».
Le verbe « aller » a ici un sens modal
(futur proche), mais conjugué à l’imparfait, sa modalité devient celle
d’un futur proche dans le passé.
Cette certitude de mourir s’inscrit donc à la fois dans un futur et dans
un passé, dans un passé du futur, ou dans un futur du passé.
Ainsi, le
personnage nous paraît déjà mort.
La certitude de mourir l’a en
quelques sorte déjà tué.
L’importance des répétitions
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L’expression « l’année d’après » est répétée 4 fois.
Cette répétition a
une valeur à la fois poétique et musicale.
Elle s’inscrit dans un travail
rythmique assez complexe, porté par la longueur de la phrase et ses
nombreux décrochages (« à peine », « malgré tout »…)
Elle peut également se comprendre comme l’indice d’une obsession qui
hante le personnage : cette certitude de mourir prochainement.
On remarque l’emploi fréquent de figures de style de répétition :
l’épanorthose : (« à ne rien, faire, à tricher, à ne plus savoir ») et le
polyptote (« mourir », « mourrai »).
- Polyptote (n.m.): figure de répétition.
Reprise d'un terme en lui faisant
subir des variations morphologiques.
- Epanorthose (n.f.) : figure syntaxique de répétition consistant à
reprendre un terme ou une expression pour les rectifier, les corriger,
les préciser, les développer...
Le discours du personnage nous apparaît à la fois précis et hésitant...
c’est une parole qui se cherche…mais qui ne semble pas arriver à dire
ce qu'elle a à dire.
Les compléments du verbe en cascade ("que j’attendais…") révèle un
désir d’attendre, de mettre en suspens sa décision par crainte de trop
souffrir.
A travers la figure de l’épanorthose, Louis tente de cerner et de préciser
son propre discours et les modalités de son annonce prochaine.
Sa portée est ambigüe, puisqu’elle peut à la fois se comprendre comme
l’indice d’un désir d’être précis dans son discours, de trouver le mot
juste, de cerner sa situation avec méthode et application, et en même
temps comme un indice de confusion : ne plus savoir où il en est.
Sa propre mort est évoquée de manière indirecte.
Elle est tout d’abord
un « danger extrême » (l.10).
Une menace qu’il ne faut pas réveiller ;
pour ensuite être personnifiée (« l’ennemi »)
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Cette certitude de mourir s’accompagne donc d’une crainte extrême,
devant laquelle il faut se faire le plus discret possible et un immense
désespoir : attendre d’en avoir fini, « sans espoir jamais de survivre ».
D’emblée le personnage se révèle donc tragique.
Il....
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