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Analyse des deux premiers sonnets des Regrets de Joachim Du Bellay

Publié le 21/09/2011

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bellay

Le travail de création poétique est perçu comme allant de soi, dans une démarche très personnelle. La source de son écriture, c'est lui-même. La création est personnifiée, Du Bellay "échange" avec lui-même dans son processus créatif :  "Je me plains à mes vers, si j'ai quelque regret :  Je me ris avec eux, je leur dis mon secret" (sonnet 1, v.10 et 11)  Les vers 10 et 11 sont inclus dans un jeu de parallélismes propres à la forme du sonnet : ils sont à mettre en parallèle avec les vers 1, 2 et 3 : d'un côté Du Bellay explique ce qu'il reprouve, de l'autre, il prend le temps d'expliquer son projet.

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« à qui il fallait plaire absolument.

Par deux fois, Paschal est cité, dans le second sonnet : à chaque fois en premiervers (v.

1 et v.9): premier vers des quatrains, premier vers du sizain.

De plus, sa position dans le vers est sanséquivoque : entre deux virgules, au milieu de vers.

Du Bellay donne une place toute particulière à ce personnagecapable de faire comme de défaire la réputation des poètes de son temps.

Mais on pourrait aller plus loin et dire quePaschal est finalement plus une représentation, une allégorie du pouvoir décideur des "bons" et "mauvais" poètes.

Cen'est peut-être pas Paschal dont Du Bellay nous parle ici, mais bien plutôt d'une entité générale, par qui est décidéela valeur "majeure" ou "mineure" des différentes formes poétiques.Ainsi, Ronsard est positionné immédiatement en poète "majeur", puisque lui recherche les faveurs du prince et lagloire.

C'est la poétique des récompenses que dénonce ici Du Bellay. Joachim Du Bellay a placé au tout début des Regrets deux sonnets qui tentent de définir son écriture poétique parune série de négations.

Ce sont autant de preuves de son renoncement aux idéaux de la Pléiade.

Cela dit, idéauxqui restent pour lui (ou pour le reste du monde) dominants, idéaux de perfection qu'il ne saurait lui-même atteindre.Il va alors définir sa poétique, un étage au-dessous : une poétique du mineur.

Et cette écriture à réinventer ne peutse définir que négativement par rapport aux formes existantes. … à une poétique mineure Joachim Du Bellay, ayant reconnu les plus hautes illusions de son rêve de jeunesse, il ne peut plus être porté parelles.

A lui maintenant de définir sa poétique.

Des thématiques plus personnelles, des méthodes de travaildifférentes… pour créer une poétique mineure, qu'il doit à présent assumer. Du Bellay refuse désormais les voies du passé.

Le vers d'attaque du premier sonnet est de ce point de vueintéressant, puisque Du Bellay y impose la présence de son "je".

Ses thématiques seront dorénavant pluspersonnelles : "mais suivant de ce lieu les accidents divers, Soit de bien, soit de mal, j'écris à l'aventure" (sonnet 1,v.7 et 8) Après un premier quatrain pompeux et d'une style assez "lourd", le style s'allège.

La lecture est plus fluide.Du Bellay puisera maintenant dans ses expériences personnelles pour son écriture poétique.

Ce vers 8, clausuleprovisoire, met en évidence le tournant que prend Du Bellay, loin de ses amis de la Pléiade.

Le vers 14 lui fera écho :"Que de papiers journaux ou bien de commentaires".

Dans ces "papiers journaux" et "commentaires", Du Bellay pourradonner son jugement privé, sans chercher à apporter un savoir.

C'est une véritable écriture de l'intime qui se met enplace.

En quelques vers, nous serons passés des espaces vertigineux à "ce lieu" (sonnet 1, v.

7), autrement dit savie intime.Sa vie intime, il l'abordera librement.

A la succession rigoureuse des infinitifs succèdent des sonorités douces avecdes allitérations en [s] et [v] (sonnet 1, second quatrain et premier tercet).

De plus, les vers 7, 8, 9 et 10 montrentde nombreuses coupes.

Cela laisse à penser que sa conception de la poétique est plus naturelle, plus intuitive, etsurtout plus libre. Le travail de création poétique est perçu comme allant de soi, dans une démarche très personnelle.

La source deson écriture, c'est lui-même.

La création est personnifiée, Du Bellay "échange" avec lui-même dans son processuscréatif :"Je me plains à mes vers, si j'ai quelque regret :Je me ris avec eux, je leur dis mon secret" (sonnet 1, v.10 et 11)Les vers 10 et 11 sont inclus dans un jeu de parallélismes propres à la forme du sonnet : ils sont à mettre enparallèle avec les vers 1, 2 et 3 : d'un côté Du Bellay explique ce qu'il reprouve, de l'autre, il prend le tempsd'expliquer son projet.

L'usage de ce distique cc en attaque du sizain produit un effet d'attente, qui met en valeur levers 12.

Vers 12 qui permet à Du Bellay d'avouer enfin quel est son processus créatif : toute son inspiration vient deson cœur, de son moi, de son intime.

La fin du vers "secrétaires" (sonnet 1, v.

11) reprend comme un écho le versprécédent "secret" (sonnet 1, v.10), donnant plus de relief à l'aveu de Du Bellay.Du Bellay perçoit le sonnet comme une forme aussi forte que l'est la pensée.

Ce n'est donc pas un hasard si sesRegrets commencent par deux sonnets.

Cette forme est la seule qui lui permet de transmettre aussi bien et aussilimpidement son propos.

Chaque verset n'est composé que d'une seule phrase.

Ce n'est évidemment pas un hasard.La voix lyrique de Du Bellay retient son souffle, il met de l'ampleur dans son discours.Le dernier tercet du second sonnet, la pointe, si chère à Du Bellay dans Les Regrets, propose un retournement desituation favorable à son auteur.

Encore une fois, l'usage du distique en cc provoque cet effet d'attente, pour mieuxmettre en valeur le dernier vers.

On y trouve pour la première fois la notion de "travail", que le poète de renie pas.L'écriture est peut-être perçue comme "habile" (sonnet 2, v.12) et "facile"(sonnet 2, v.13).

Le poète se reconnaitcomme étant un poète mineur certes, mais poète tout de même. Du Bellay se positionne sans complexe comme un poète "mineur".

Il assume ce statut et le revendique.

Il se metnaturellement au second rang.

Il a presque honte de produire une poésie si modeste. Joachim Du Bellay s'éloigne définitivement des idéaux de la Pléiade.

Il se pose en opposition avec la littératuremajeure, celle reconnue par l'état, par ses pairs.

Il lui préfère sa poétique mineure, sans prétention, mais qu'ilpréfère finalement.

Le fait que Du Bellay expose ainsi la modestie de sa propre poésie aux idéaux qui sont restésceux de Ronsard, ne doit pas faire croire à une désapprobation de sa part, ni à une mésentente.

C'est surtout pourDu Bellay une façon de se démarquer de ses amis, de montrer qu'il a décidé de prendre un autre chemin.Mais à l'origine de ce revirement, peut-être peut-on voir chez Du Bellay, cet être qui jamais ne s'est mis en valeur,un aveu de son incapacité à dépasser les anciens.

Les grands objectifs qu'il s'était fixés, très jeune, il n'a finalementjamais réussi à les atteindre.

Et c'est à la fin de sa vie, qu'il regrette de s'être fourvoyé dans une voie qui n'était. »

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