Anthologie poétique sur le thème : Fidélité
Publié le 12/04/2014
Extrait du document
Et si l'âge qui rompt et murs et forteresses,
En coulant a perdu un peu de nos jeunesses, Cassandre, c'est tout unt Car je n'ai pas égard A ce qui est présent, mais au premier regard : Au trait qui me navra de ta grâce enfantine, Qu'encore tout sanglant je sens en la poitrine...
RONSARD
Lorsqu'il fut de retour enfin Dans sa patrie le sage Ulysse
Son vieux chien de lui se souvint Près d'un tapis de haute lisse
Sa femme attendait qu'il revint.
GUILLAUME APOLLINAIRE
Et Jean tua Madeleine.
Ce fut à peu près vers cette époque que
Madeleine perdit l'habitude de tromper Jean.
ALPHONSE ALLAIS
MARIE DE FRANCE
D'eux deux il était ainsi
Comme du chèvrefeuille était
Qui au coudrier se prenait.
Quand il s'est enlacé et pris
Et tout autour le fût s'est mis,
Ensemble peuvent bien durer.
Mais qui les veut ensuite désunir
Le coudrier meurt bien vite
Et le chèvrefeuille avec lui.
— « Belle amie, ainsi est de nous :
Ni vous sans moi, ni moi sans vous. s
HÉLOÏSE
ÉPITRE A ABÉLARD
Tu demandes, ô mon bien suprême, si quelque accident met fin à ta vie loin de nous, tu demandes que nous fassions transporter ton corps à notre cimetière, afin que l'incessante présence de ton souvenir, t'assure de notre part une plus abondante moisson de prières. Mais penses-tu donc que ton souvenir puisse jamais nous quitter ? Sera-ce d'ailleurs le moment de prier, lorsque le boule¬versement de notre âme nous aura ravi tout repos ? lorsque notre âme aura perdu le sentiment de la raison, notre langue l'usage de la parole ? lorsque notre coeur en délire et s'emportant contre Dieu lui-même, pour ainsi dire, bien loin de se résigner, sera moins dis-posé à l'apaiser par ses prières qu'à l'irriter par ses plaintes? Pleurer, voilà tout ce que nous pourrons faire dans notre infortune ; prier nous ne saurons : nous serons plus pressées de te suivre sans retard que de pourvoir à ta sépulture ; nous serons bonnes à être enterrées nous-mêmes avec toi plutôt qu'à t'enterrer. En toi, nous aurons perdu notre vie ; sans toi, nous ne pourrons plus vivre. Ah! puissions-nous ne pas vivre même jusque là! La seule pensée de ta mort est déjà pour nous une sorte de mort ; que sera-ce donc si la réalité de cette mort nous trouve encore vivantes ? Non, Dieu ne permettra jamais que nous te survivions pour te rendre ce devoir, pour te prêter cette assistance que nous attendons de toi comme un dernier service. En cela, c'est à nous, et, fasse le ciel qu'il en soit ainsi, c'est à nous de te précéder, non de te suivre. Ménage-nous donc, je t'en supplie, ménage du moins celle pour qui tu es tout : trêve de ces mots qui nous percent le cœur comme des glaives de mort et qui nous font une agonie plus douloureuse que la mort même.
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HÉLOÏSE
ÉPITRE A ABÉLARD
Tu demandes, ô mon bien suprême, si quelque accident met fin
à ta vie loin de nous, tu demandes que nous fassions transporter ton corps à notre cimetière, afin que l'incessante présence de ton souvenir, t'assure de notre part une plus abondante moisson de prières.
Mais penses-tu donc que ton souvenir puisse jamais nous quitter? Sera-ce d'ailleurs le moment de prier, lorsque le boule versement de notre âme nous aura ravi tout repos? lorsque notre âme aura perdu le sentiment de la raison, notre langue l'usage de la parole? lorsque notre cœur en délire et s'emportant contre Dieu lui-même, pour ainsi dire, bien loin de se résigner, sera moins dis
posé à l'apaiser par ses prières qu'à l'irriter par ses plaintes? Pleurer, voilà tout ce que nous pourrons faire dans notre infortune ; prier nous ne saurons : nous serons plus pressées de te suivre sans retard que de pourvoir à ta sépulture ; nous serons bonnes à être enterrées nous-mêmes avec toi plutôt qu'à t'enterrer.
En toi, nous aurons perdu notre vie ; sans toi, nous ne pourrons plus vivre.
Ah 1 puissions-nous ne pas vivre même jusque là 1 La seule pensée
de ta mort est déjà pour nous une sorte de mort; que sera-ce donc si la réalité de cette mort nous trouve encore vivantes? Non, Dieu ne permettra jamais que nous te survivions pour te rendre ce
devoir, pour te prêter cette assistance que nous attendons de toi comme un dernier service.
En cela, c'est à nous, et, fasse le ciel qu'il en soit ainsi, c'est à nous de te précéder, non de te suivre.
Ménage-nous donc, je t'en supplie, ménage du moins celle pour qui tu es tout : trêve de ces mots qui nous percent le cœur comme des
glaives de mort et qui nous font une agonie plus douloureuse que la mort même..
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