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Anvers, 22 août, 4 heures du soir. Victor Hugo, Correspondance

Publié le 09/03/2011

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hugo

Je suis réconcilié avec les chemins de fer; c'est décidément très beau... J'ai fait hier la course d'Anvers à Bruxelles et le retour. Je partais à quatre heures dix minutes et j'étais revenu à huit heures un quart, ayant dans l'intervalle passé cinq quarts d'heure à Bruxelles et fait vingt-trois lieues de France. C'est un mouvement magnifique et qu'il faut avoir senti pour s'en rendre compte. La rapidité est inouïe. Les fleurs du chemin ne sont plus des fleurs, ce sont des taches ou plutôt des raies rouges ou blanches; plus de points, tout devient raie; les blés sont de grandes chevelures jaunes, les luzernes sont de longues tresses vertes; les villes, les clochers et les arbres dansent et se mêlent follement à l'horizon; de temps en temps, une ombre, une forme, un spectre debout paraît et disparaît comme l'éclair à côté de la portière; c'est un garde du chemin qui, selon l'usage, porte militairement les armes au convoi. On se dit dans la voiture : c'est à trois lieues, nous y serons dans dix minutes. Le soir, comme je revenais, la nuit tombait. J'étais dans la première voiture. Le remorqueur flamboyait devant moi avec un bruit terrible, et de grands rayons rouges, qui teignaient les arbres et les collines, tournaient avec les roues. Le convoi qui allait à Bruxelles a rencontré le nôtre. Rien d'effrayant comme ces deux rapidités qui se côtoyaient, et qui, pour les voyageurs, se multipliaient l'une par l'autre. On ne se distinguait pas d'un convoi à l'autre ; on ne voyait passer ni des wagons, ni des hommes, ni des femmes, on voyait passer des formes blanchâtres ou sombres dans un tourbillon. De ce tourbillon sortaient des cris, des rires, des huées. Il y avait de chaque côté soixante wagons, plus de mille personnes ainsi emportées, les unes au nord, les autres au midi, comme par l'ouragan. Victor Hugo, Correspondance.

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