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VICTOR HUGO La saison des semailles, le soir.

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La saison des semailles, le soir. C'est le moment crépusculaire. J'admire, assis sous un portail, Ce reste de jour dont s'éclaire La dernière heure du travail. Dans les terres, de nuit baignées, Je contemple, ému, les haillons ' D'un vieillard qui jette à poignées La moisson future aux sillons. Sa haute silhouetfys noire Domine les profonds labours. Oîi sent à quel point il doit croire A la fuite utile des jours. Il marche dans la plaine immense, Va, vient, lance la graine au loin, / /Rouvre sa main, et recommence, Et je médite, obscur témoin, Pendant que déployant ses voiles, L'ombre, où se mêle une rumeur, Semble élargir jusqu'aux étoiles" Le geste auguste du semeur. (Les Chansons des Rues et des Bois.) Ce poème a été publié dans Les Chansons des Bues et des Bois, en 1865 : il avait été composé plus de vingt ans auparavant. En 1852, dans Napoléon le Petit, Hugo reprit le même symbole, en l’appliquant à l’orateur, semeur d’idées. Mais la page de prose où la comparaison est faite et expliquée dès le début est loin de valoir le poème, dont elle semble, une paraphrase, à la fois passionné et fantaisiste.
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« VÎCTOu ijujo 215 I.

Composition.

La point de départ est, comme toujours chez Hugo, une sensation vraie, qui se transforme d'elle-même en symbole.

11 n'y a pas deux parties, comme dans les poèmes symboliques de Vigny ou de Leconte de Lisle: l'image et sa traduction plus ou moins artificielle, en tout cas toujours voulue par le poète.

Ici, c'est la vision réelle et forte qui s'imprègne d'idée et d'émo- tion.

Aucun besoin d'explication.

Aux derniers vers, la sensa- tion s'agrandit démesurément et donne le sens spirituel du tableau, quis'impose au lecteur comme ils'estimposé à l'artiste'.

Dans la page de prose, au contraire, Hugo part de l'idée elle- même : i Une fois monté sur cette tribune, l'homme n'est plus un homme; c'est cet ouvrier mystérieux qu'on voit le soir, au crépuscule, marchant à grands pas dans les sillons et lançant dans l'espace, avec un geste d'empire, les germes, les semences, la moisson future, la richesse de l'été prochain, le pain, la vie., H.

Le tableau.

Il est magnifique de clair-obscur et rappelle les eaux-fortes de Rembrandt.

Comme lui, il peint avec des ombres et du noir un peu de jour dans la première strophe, puis une accumula- tion de teintes sombres destinées à faire ressortir le personnage et la scène centrale Sa haute silhouette noire Domine les profonde labours.

Enfin les derniers vers s'illuminent d'une clarté sombre et surnaturelle.

Littéralement Hugo, comme le grand peintre flamand, « fait de la lumière avec des ténèbres'.

Les gestes du semeur sont décrits avec un rare bonheur, par le rythme, autant que par les mots.

Hugo reprend quelques-unes de ses expressions dans sa des- cription en prose.

Celle-ci ne contient plus aucun effet de clair-obscur.

Belle encore, elle est beaucoup moins émouvante, bien qu'il fasse partager son émotion à la nature entière : la fantaisie nuit au sentiment.

i Il va, il vient, il revient; sa main s'ouvre et se vide, et s'emplit et se vide encore; la plaine sombre 1.

On trouvera le même travail d'imagination et les mêmes procédés de composition dans Le Mendiant des Contemplations (Cf.

Chevailhie et Audiat, Les Textes /rançais, xix° siècle, p.

1176).. »

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