ARAGON, Le Roman inachevé. Commentaire composé

« Le monde auprès de toi recommence une enfance Déchirant les lambeaux d'un songe mal éteint Et je sors du sommeil et je sors de l'absence Sans avoir jamais su trouver accoutumance A rouvrir près de toi mes yeux tous les matins A revenir vers toi de mes déserts lointains Tout ce qui fut sera pour peu qu'on s'en souvienne En dormant mon passé que ne l'ai-je perdu Mais voilà je gardais une main dans les miennes Il suffit d'une main que l'univers vous tienne Toi que j'ai dans mes bras dis où m'entraînes-tu Douleur et douceur d'être ensemble confondues ARAGON, Le Roman inachevé.

Vous présenterez un commentaire composé de ce poème; vous montrerez par exemple comment s'y fait entendre le rythme d'une renaissance .

Connaissant une désillusion certaine dans son enthousiasme et son militantisme communistes, Aragon publie, en 1956, un long poème autobiographique qui va marquer le renouveau de sa production poétique : Le Roman inachevé.

Dans ce recueil, à la fois confession et plaidoyer, il effectue un retour sur son passé, sur son enfance, rappelle les mouvements dada et surréalistes auxquels il participa, et bien sOr, la rencontre avec Elsa Triolet qui devait bouleverser sa vie.

Tout au long de son œuvre, en effet, Aragon n'a cessé de chanter son amour pour Elsa, qui, avec sa foi dans le communisme, parvient seul à répondre à son angoisse de la mort et à la difficulté d'être .

Pourtant, même dans les poèmes les plus fervents du Roman inachevé, l'amour ne parvient jamais tout à fait à se libérer de son aspect tragique.

Dans ce poème extrait du Roman inachevé, Aragon nous présente l'existence humaine comme un perpétuel va-et-vient entre deux états; l'homme est sans cesse ballotté entre deux puissances rivales : celle de la mort, symbolisée par le sommeil, et celle de la vie, de l'état de veille.

L'image de la mer est dès lors, pour le poète, particulièrement propre à représenter la condition humaine.

La marée est la force agressive, la mort qui tente chaque soir de ravir sa proie.

Avec l' « aurore • et le réveil, au contraire, la mer - la mort -se retire.

L'allitération en " r ,.

souligne ce mouvement de ressac; avec le bruit tout reprend vie : «L'aurore a brui du ressac. »