ARLAND Marcel : sa vie et son oeuvre
Publié le 14/11/2018
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ARLAND Marcel (1899-1986). La carrière de Marcel Arland ressemble à ses recueils de nouvelles : dans sa diversité, on retrouve une cohérence, une harmonie de ton; dans la variété d’un regard apte à saisir l’instabilité des choses, le don d’aller à l’essentiel.
Bien qu’il soit arrivé à Paris à l’âge de vingt ans, après avoir passé son baccalauréat de philosophie au collège de Langres, Marcel Arland a su toute sa vie garder le contact avec le monde de son enfance, celui des premières lectures et celui des champs et des bois, de la vie rurale qu’il connut dans son village natal de Varennes-sur-Amance (Haute-Marne). A Paris, il néglige vite ses études pour errer dans la ville, perfectionner son expérience des femmes et suivre un moment le mouvement dada. Il a la chance de se lier avec Malraux avant le départ de celui-ci pour l’Indochine. Mais il trouve très vite sa véritable voie : la littérature. En 1922, il publie un premier recueil de nouvelles, Terres étrangères, qui est remarqué par Gide et Valéry Lar-baud : c’est la porte de la Nouvelle Revue française qui
«
Marcel Arland
1899-1986
Il y a deux Arland.
Non pas certes deux hommes, mais deux œ uvres imbriquées l'une
dans l'autre et qui, souvent, s'opposent entre elles...
Voici d'abord la part la mieux connue, la plus ouverte au public — et qui lui a apporté le
succès : elle se confond avec une enquête fiévreuse des chances départies à l'homme dans
le monde un peu sot de l'autre après-guerre.
Voici donc des exaltés, des indignés.
Certains
échappent hors d'Europe, d'autres restent pour démontrer à la vieille culture son
absurdité.
D'autres enfin végètent, s'exilent dans une province qui, souvent, les dépayse
plus encore que l'étranger.
Et qui les enterre.
Le héros que construit Arland est dominé par les instances nietzschéennes.
Avec sa
génération, le romancier vit sous le regard d'un Dieu jaloux auquel il ne croit pas, mais qui
n'admet aucun compromis, aucune médiocrité.
Telle est, au fond, l'histoire de Gilbert Villars, le héros de l'Ordre. Fils spirituel de Julien
Sorel, il se lance dans l'action politique, peut-être parce que sa vie n'a pas trouvé son
accomplissement dans la femme qu'il aime, Renée.
Du moins, entreprend-il de saper
l'ordre qui est.
On pourrait croire que la victoire le libère...
Mais Gilbert ne cherche pas à
s'assouvir : à peine Renée devient-elle sa maîtresse, qu'il travaille à la détruire et à se
détruire avec elle.
Un homme comme lui ne saurait se contenter d'un bonheur ou d'une
condition modestes.
Il porte avec soi trop de passion ; surtout, une force le pousse qui
corrompt tout ce qu'il touche et l'anéantit lui-même en fin de compte, comme le cancer qui
le ronge et le ramène vaincu à sa “ terre natale ”.
Arland a pu se délivrer d'une obsession en inventant Gilbert, il ne l'a pas détruite.
Dans un
article célèbre de 1904, Sur Un nouveau mal du Siècle, publié dans la N.R.F., il s'interroge :
que valent les spécialistes de la révolte — surréalistes ou révolutionnaires ? Pour les uns, il
s'agit d'une parade et d'une pose (qui n'est pas sans rapporter quelque bénéfice) ; pour les
autres, d'une doctrine qui remplace les religions mortes.
Alors, vers quelles valeurs faut-il
se tourner ?
Seule, la littérature peut fournir une éthique, car elle est un mode d'existence, une ascèse
de la solitude.
Cela explique l'ardeur avec laquelle Arland se détourne du succès social et
recherche l'isolement libérateur.
Qui n'a pas tenté ainsi de se détacher un jour de la
“ République des lettres ” n'a pas d'âme et n'a rien à dire...
Après l' Ordre vient donc la Vigie, cette expérience de la solitude, solitude de l'amour,
solitude de la pensée.
Sans doute l'instinct destructeur qui façonnait le caractère de Gilbert
affecte-t-il encore le héros du roman et met-il en péril Geneviève avec qui il tente de
“ vivre au désert ”, comme on disait au siècle d'Alceste.
Pourtant, le souci de composer
une figure imaginaire qui explique à elle-même l'existence individuelle l'emporte sur
l'esprit de négation.
Et cela marque un pas en avant..
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