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BECQUE Henry : sa vie et son oeuvre

Publié le 18/11/2018

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BECQUE Henry (1837-1899). Auteur dramatique, né à Paris. Henri Becque fut un homme secret, sensible et caustique, dont la vie, après qu’il eut achevé des études médiocres et tenu divers emplois administratifs, se confondit avec l’œuvre. Débutant comme librettiste d’un opéra de son ami Joncières, Sardanapale (1867), qui n’obtint guère de succès, il s’essaya ensuite au vaudeville — alors fort à la mode — avec l’Enfant prodigue (1868); puis il donna un mélodrame d’inspiration socialiste, aux intentions généreuses et au ton grandiloquent, Michel Pauper (1870), qu’il fut obligé de monter à ses frais, louant le théâtre de la Porte-Saint-Martin et engageant le célèbre acteur Taillade; il connut un complet échec avec une autre pièce à thèse, sur le divorce cette fois, P Enlèvement (1871).

 

Premières tentatives dramatiques qui ne laissaient guère prévoir la force et l’originalité de ses deux chefs-d’œuvre à venir : les Corbeaux et la Parisienne. Achevés en 1877, les Corbeaux durent attendre jusqu’en 1882 pour être enfin joués, à la Comédie-Française — le temps pour Becque d’écrire deux comédies en un acte : la Navette (1878) et les Honnêtes Femmes ( 1880). Sans être un triomphe, la création des Corbeaux fit date dans la vie théâtrale; la critique était divisée, mais, dans l’ensemble, favorable; le public, choqué, mit plus longtemps à se laisser convaincre. Quant à la Parisienne, écrite en 1883, créée seulement en 1885 — mais avec succès — au théâtre de la Renaissance, elle fut difficilement acceptée à la Comédie-Française en 1890.

 

Dès lors sembla se tarir la verve du dramaturge : la satire politique des Polichinelles (posth., 1910) resta inachevée; et absorbé par les articles, les conférences et les nécessités de la vie mondaine, Becque ne produisit plus que des essais et des souvenirs : Querelles littéraires (1890), Souvenirs d'un auteur dramatique (1895).

 

Une nouvelle esthétique dramatique

 

Dans cette œuvre restreinte, deux pièces auront donc suffi pour faire de Becque le grand auteur dramatique du dernier quart du XIXe siècle et l’imposer comme un novateur : quitte à heurter les goûts du public, il refuse les conventions où se complaisait le théâtre, souvent médiocre et factice, des Scribe, Augier, Dumas fils et Sardou.

 

Refus des conventions techniques; et c’est l’abandon des intrigues compliquées, riches en péripéties, coups de théâtre et dénouements toujours heureux, au profit de la simplicité et de la rigueur de la construction. Avec une grande économie de moyens, mais un art subtil de la préparation et de la création d’une atmosphère par petites touches successives, se dessine, dans les Corbeaux, la sourde et irrésistible montée du tragique — au fur et à mesure que l’étreinte des hommes d’affaires se resserre sur la famille Vigneron, livrée à leur merci par la mort du père. Plus audacieuse encore, dans son dépouillement même, est l’intrigue de la Parisienne : une absence presque totale d’action (« ni sujet, ni conduite, ni épisode saillant, ni commencement, ni crise, ni dénouement », se lamentait le critique Jean-Jacques Weiss), mais une structure et un rythme serrés, tant les personnages de cette comédie amère (la Parisienne, son mari et son amant) s’efforcent justement d’éviter toute transformation de la situation de départ.

 

Même rejet de l’artifice dans la recherche d’un nouveau langage dramatique, qui supprime les tirades à effet

« et les mots d'auteur pour privilégier une parole plus naturelle, où sous-entendus et silences ont leur rôle.

Refus enfin des conventions morales et sociales de l'époque : le théâtre de Becque, pessimiste et d'une iro­ nie souvent cruelle, reflète sur la scène l'univers roma­ nesque des Balzac, Flaubert et Zola.

Dans une société où l'argent est roi, les gens d'affaires se révèlent des «corbeaux » dénués de scrupules; et, pour les petits­ bourgeois du ménage à trois de la Parisienne, la quiétude est la seule valeur qui mérite d'être préservée.

Par cette âpreté de l'observation, Becque renoue sans doute avec toute une tradition venue de Molière et de Lesage.

JI demeure pourtant un isolé, qu'on ne peut rattacher à aucun mouvement.

Parce qu'au même moment les écri­ vains naturalist>!S se tournaient sans succès vers le théâ­ tre, il fut parfois tenu pour l'un des leurs : «Oui, le naturalisme dans la maison de Molière! » dit-on quand les Corbeaux entrèrent à la Comédie-Française.

Mais si les naturalistes l'admiraient, Becque, qui goûtait peu leurs théories et leurs partis pris, s'irrita toujours de cette confusion.

Et, malgré la sympathie qu'il manifesta pour le Théâ­ tre-Libre d'Antoine, et qui le fit considérer comme un précurseur des drames réalistes et des comédies « ros­ ses», son œuvre proposait moins un modèle à suivre qu'une remise t�n question des artifices dramatiques.. »

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