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CARRASCO Aurélie, M1 master MEEF Étude stylistique Aurélien de

Publié le 30/11/2015

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CARRASCO Aurélie, M1 master MEEF Étude stylistique Aurélien de Louis Aragon Note : Observations : Aurélien est le quatrième roman du cycle du Monde réel de Louis Aragon publié en juin 1944, mais composé pendant l'Occupation, entre 1942-1944, période durant laquelle Aragon est contraint à la clandestinité. Aurélien est un roman ambigu et très riche donnant à voir les dérives morales et les diversions esthétiques d'un jeune bourgeois, Aurélien qui incarne le fameux mal du siècle des années 20 dites « les années folles ». Ce roman dépeint une génération prise entre-deux-guerres, sans identité propre, qui se laisse aller à une trêve trop gaie pour être réelle. Cet incipit de roman s'ouvre sur une rencontre amoureuse qui est un thème romanesque traditionnel. L'idylle amoureuse constitue traditionnellement l'un des éléments de la trame romanesque et donna lieu, depuis le roman précieux du XVIIème siècle à l'étude psychologique des personnages. Au XIXème siècle, elle se couple avec la question de l'élévation ou du déclassement social dont la rencontre amoureuse est le pivot. Cette fameuse rencontre amoureuse est souvent marquée par l'admiration ou son caractère exceptionnel. Cet incipit reprend donc le thème de la rencontre mais sous un angle déroutant et nouveau. Ce qui nous amène à nous demander comment le texte, grâce au monologue intérieur, joue avec les codes romanesques. Tout d'abord, la scène de rencontre est présentée à travers la voix et le regard d'Aurélien. Mais cette rencontre amoureuse mène à un amour paradoxal qui aboutit à la déconstruction des clichés romanesques. C'est alors que le récit bascule du réel à la rêverie en passant par une poétique en prose. I. Une scène de rencontre à travers la voix et le regard d'Aurélien a) La confusion narrative Dès le début de cet incipit, le texte s'ouvre comme un récit au passé-simple écrit à la troisième personne du singulier puisque le récit commence par le proposition « La première fois Aurélien vit Bérénice » (l.1). Le narrateur semble donc être extérieur à l'histoire, le texte commence par une focalisation externe. Dans un premier temps le lecteur semble être plongé dans le récit d'un souvenir, le déictique temporel « ce jour-là » (l. 4-5) et l'utilisation du plus-que-parfait «  Il l'avait mal regardée » (l. 7) marque l'antériorité de l'action par rapport à la narration. Ainsi, le caractère fuyant, évanescent de cette rencontre apparaît dès les premières lignes de cet incipit dans le sens où le souvenir semble être narré par un narrateur extérieur à l'histoire. D'emblée, il est lié à la mémoire voire à l'imaginaire puisqu'il appartient au domaine du souvenir, moment déjà coupé de la réalité. b) Le monologue intérieur Mais, dès la première phrase de cet incipit, la confusion narrative apparaît et déroute le lecteur. Les paroles, les pensées du protagoniste font irruption dans le texte et finissent par l'envahir. Dans la première proposition, l'adverbe énonciatif « franchement » (l.1) fait apparaître la voie d'Aurélien dans ce récit du souvenir. Le personnage exprime son point de vue, grâce à ce modalisateur Aurélien peut exprimer son opinion sur ce qui est dit. Le même modalisateur énonciatif se retrouve à la ligne 2 de cet incipit. C'est en réalité l'état intérieur du protagoniste qui est narré dans cet incipit. Le discours indirect libre, type de discours idéal pour retranscri...

« discours idéal pour retranscrire la pensée, envahit le texte comme le souligne les propositions suivantes : « Il se demanda même pourquoi.

C’était disproportionné » (l.

8-9), « Mais Bérénice.

Drôle de superstition.

» (l.

10-11).

Un soupçon de discours direct se manifeste même par l’incise « je deviens gâteux » (l.

23-24).

De nombreuses phrases non verbales traduisent l’économie syntaxique de la pensée d’Aurélien : « Brune alors, la Bérénice de la tragédie.

» (l.

20), « Quelque chose comme une défaite » (l.

31), « Désertée » (l.

31).

C’est donc le fil de la pensée du protagoniste qui est donné à lire dans ce texte.

La reprise d’un même terme, comme le substantif « étoffe » dans les propositions anaphoriques aux lignes 2 et 3 illustre le cheminement de la pensée de ce personnage.

De plus les nombreux points de suspensions et les reformulations comme nous le soulignons aux lignes 5 et 6, « Ses cheveux étaient ternes ce jour-là, mal tenus » ou dans le syntagme nominal « une impression vague, générale, d’ennui et d’irritation » montrent une pensée qui se cherche, qui tâtonne pour trouver le mot juste en cordonnant ou juxtaposant des termes ou expressions synonymes.

Les nombreuses marques d’oralité comme dans l’expression familière « en veux-tu en voilà » (l.

21-22), avec l’abondance des pronoms indéfinis tel que « ça » (l.

6, 12, 30), l’adverbe présentatif « Voilà bien » (l.11) et l’utilisation d’un langage familier, populaire avec les termes « gâteau » (l.

24), « le type » (l.24), « flemmard » (l.

25), « bellâtre » (l.

27), voire vulgaire avec l’adjectif « moricaude » (l.

21) mettent l’accent sur l’expression d’une subjectivité, d’une parole intérieure en reproduisant son naturel.

Le relâchement dans l’écriture, tel que nous le constatons dans la proposition suivante « Il n’aima pas comment elle était habillée » (l.

2), souligne aussi l’oralité dans ce récit.

Ainsi, le narrateur extra-diégétique, dans cet incipit, fait accéder le lecteur à l’état intérieur du personnage, le fait entrer dans les méandres intérieurs de la pensée du personnage éponyme.

c) L’expression du doute Comme nous venons de le préciser, cet incipit rend compte d’une expression subjective, d’un ensemble d’impressions comme le montre les verbes de jugement subjectifs « il la trouva » (l.

1), « elle lui déplut » (l. 2), « il n’aima pas » (l.

2) ou « augurer » (l.

4).

Mais c’est l’expression d’un doute qui est donné à lire dans ce texte, puisque le champ lexical de l’imprécision se développe dans ce texte avec la proposition suivante « Aurélien n’aurait pas pu dire si elle était blonde ou brune.

Il l’avait mal regardée » (l.

6-7), ou le syntagme nominal « une impression vague, générale » (l.

8).

L’utilisation du verbe de pensée « je crois » à la ligne 9, met en avant aussi ce sentiment de doute qui envahit le protagoniste.

De plus la question rhétorique « Pourquoi ? » à la ligne 17 souligne aussi cette expression du doute d’Aurélien.

Le texte est donc organisé autour du regard de ce personnage, le jugement esthétique et le doute qu’il engendre, découlent d’un point de vue interne puisque le champs lexical du regard, est perceptible à travers les nombreux verbes de perception « vit » (l.1), « qu’il avait vue » (l.

3), « mal regardé » (l.

7), « voyait » (l.

33). Ainsi pour conclure cette première partie nous pouvons avancer que la voix du narrateur semble laisser sa place à celle d’Aurélien dont on suit l’évolution de la pensée.

Le regard et les pensées d’Aurélien montrent que le personnage n’est pas resté indifférent à cette rencontre.

Une histoire amoureuse débute mais c’est un amour atypique voire paradoxal qui va nous être présenté. II.

Déconstruction des clichés romanesque a) une scène de rencontre pervertie Comme nous venons de le démonter c’est l’histoire d’une rencontre amoureuse et les méandres d’un moi intérieur qui sont donnés à lire ici.

Mais cette scène de rencontre inverse les codes romanesques, elle pervertit le cliché amoureux dans cet incipit.

Tout d’abord, le personnage éponyme est frappé par la laideur de l’être aimé puisque le narrateur précise à la ligne 1 qu’« il la trouva franchement laide ».

Il est aussi dérangé par la banalité du personnage.

L’expansion du nom sous la forme d’une proposition relative : « qu’il avait vu sur plusieurs femmes » (l.

3) vient enrichir les atouts vestimentaire de Bérénice, son étoffe, en soulignant leur caractère commun, dénué d’originalité.

C’est donc une rencontre repoussante qui est présentée ici, le lexique dévalorisant du portrait envahit la caractérisation physique de Bérénice : « laide » (l.1), « ternes » (l.

5), « mal tenus » (l.

6), « plutôt petite, pâle » (l.

9).

C’est donc une rencontre qui provoque un sentiment désagréable puisque le vocabulaire de l’irritation, avec les termes « ennui », « irritation » (l.

8) 2. »

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