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Commentaire composé : L'Abuseur de Séville, Tirso de Molina - Acte III « Qui appelle Aminte ? […] Ah ! que tu connais mal l'Abuseur de Séville ! »

Publié le 14/07/2012

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Pour séduisants que soient ces discours de la domination et du désir, Aminte n’y cède pas, mais se raccroche, tout au long de la scène, à l’ordre. Elle évoque ainsi tour à tour la facilité de son union avec Batrice, et l’indissolubilité du mariage : « tout était si simple et si franc «. Don Juan se voit en demeure de légaliser son désir par la promesse de mariage, donc d’utiliser les codes sociaux. Et pour réaliser sa « burla «, il prête serment devant Dieu. A ce compte seulement, Aminte lui offre son cœur et sa vie, assurée d’une permanence que la loi maritale garantit. Dans cette scène de séduction, Don Juan apparaît avec éclat comme un beau parleur, un comédien, grand seigneur aussi, faisant jouer son pouvoir et se servant de l’image de la noblesse pour parvenir à ses fins. Il joue avec les règles admises, sociales et religieuses, et en cela il est bien l’expression théâtrale d’une situation historique caractérisée par l’anomie1. Dramaturge chrétien, Tirso de Molina crée un personnage qui, par sa conduite, pousse à l’extrême le mépris des valeurs au sein d’une société elle-même corrompue (hormis don Gonzale, aucun personnage n’a de véritable honneur). Ainsi, à travers le châtiment de Don Juan, l’auteur procède à la dénonciation de la société et au rétablissement de l’ordre divin.

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« historique caractérisée par l'anomie1.

Dramaturge chrétien, Tirso de Molina crée un personnage qui, par sa conduite, pousse à l'extrême le mépris des valeurs au seind'une société elle-même corrompue (hormis don Gonzale, aucun personnage n'a de véritable honneur).

Ainsi, à travers le châtiment de Don Juan, l'auteur procède à ladénonciation de la société et au rétablissement de l'ordre divin. A côté de cet aspect socio-historique, la scène offre des dimensions mythiques.

Aminte écoutant Don Juan, cet être lié à la nuit, qui la flatte et lui promet l'illusion,c'est Eve fascinée par Satan.

Molina n'a-t-il pas assimilé Don Juan au diable, par la bouche de Catherinon « …sous la patte de Lucifer » ?.

Dans les scènes deséduction, le dramaturge semble vouloir rejouer la chute, pour lui liée au péché de chair.

Dans les deux cas, c'est le Mal qui triomphe.

Outre ce mythe biblique,resurgit celui du dieu Fécondateur, volant la jeune mariée à son époux légitime afin d'épargner à ce dernier la perte de son âme.

Don Juan vole l'honneur des hommes,les ridiculise, tout en se vengeant des femmes.

La psychanalyse détecte là une situation oedipienne : la vengeance contre un père-rival à travers les fiancés, et contreune mère coupable de préférer le père à travers les femmes.Don Juan avait annoncé : « Ma cassade la plus choisie parmi toutes doit être celle-ci.

».

C'est en effet la plus réussie, constituant le sommet de la carrière du Burladoravant que ne s'abatte le châtiment divin.

Plus encore qu'avec Thisbé, autre « inférieure », et devant faire face à l'hostilité d'Aminte, Don Juan dévoile son art de laparole.

Maître absolu de l'échange verbal, il se sert de se prérogatives nobiliaires et de codes sociaux pour parvenir à ses fins.

En même temps, il fait briller lesséductions de l'amour contre la loi patriarcale du mariage.

Aminte est certes une paysanne de la commedia, qui évoque des héroïnes romaines, mais comme unepaysanne réelle, elle est soumise à la domination de Don Juan.Le critique théâtral, Jacques Sherer, estime qu' « après le grand mythe antique d'Œdipe et le grand mythe médiéval de Tristan et Yseut, celui de Don Juan apparaîtcomme un mythe moderne et nouveau sur l'amour ».

Amour lié à l'instant, mais aussi au pouvoir.

C'est en quoi le Burlador possède une figure inquiétante,mystérieuse, aux racines mythiques, Diable ou Dieu.Cette scène de séduction, nous la retrouvons dans la plupart des versions ultérieures du mythe.

Sans doute parce qu'elle contient au plus haut degré le jeu du désir etdu pouvoir de la parole, consolidé par la suprématie sociale.

Scène parfois comique, chez Molière notamment, mais toujours grinçante, elle atteint peut-être laperfection chez Mozart où Zerline, conquise, chante avec Don Juan le fameux duo « la ci darem la mano », là, je te donnerai la main…. »

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