Devoir de Philosophie

Courage - Paul Eluard : Les armes de la douleur (commentaire)

Publié le 22/02/2011

Extrait du document

eluard

Paris a froid Paris a faim Paris ne mange plus de marrons dans la rue Paris a mis de vieux vêtements de vieille Paris dort tout debout sans air dans le métro Plus de malheur encore est imposé aux pauvres Et la sagesse et la folie De Paris malheureux C'est Pair pur c'est le feu C'est la beauté c'est la bonté De ses travailleurs affamés Ne crie pas au secours Paris Tu es vivant d'une vie sans égale Et derrière la nudité De ta pâleur de ta maigreur Tout ce qui est humain se révèle en tes yeux Paris ma belle ville Fine comme une aiguille forte comme une épée Ingénue et savante Tu ne supportes pas l'injustice Pour toi c'est le seul désordre Tu vas te libérer Paris Paris tremblant comme une étoile Notre espoir survivant Tu vas te libérer de la fatigue et de la boue Frères ayons du courage Nous qui ne sommes pas casqués Ni bottés ni gantés ni bien élevés Un rayon s'allume en nos veines Notre lumière nous revient (...)

Paul Eluard, 1942, Les armes de la douleur.

 

(1) Ce poème a été écrit alors que Paris était occupé par les Allemands.

Vous ferez un commentaire composé de ce poème, en étudiant par exemple l'image de Paris que propose ici ELUARD et les procédés par lesquels il parvient à communiquer son émotion et son idéal.

Issue du Surréalisme, la poésie de Paul Eluard, comme celle d'Aragon, abandonne les chemins de la révolte individuelle pour chanter la fraternité. Le lyrisme de la communion humaine est enrichi par l'expérience de la Résistance. Cette période de la guerre voit la création de nombreux recueils engagés comme Poésie et Vérité, Au rendez-vous allemand ou Les armes de la douleur. Ce poème, au titre significatif, décrit le Paris occupé, sa misère et son malheur. Mais, au-delà du dénuement, le poète trouve des raisons de croire en l'avenir. Poème de la soumission, ces vers, avec une simplicité apparente, parlent aussi d'espoir et de liberté.

eluard

« métro.

La soumission.

L'injustice — Le désordre suggéré par la diversité des vers.

Étudier leurs longueurs et les rimes. Deuxième partie : L'espoir. a) Qui se révolte ? Les démunis (étudier les quatre derniers vers).

Les travailleurs.« Nous » ou la fraternité retrouvée.b) Les raisons d'espérer dans le présent.

Au-delà des apparences : «Et la sagesse...

affamés» La beauté de la ville.c) La certitude des lendemains.

Étudier en particulier le thème de la lumière. Paul Éluard parle d'une ville qui souffre.

La cité tout entière représente les hommes sous le joug de l'Occupation.

Lacapitale, plus que symbole, devient véritablement vivante : elle éprouve les souffrances physiques les plusélémentaires.

L'auteur s'adresse à la ville comme à une personne : « Ne crie pas au secours Paris ».

Il la tutoie :« Tu es vivant d'une vie sans égale ».Mais une catégorie particulière de la population afflige le poète: les pauvres, les travailleurs affamés.

Engagé dans lecommunisme, il pense surtout aux déshérités.

Mais cette classe sociale ne constitue pas un ensemble séparé de laville.

Au contraire une équivalence est établie entre la cité et les pauvres : « Et la sagesse et la folie De Parismalheureux (...) C'est la beauté c'est la bonté De ses travailleurs affamés ».Ce peuple affronte tout d'abord la misère physique du froid, de la faim qui se retrouve dans la pâleur et la maigreur.La simplicité de la formulation «Paris a froid» «Paris a faim» accentue le dénuement de la condition humaine.

Ce sontles premiers besoins qui sont insatisfaits.

Les images simples, l'évocation nostalgique des marrons qu'on ne trouveplus dans les rues, l'atmosphère étouffante du métro implantent le poème dans le quotidien.

Toutefois Éluardretrouve par les répétitions la grandeur des litanies, leur monotonie aussi.

La liste des malheurs est sans fin ; ellepourrait se poursuivre longtemps encore.Le malheur n'est pas simplement d'ordre matériel.

Il naît aussi de la soumission des hommes à «l'injustice».

Ce mot, àla fin du vers, est accentué.

Cette injustice rompt l'ordonnancement naturel.

L'occupant instaure un ordretyrannique et pourtant c'est lui qui représente le désordre.

Éluard suggère ainsi qu'il peut exister un ordrebienfaisant et fraternel.

La structure du poème évoque cette confusion : la longueur des vers varie de 6 à 14 pieds.Seule la rime en «é» est représentée, les autres fins de vers restent en suspens.

Pourtant le poète tempère cetteimpression par les répétitions (Paris, c'est, Et), les allitérationsen «v» (de vieux vêtements de vieille), les rimes intérieures en« eur » (pâleur, maigreur),ou le parallélisme de construction :« C'est l'air pur / c'est le feu » - 3 / 3 « C'est la beauté / c'est la bonté » - 4 / 4 ou les harmonies de sons « té, é, i » : « Ni bottés / ni gantés / ni bien élevés 3 3 4Ainsi le poète établit-il un équilibre délicat entre le désordre et la douleur monotone.

Il témoigne de la souffrancemonocorde qui s'installe au sein du désordre de la guerre. ** * Mais le malheur ne doit pas être une fatalité.

Il existe des hommes pour se révolter.

L'auteur retrouve alors lafraternité.

L'emploi du pronom «nous» à la fin du texte souligne cette solidarité.

Il est d'ailleurs significatif que PaulÉluard n'isole pas, dans ce texte, d'individualités.

Aucun personnage particulier n'est chargé de représenter lesautres hommes : le pluriel domine avec les pauvres, les travailleurs affamés ou tous ceux qui veulent se révolter,poète compris.

Lorsque le singulier est employé, c'est à propos de Paris.

La ville est chargée alors de représenterl'ensemble de la population.Malgré le poids du malheur, le présent offre déjà des signes d'espoir.

Il faut voir au-delà des apparences : derrière levisage des travailleurs, l'air pur, le feu, la beauté, la bonté.

Le contraste est flagrant entre le froid, la faim et ce feuintérieur.

De même l'étouffement des contraintes, la privation de liberté évoquée par le métro « sans air » sontcompensés par la fraîcheur de cet air pur que dévoilent les visages.

La ville s'est vieillie, enlaidie comme le prouve letroisième vers mais, malgré tout, Éluard chante sa beauté : « Fine comme une aiguille forte comme une épée ». Le premier adjectif fait penser aux flèches élancées des cathédrales, il suggère aussi la fragilité de la capitale. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles