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Dans L'ère du soupçon (1956), Nathalie Sarraute invite les lecteurs à « trouver dans la littérature cette satisfaction essentielle qu'elle seule peut leur donner : une connaissance plus approfondie, plus complexe, plus lucide, plus juste que celle qu'ils peuvent avoir par eux-mêmes de ce qu'ils sont, de ce qu'est leur condition et leur vie. » Cette phrase vous donne-t-elle une idée exacte des enrichissements que vous trouvez dans la lecture des œuvres littéraires ?

Publié le 28/02/2011

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• Nathalie Sarraute, née en 1902, en Russie. Après le divorce de ses parents, elle arrive avec sa mère en France, à 2 ans. Études à Paris, Oxford, Berlin. Avocate. Aborde d'abord la littérature en amateur, à la recherche d'un « renouvellement de l'expression littéraire «. Tropismes (1938). Initiatrice du « nouveau roman « avec Portrait d'un inconnu (1949). Écrit d'autres romans, de Martereau (1953) à Vous les entendez (1972), des pièces de théâtre comme Isma ou ce qui s'appelle rien, des essais : L'Ère du soupçon (1956) et Wsage de la parole (1980), contenant l'essentiel de son esthétique.

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« La construction romanesque, l'écriture dramatique, l'analyse psychologique, ouvrent ou confirment certainesacquisitions ; elles expriment ce que le lecteur sentait ou rêvait et qu'il ne savait exprimer suffisamment bien. L'œuvre littéraire devient alors « une espèce d'instrument optique » (Proust) qui grossit et permet une préhensionplus facile des mondes du créateur donc du lecteur, qui suit ou compose parallèlement par sa lecture. Littérature = voyage dans l'Espace et le Temps (Homère, Chansons de geste...) d'autant plus valable que l'artcolore et entraîne.

La littérature élargit les frontières du réel (Le Grand Meaulnes, Alain Fournier ; Filles de Feu, deNerval...). Poésie peut-être encore plus que roman, car enchantement (au sens fort) dû « au verbe » poétique : magies desmots et rythmes.

Exemple un voyage merveilleux : poésie baudelairienne ou verlainienne, se laisser bercer : selaisser emporter quelque temps, pouvant alors...

« d'une aile vigoureuse II S'élancer vers les champs lumineux etsereins...

» (Baudelaire, Les Fleurs du Mal, « Élévation »). Monde des chimères du surréel, de Nerval — Apollinaire et « la chanson lente d'un batelier Qui raconte avoir vu sous la lune sept femmes Tordre leurs cheveux verts et longs jusqu'à leurs pieds.

» Alcools, « Nuit Rhénane ») Monde du fantastique où Edgar Poe, Maupassant, Villiers de l'isle-Adam, Mérimée, de Gourmont (voir Épreuve 15)excellent-Monde de la fiction où se plaisent non seulement les auteurs de contes de fées, mais ceux de contesphilosophiques (XVIIIe siècle) si bien que l'imaginaire leur permet de faire passer une satire sociale, riched'enseignements pour le lecteur (Lettres Persanes de Montesquieu ; Micromégas, Le Huron de Voltaire ; Les voyagesde Gulliver de Swift...). Ainsi - sauf dans le cas d'une cervelle faible s'identifiant abusivement et refusant le retour au réel, tel DonQuichotte -, la littérature, considérée sous cet angle pourtant encore assez extérieur, instruit ; car l'imagination atendance dans le monde moderne trop matérialiste et utilitaire, à se scléroser ; elle a besoin - comme la mémoire -d'aliments pour s'entretenir, se conserver, se développer.

Les œuvres littéraires les lui fournissent. 3.

Seconde partie Mais les lecteurs ne veulent-ils pas aussi dans la littérature trouver un écho d'eux-mêmes ? «...

Chaque lecteur »,prétend Proust, « est quand il lit le propre lecteur de soi-même.

» Certains livres ne sont-ils pas révélation de soi àsoi, véritable coups de foudre, rencontre merveilleuse avec un auteur qui vous permet de voir, comme le demandaitRimbaud ? La littérature n'est pas seulement un enrichissement d'instruction.

On est d'abord « le propre lecteur desoi-même » parce qu'on cherche, et voit dans telle œuvre littéraire, ce que l'on veut voir, et l'on s'y trouve tel qu'onveut se voir. Ce n'est pas encore se connaître alors, c'est se goûter et c'est fort plaisant.

« Satisfaction » certaine, sinonencore essentielle, que de se laisser aller aux douceurs d'une poésie élégiaque quand on est un peu sentimental, auxangoisses passagères nouées par La Vénus d'Ille (Mérimée) ou par Le Horla (Maupassant), quand on aime éprouverune peur intellectuelle, sorte de délivrance des vieilles terreurs enfouies en soi.

Ce n'est que littérature !...Évidemment un tel comportement est un peu complaisance, et certains littérateurs le sentent.

Risque alors d'unefâcheuse démagogie.

On voit des auteurs - non romanciers, mais producteurs de romans - étudier le marché, c'est-à-dire les désirs de leur public, et lui donner ce qu'il attend.

Exemple : Pol-Loup Sullizer... C'est la pente de la facilité que retrouver le reflet de ses émotions, mais - bien comprise - c'est au contraire lavoie ouverte à un épanouissement.

Comme Baudelaire, on « puise » une « pure lumière »...

« dont les yeux mortels,dans leur splendeur entière, Ne sont que des miroirs obscurcis et plaintifs.

» (Les Fleurs du Mal, « Bénédiction ») Et n'est-ce pas se retrouver déjà que de goûter la Beauté ? sentir que l'on est capable d'être transportéd'admiration, de joindre l'artiste dans « le vert paradis », « paradis parfumé Où sous un clair azur tout n'est qu'amour et joie, Où tout ce que l'on aime est digne d'être aimé, Où dans la volupté pure le cœur se noie (Baudelaire, Moesta et Errabunda). C'est l'essence de son moi profond que l'on retrouve dans la communion poétique, celle qui révèle le sens desabsolus et les exigences esthétiques que l'on porte en soi, sans bien s'en rendre compte avant. Se garder toutefois de stagner en soi, de lever seulement de vagues images subconscientes; ce serait forme deparesse d'esprit ou mollesse d'âme à la recherche de ses fantasmes.

La littérature, écrit encore Proust, doit «. »

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