DES ESSEINTES
Publié le 10/03/2019
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DES ESSEINTES, personnage unique du roman de J.-K. Huysmans À rebours (1884). Fin de race et fin de siècle, le duc Jean Des Esseintes est le type du dandy décadent pour qui le réel ne vaut que s'il mime l'artifice. Combinant des symphonies de parfums et de liqueurs, ce théologien de l'excentrique trompe son angoisse existentielle avec plus de succès que son créateur, qui finira par se convertir. Modelé sur le comte Robert de Montesquiou, qui, une génération plus tard, servit à Proust à camper son baron de Charlus, Des Esseintes fut le point de mire de toute une jeunesse dont les malaises n'étaient encore qu'esthéti-ques. À ce personnage, qui cite ou commente Hérodiade ou l'Après-midi d'un faune, Mallarmé (ainsi révélé au grand public) dédiera sa Prose pour Des Esseintes (publiée en 1885 dans la Revue indépendante}, véritable « art poétique ».
«
Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)DE� ESSEINTES.
Personnage du roman
de Jons-Karl J:iuysman� A rebours(*), paru en
188,4.
Inca�atton parfaite du pessimisme et du
« decade�ttsme »de� anné�s 1880, le duc Jean
Des.
Esseintes, demter reJeton d'une illustre
famille noble, a J'anémie, la névrose et le raf
�nement de� fin� d� race.
En rupture avec les
s•.ens, �o�t tl mepn,se le �onfo�ble philisti
niSf!t�, tl s est adonne tout Jeune a de malsaines
expenences amour�uses.
qui ont fini par altérer
grave �,ent � s�nte.
f�Is� dans un ultime sur
saut d ene�e, tl a.
dectde de vendre ses biens
et, a ��hete une vtl.Ja en ba�lieue pour y fuir
definnrve�ent la vre mondatne de Paris.
Cest
une retraite assez dorée que Ja sienne :
essa�ant,.
par toutes les complications du luxe
�e d1stra�re � sensibili�é émoussée, Je soJitair�
s est am,enage une extstence dont J'at1ificieJ
co��ne a la perfection.
Ainsi entouré d'objets
precreux, de fl�urs rares, de pierreries éton
n�ntes, dose-t-Il savamment des « sympho
�res >> de parfums et des « am mes >> de
liqueurs, q�t lut pennettent, en er-vent lecteur
de Baudelarre et du fameux sonnet des Cor
respondances(*), de transposer dans ses nari
nes ou son palais les jouissances que les autres
demandent simplement à la musique.
Ce qu'il
hait par-dessus tout, et particulièrement en
littérature, c'est le naturel : la nature, dit-il, «a
fait son temps.
Elle a définitivement lassé, par
la dégoûtante uniformité de ses paysages et de
ses ciels, l'attentive patience des raffinés>> .
A
ces derniers, la religion peut en revanche offrir
des jouissances de choix.
Des Esseintes s'est
ingénié dans sa cellule à dissimuler le luxe sous
des apparences ascétiques.
Il se sent en sym
pathie avec ces gens qui s'enfennent dans les
monastères et que persécute une société imbé
cile et haineuse.
Il vit lui-même comme un
moine, mais préservé de toutes les servitudes
de la vie commune et de l'obéissance à une
règle, à un dogme.
Il n'éprouve d'ailleurs
aucune vocation religieuse et Schopenhauer l'a
convaincu que l'existence même est le mal.
Dans sa 5olitude, ce héros décadent se sent
pourtant visité parfois par d'indescriptibles
dispositions d'âme.
En certaines secondes, il a
l'impression de retrouver la foi de son enfance.
li n'a aucun besoin de mortification ni de
prière, il croit savoir que l'heure de la grâce ne
sonnera jamais pour lui, mais il se pass\onne
pour les problèmes spirituels, admire l'Eglise
pour son œuvre civilisatrice et esthétique et
s'est fait une bibliothèque entièrement com
posée d'écrivains catholiques.
Il va encore au
delà et arrive à se demander si ses tendances
vers l'artificiel, et son besoin d'excentricités ne
seraient pas le résultat de raffinements extra
terrestres et de spéculations quasi théolop
ques.
Il trouve en lui des élans vers un ideal
inconnu, vers une béatitude lointaine.
Tout
cela est loin d'être simple, obsessions libertines
et hantise mystiques alternent chez Des
Esseintes.
La foi le tente et l'effraie tout ensem
ble, comme une maladie.
Entre M.
Folantin de
A vau-l'eau(*), et Durtal • de En route(*), Des
Esseintes est donc une figure charnière de
révolution spirituelle de Huysmans.
Mais, s'il
a les goûts littéraires et les problèmes moraux
de son créateur, Des Esseintes, à la différence
.
,
des deux autres personnages cttes, se trouve
dans une situation bien différente de celle de
Huysmans ; il ne fait pas de doute que ce
dernier a pris ici pour modèle l'écrivain mon
dain Robert de Montesquiou, dont Proust fera
plus tard son M.
de Charlus • - v.
A la
recherche du temps perdu(*).
Ce personnage fit
en tout cas un prodi�eux effet.
sur l'imagi .
na
tion des contemporatns et les Jeunes esthetes
s'empressèrent de se modeler sur Des Essein
tes, dont on trouve le reflet aussi bien dans le
Phili •
de Sous l'œil des Barbares(*) et
d'Un me
libre(*) de Maurice Bat rès, que
dans l' Algabal de l'œuvre du même nom (*) de
�tefan George.
M.
Mo..
»
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