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DESCHAMPS dom Léger-Marie : sa vie et son oeuvre

Publié le 22/11/2018

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DESCHAMPS dom Léger-Marie (1716-1774). Le système philosophique de dom Deschamps a longtemps vivoté dans l’ombre des grands du siècle des Lumières. S’il connaît aujourd'hui un regain d’intérêt, c’est en raison du désir de briser le carcan d'une uniformité fausse imposé au xviiie siècle par les idéologies. Le courant de doute qui effleure les sociétés bâties sur les certitudes des Lumières semble voir un complice dans ce bénédictin obscur qui a taxé le mouvement philosophique de « demi-lumières ». Deschamps attire et repousse à la fois par la rigueur extrême et violente de sa pensée, et par une écriture hantée par la nécessité d’atteindre à la pureté du « vrai mot ».

 

Le dogmatisme ténébreux d'un bénédictin sans foi

 

A partir de 1760, dom Deschamps mène une vie double : procureur du prieuré de Montreuil-Bellay, près de Saumur, il fréquente aussi le milieu du comte d’Argen-son, exilé dans son château des Ormes, dans le Poitou. Une vie monastique où règne une théologie désertée par la foi, un petit bourg arriéré, un milieu de noblesse d’épée farouchement conservateur mais impuissant, tout cela, vécu par un tempérament ténébreux et dominateur, contribue à la formulation du « vrai système ». A travers son disciple et protecteur, le marquis de Voyer d’Argen-son, il cherche en vain à convertir d'Alembert, Diderot, Rousseau et J.-B. Robinet. L'empire charismatique qu’il exerce autour de lui est absent de sa correspondance,

« ·---··--- ·• --· quence et d'une hantise de la précision sémantique, qui tiennent à la nature même de son système.

Si la vérité métaphysique ne peut être atteinte que par l'intellect, qui raisonne au niveau de la parfaite abstraction, la pureté de la fonction référentielle du discours doit être mainte­ nue.

Tout ornement est donc à proscrire parce qu'il ren­ voie à une réalité partielle et fragmentaire.

Le dévoilement du «vrai mot» exige la suppression de toute ambiguïté, faux sens et imprécision.

D'où des phrases tortueuses dont la structure syntactique est pous­ sée jusqu'aux limites acceptées et parfois au-delà.

Style rébarbatif sans doute, mais imposé par la nécessité d'évi­ ter les pièges que tend le langage corrompu de 1' «état de lois>> .

Deschamps, entièrement fidèle à la logique de son système, s'est créé un antistyle qui annonce 1' avène­ ment de 1' «état de mœurs >>, comparable au non-style dans lequel Barthes perçoit « 1' anticipation d'un état absolument homogène de la société>>.

Mais c'est là que réside la faiblesse fatale du deschampsisme : la cosmo­ gonie statique qui sous-tend son utopie confère à son discours le statut d'une grammaire invariable de l'enten­ dement humain qui ne se prête qu'à la répétition.

Le refus de reconnaître que 1' expérience linguistique est d'ordre essentiellement dialectique 1 'a voué à 1 'échec.

Il reste son système, « cette beauté sauvage, cruelle et négative>> (Voyer).

Longtemps ignoré par les succes­ seurs positivistes des Lumières, il a été sorti de l'obscu­ rité par un universitaire qui a cru trouver en lui un pré­ curseur de Hegel.

Au xx< siècle, l'Université, tom en corrigeant ces extravagances, poursuit le travail de res­ tauration et d'interprétation de cet inclassable, qui conti­ nuera à attirer 1 'attention tant que les hommes seront fascinés par les beaux échecs dans la recherche de l'absolu.

BIBLIOGRAPHIE Les Œuvres complètes.

correspondance et système philoso­ phique.

établies par une équipe de l'université de Poitiers sous la direction de B.

Delhaume et P.

Methais, seront publiées par les Éditions Complexe de Bruxelles.

Quatre volumes sont prévus.

En attendant.

ceux qui voudront connaître Deschamps se conten· teront d'éditions de textes choisis et d'ouvrages individuels : Je Vrai Système, publié par J.

Thomas et F.

Venturi, 2• éd., Genève, Droz, 1963: Je Mor de l'énigme métaphysique er morale par demandes et réponses, publié par B.

Baczko et F.

Venturi dans Dix-Huitième Siècle, n• 4 ( 1972) et n• 5 ( 1973), p.

323-363 et p.

21 1-249; Le lires er fragments inédits de dom Deschamps et de quelques col'l'espondcmts, publiés par J.

Wahl dans la Revue de métaphysique er de morale, n° 69 (1964), p.

237-257.

Pour des perspectives biographiques et critiques, en dehors de E.

Beaus­ sire, Antécédents de l'hégélianisme dans la philosophie fran­ çaise, dom Deschamps, son système er son école, Paris, Baillère, 1865, dont la partie érudite fait toujours autorité, consulter l'im­ portant recueil d'articles, Dom Deschamps er sa métaphysique, publié sous la direction de J.

d'Hondt, Paris, P.U.F., 1974.

A.

Robinet, Dom Deschamps, le maftre des maîtres du soupçon, Paris.

Seghers.

1974.

solide dans sa documentation, se signale par un commentaire que l'on peut juger prétentieux.

A.R.

STRUGNELL. »

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