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Dissertation Melancholia

Publié le 04/05/2023

Extrait du document

« Introduction Au début du XIXe siècle, la première Révolution Industrielle bouleverse les modes de production : l’agriculture et l’artisanat reculent face à l’industrie.

Pour faire tourner les nouvelles machines à vapeur, pour exploiter les mines de charbon, on fait appel à une main d’œuvre nombreuse qui déserte les campagnes.

Souvent, les enfants eux-mêmes travaillent dans des conditions épuisantes et dangereuses. Certains écrivains comme Victor Hugo s’élèvent tout de suite contre le travail des enfants, notamment à travers ce poème des Contemplations, « Melancholia ».

Mais c’est une lutte de longue haleine.

Ce poème date de 1838… En 1841, une loi fixera à 8 ans l'âge minimum pour travailler.

En 1851 le temps de travail est limité à 10h par jour avant 14 ans.

En 1874, le travail des enfants de moins de 12 ans est interdit. Aujourd’hui depuis 1959 en France, le travail est interdit en dessous de 16 ans, et limité à 8h par jour avant 18 ans.

Mais le travail des enfants est encore un sujet d'actualité à travers le monde. Notre poème « Melancholia » se trouve dans le Livre Troisième des Contemplations : « Les Luttes et les Rêves ».

Ce titre est révélateur : c’est le rêve, c’est à dire, la vision d’une société plus juste, qui alimente les luttes du poète.

Le terme de « Melancholia » est aussi très significatif : souvent chez les romantiques, c’est une tristesse amoureuse, un vague à l’âme philosophique.

Victor Hugo veut montrer que le poète est d'abord touché par la misère de ses semblables, il interroge le sens de la société et le destin de l'humanité. Problématique Comment Victor Hugo met-il en scène cette dénonciation du travail des enfants, pour émouvoir son lecteur, et l’inviter à réfléchir d’un point de vue plus intemporel, sur le véritable sens du travail et du progrès ? Axes utiles pour un commentaire composé Dans ce poème, Victor Hugo met en scène la voix du poète qui accuse et dénonce, le lecteur est saisi par des images fortes et contrastées qui rendent visible toute l’absurdité de ce travail destructeur.

Mais il montre aussi que ce tableau tragique n’a pourtant rien de fatal : ce n’est pas une volonté divine, mais bien un choix humain de société. Premier mouvement : Une accusation violente “Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ? Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ? Ces filles de huit ans qu’on voit cheminer seules ? Ils s’en vont travailler quinze heures sous des meules ; Ils vont, de l’aube au soir, faire éternellement Dans la même prison le même mouvement. Accroupis sous les dents d’une machine sombre, Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l’ombre, Innocents dans un bagne, anges dans un enfer, Ils travaillent.

Tout est d’airain, tout est de fer. Jamais on ne s’arrête et jamais on ne joue.” Tout de suite, trois questions se succèdent… En fait, plus que des questions, ce sont surtout des accusations : Où vont tous ces enfants ? elles nous mettent la situation sous les yeux.

Le verbe aller est au présent d'énonciation (l'action est vraie au moment où l'on parle).

« Ces enfants » le déterminant démonstratif est ce qu'on appelle un déictique (il renvoie à la situation d'énonciation).

Le poète prend l'industrialisation en flagrant délit, la main dans l'sac pour ainsi dire. « Où » la question porte sur le lieu bien sûr, mais elle a aussi une valeur symbolique.

« Où vont-ils ? » C'est à dire surtout, quel est leur avenir ? Quel est le sens de leur vie ? Quelle place leur réserve la société ? Si on y voit une question rhétorique (une question dont la réponse est implicite).

Le lecteur peut deviner seul la réponse : « nulle part ». En en effet, toute la suite du poème consistera justement à décrire ce « nulle part » : une ombre, un enfer.

Mais dès l'apparition du mot « Où » Victor Hugo rend évidente l'absurdité du destin de ces enfants et prépare la suite du poème.

On trouve ici les 2 premières parties du discours dans la rhétorique classique : l'exorde, qui expose le sujet et interpelle l'auditoire, la narration, qui présente les faits incriminés. Ces trois questions sont donc surtout une première grande dénonciation.

Des enfants qui ne rient pas, qui maigrissent au lieu de grandir, qui sont seuls et d'ailleurs, ne jouent pas… Ce sont les lieux communs habituels de l'enfance, niés directement.

Le mot « enfant » est à peine prononcé qu'il est déjà nié par ces subordonnées qui les représentent. Ce sont en plus trois accusations sous forme de gradation (elles sont de plus en plus fortes).

D'abord l'absence de rire : un mal-être moral, un manque.

Ensuite, la maigreur : un mal physique, et cette fois on leur enlève quelque chose.

Et enfin, la solitude : le lien social est détruit.

En maltraitant des enfants, c'est la société entière qu'on affecte. En face de cette gradation dans la violence, on va trouver une gradation inverse : dans le sens de la douceur et de la fragilité.

Les « enfants », les plus fragiles des humains, deviennent « ces doux êtres pensifs ».

C'est une périphrase (une reformulation en plusieurs mots) : les deux adjectifs sont presque définitoires.

Et dans le troisième vers, les enfants sont finalement représentés par les plus fragiles d'entre eux : ces filles de huit ans.

Le contraste est de plus en plus cruel. Plusieurs procédés rendent ces images particulièrement fortes. D'abord, le sujet « la fièvre maigrit » est particulièrement abstrait, insaisissable, mais il agit de façon très concrète avec le verbe maigrir : on dirait que la maladie attaque les enfants directement pour les vider de leur substance.

C'est bien une allégorie (une idée abstraite représentée sous des traits concrets). En face de cette fièvre personnifiée au singulier...

Les enfants, les doux êtres pensifs, avec un pluriel insistant, nous dépeint la multitude des victimes.

Cette opposition du singulier et du pluriel produit une image particulièrement vivante et cruelle : un fléau puissant et insaisissable, face à des victimes nombreuses mais fragiles.

C'est une hypotypose : une image saisissante et animée, faite pour marquer le lecteur. Mais en plus, ce verbe « maigrir » avec son COD, a un aspect un peu spécial, qu'on appelle inchoatif : il désigne un processus en cours, jamais terminé.

Les enfants semblent disparaître progressivement sous nos yeux.

Dans le même sens, le verbe cheminer nous laisse entendre, par homophonie (des mots qui se prononcent pareil) le nom commun « cheminée » : le symbole même de la première révolution industrielle au XIXe siècle.

Ces enfants sont implicitement, pour ces usines, un véritable combustible, détruit dans le processus de production. « Ces filles [...] qu'on voit cheminer seules » Avec le verbe « voir » le poète prend le lecteur à témoin, inclu dans le pronom indéfini. Ensuite, « on ne sait quoi » implique encore plus largement tous ceux qui constatent l'industrialisation du XIXe siècle.

Et enfin « jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue » : par ce jeu des pronoms indéfinis, le lecteur finit par se trouver lui-même à la place des enfants. Comme c'est souvent le cas suite à une série de questions rhétoriques, le poète répond lui-même.

Mais alors qu'on attend un lieu (Où … ?) c'est en fait d'abord un verbe qui apparaît, un verbe d'action à l'infinitif (c'est à dire un mode intemporel et impersonnel qui déshumanise encore plus l'action).

«Dans une proposition indépendante qui occupe un vers entier avec la ponctuation forte : Travailler résonne comme un reproche. La réponse courte « ils s’en vont travailler » est reformulée en 2 vers, (c'est une épanorthose : une reformulation qui gagne en intensité) et se termine avec un rejet (la phrase se termine sur le vers suivant).

On commence par le travail, on termine par le travail. C'est l'unité d'action.

Avec ça, on trouve aussi l'unité de temps « 15h ...

de l'aube au soir » et l'unité de lieu « la même prison ». Exactement comme dans un tragédie.

Les enfants sont un peu comme les héros tragiques, écrasés par une force qui les dépasse. D'abord, les meules qui écrasent, puis les dents qui tranchent. D'abord l'airain, solide, puis le fer, tranchant.

En fait, l'airain, c'est le nom qu'on donnait dans l'antiquité à un alliage de cuivre, proche du bronze et du laiton d’aujourd’hui… Dans la mythologie grecque, c'est la matière des trois remparts de la prison du Tartare, le lieu de l'enfer où les coupables expient leurs fautes.

En quelque sorte, un bagne au cœur des enfers… Et justement tout au long de ce passage, Victor Hugo nous amène progressivement en enfer.

Les compléments circonstanciels de lieu sont multipliés, d'abord avec avec les prépositions « sous » et « dans » : « sous des meules … sous les dents » devient ensuite « dans l'ombre … dans un bagne … dans.... »

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