Dom Juan de Molière: La mise en scène de Roger Planchon

Gilles Sandier a très bien distingué les deux grandes catégories de mises en scène entre lesquelles on peut répartir les différentes interprétations de Dom Juan: «Il y a» écrit-il, « une mise en scène de type "humaniste" qui explore, à travers Don Juan, le mystère de la "condition humaine", avec son tragique, son absurde, sa cruauté, sa volonté de puissance, son affrontement avec le divin, sa quête de la liberté, bref, le tréfonds métaphysique de "l'homme éternel" (comme s'il y avait une "nature humaine" éternelle, universelle); et il y a d'autre part un type de mise en scène critique, historique, qui se refuse à considérer une oeuvre en dehors du contexte historique, socio-politique dans lequel elle a été produite, et qui interroge cette oeuvre en l'inscrivant dans l'Histoire, pour analyser, pour comprendre ce que cette oeuvre a à nous dire sur un moment d'une civilisation, sur l'homme historique, qui est sans doute la seule réalité, l'homme "éternel" n'étant peut-être qu'une chimère humaniste. La méthodologie marxiste a familiarisé l'époque contemporaine avec ce type de réflexion. C'est à la première catégorie que se rattachent, pour Dom Juan, les mises en scène de Jouvet, de Bourseiller, et même celle de Vilar. C'est à l'autre catégorie, plus moderne, et se référant à Brecht, que se rattachent des mises en scène comme celle du "Berliner Ensemble", celle de Sobel, et aussi celle de Chéreau.» (Sandier, 30, p. 19)