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ENNIUS

Publié le 21/05/2012

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Ces vers sont caractéristiques du talent d'Ennius : il vise à l'effet; loin d'éviter l'emphase et le pathos, il s'efforce d'y atteindre par tous les moyens possibles. Aujourd'hui, nul défaut ne nous paraît plus insupportable et c'est ce qui rend si peu lisible pour nos contemporains l'ensemble de la poésie latine, car il faut bien dire que tous les poètes romains qui se sont plu à appeler Ennius leur père ont, à l'exception peut-être de Catulle et d'Horace, hérité son goût pour la grandiloquence.

« Ennius n'avait pas manqué de contribuer à cette propagande : Cicéron nous a conservé de lui une inscription métrique qu'on imaginerait volontiers figurant sur le socle d'une statue qui eût représenté Scipion déjà héroïsé, tout proche d'une apothéose à tout le moins littéraire : Des confins de l'aurore aux rives du ponant, Nul mortel, en hauts faits, n'est comparable à moi.

D'autres pourront monter jusqu'au séjour des dieux, Le ciel ouvre à moi seul sa porte la plus grande.

Ces vers sont caractéristiques du talent d'Ennius : il vise à l'effet; loin d'éviter l'emphase et le pathos, il s'efforce d'y atteindre par tous les moyens possibles.

Aujourd'hui, nul défaut ne nous paraît plus insupportable et c'est ce qui rend si peu lisible pour nos contemporains l'ensemble de la poésie latine, car il faut bien dire que tous les poètes romains qui se sont plu à appeler Ennius leur père ont, à l'exception peut-être de Catulle et d'Horace, hérité son goût pour la grandiloquence.

L'œuvre d'Ennius était copieuse et variée.

Il avait écrit des satires, dont il ne nous reste plus guère que les titres.

Un de ces titres, Héduphagética, indique qu'il s'agissait sans doute d'une collection de recettes de cuisine intrépidement versifiées.

Quelques fragments nous restent de ses tragédies, dont Cicéron estimait hautement le style ct la vigueur.

Mais ce n'est point là ce qui a fait d'Ennius le grand poète de son siècle, intermédiaire, agent de liaison, si on peut dire, entre Homère et Virgile; Ennius doit son immortalité à ses Annales, énorme composition épique où il ambitionna de faire entrer toute l'histoire de Rome, depuis sa fondation par Romulus jusqu'aux menus épisodes militaires auxquels lui-même, Ennius, avait participé ou assisté.

Il nous reste un peu plus de cinq cents vers de ce poème, qui devait en compter environ trente mille.

La grande trouvaille d'Ennius fut l'adoption du mètre homérique :l'hexamètre dactylique.

Son prédécesseur, Névius, avait publié, un siècle environ avant lui, une épopée sur la première guerre punique.

Il l'avait écrite en vers saturniens : c'était le mètre national de Rome, mais il était lourd et monotone.

Dès leur premier vers, les Annales d'Ennius faisaient sonner aux oreilles romaines toutes les ressources de ces six grandes mesures à quatre temps auxquelles le génie d'Homère avait, dès l'origine, conféré tour à tour tant de grâce ou tant de puissance : Muses qui de vos pieds frappez le grand Olympe •..

Hélas! le second vers déjà nous fait défaut! Nous ne connaissons les Annales que par des extraits parfois très courts, dispersés dans l'œuvre de Cicéron, ou encore cités à titre de curiosité par quelque grammairien.

Inégale et mal équilibrée dans ses parties, l'épopée d'Ennius n'en contenait pas moins de mémorables morceaux de bravoure.

Elle inaugurait cette longue tradition des épopées natio­ nales écrites (les œuvres d'Homère sont des épopées orales) où toutes les races d'Europe devaient, l'une après l'autre, affirmer leur génie naissant.

Par là, Ennius pater a mérité d'être appelé le père non seulement des poètes de Rome mais même de toute l'épopée européenne.

Lorsqu'il mourut en l'an 169 av.

J.-C., les Scipions lui firent une place dans leur tombeau familial.

Il avait toujours aimé le vin, affirme Horace, il est donc naturel qu'un tardif compilateur l'ait fait mourir de la goutte; c'était une mort enviable pour un poète romain.

JEAN HUBAUX Université de Liège. »

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