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Étudiez l'ironie dans « De la cour » et « Des grands »

Publié le 14/08/2014

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La Bruyère a deux objectifs moraux complémentaires : dénoncer les vices et mettre en évidence des valeurs qu'il pense devoir être substituées aux comportements qu'il critique. Familier de la cour, il est déçu et affecté par le monde qu'il y observe. C'est pourquoi l'un des moyens qu'il privilégie est l'ironie, traduction de ce regard distancié et d'une amertume sans complaisance. L' ironie est une figure souvent difficile à repérer parce que, fondamen­talement ambiguë, elle suppose une connivence entre l'énonciateur et le récepteur.

« Polyphonie L'ironie comme mention aboutit parfois à un véritable discours rapporté, comme dans OC, 53: «Il faut des fripons à la cour, ~uprès des grands et des ministres[ ...

].

Que voulez­ vous quelquefois que l'onfasse d'un homme de bien 1? »La question finale représente l'avis des puissants de la cour, qui préfèrent l'utile à l'honnête.

La Bruyère, pour qui, face à l'ar­ gent, au pouvoir, à la naissance, 1' « homme de bien »est la référence morale absolue, feint d'accepter ce jugement.

Même procédé dans DG, 23 : « C'est déjà trop d'avoir avec Je peu­ ple une même religion et un même Dieu : quel moyen encore de s'appeler Pierre, Jean, Jacques, comme le marchand ou le laboureur? » Pour révéler le caractère intéressé des mœurs de la cour, où chacun cherche à parvenir ou à se maintenir sans jamais penser à autrui, La Bruyère feint d'exposer un discours cynique (discours qu'en fait personne n'exprimerait aussi directement), comme s'il était l'un de ceux qu'en réalité il dénonce.

Ainsi, dans OC, 36: «L'on dit à la cour du bien de quelqu'un pour deux raisons : la première afin qu'il apprenne que nous disons du bien de lui; la seconde afin qu'il en dise de nous »,La Bruyère adopte Je ton de la maxime morale, mais c'est pour énoncer une règle d'intérêt valable à la cour.

L'ironie est donc polyphonique : deux voix discordantes se font entendre, mêlées ici par l'emploi du nous, ailleurs exprimées à travers l'emploi même du je, comme quand l'énon­ ciateur s'attribue une attitude ambitieuse (DC, 23, 28).

Ill.

Ironie et discours moral L'ironie constitue un moyen de dénoncer les vices de la cour au nom de valeurs morales éternelles qui sont l'envers de ces vices.

Elle est un moyen détourné, qui laisse entendre la morale sans l'exprimer directement, parce que la franchise est interdite mais aussi parce que le discours directement moral serait ennuyeux.

Cependant, l'ironie n'est une arme efficace que quand l'humour est encore possible, c'est-à-dire quand la victime de l'ironie a des excuses, comme le faible courtisan, ballotté par Je pouvoir, et qui tente de tirer son épingle du jeu.

En revanche, les traits d'ironie sont beaucoup moins fréquents dans le chapitre « Des grands».

Quand il s'agit des grands, La Bruyère semble moins recourir à la distance ironique ou bien il l'utilise par contraste, pour mieux donner force au discours moral, comme dans DG, 11 où le mot« inconvénient », fortement polyphonique, contraste avec « la mort de ces hommes uniques » qui marque le début de l'indignation.

On ne se moque pas des grands.

Leur rang impose le sérieux, même et surtout dans la critique (voir DG, 25).

Aussi, quand La Bruyère stigmatise leur comportement méprisant et hautain ou leur inutilité sociale, c'est souvent l'indignation directe qui s'impose.

La Bruyère emprunte alors le ton du prédicateur plutôt que celui du moraliste mondain, pour condamner un comportement qui viole les lois de la morale chrétienne, ce qui donne une tonalité plus grave au chapitre «Des grands».

1.

C'est nous qui soulignons.. »

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