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Extrait du chapitre VI [L'auto-da-fé]

Publié le 22/05/2015

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Extrait du chapitre VI

[L'auto-da-fé]

Après le tremblement de terre qui avait détruit les trois quarts de Lisbonne, les sages du pays n'avaient pas trouvé un moyen plus efficace pour prévenir une ruine totale que de donner au peuple un bel auto-da-5 fé ; il était décidé par l'université de Coïmbre que le spectacle de quelques personnes brûlées à petit feu, en grande cérémonie, est un secret infaillible pour empêcher la terre de trembler.

On avait en conséquence saisi un Biscayen

10 convaincu d'avoir épousé sa commère, et deux Por­tugais qui en mangeant un poulet en avaient arraché le lard ; on vint lier après le dîner le docteur Pangloss et son disciple Candide, l'un pour avoir parlé, et l'autre pour avoir écouté avec un air d'approbation;

15 tous deux furent menés séparément dans des appar­tements d'une extrême fraîcheur, dans lesquels on n'était jamais incommodé du soleil : huit jours après ils furent tous deux revêtus d'un san-benito, et on orna leurs têtes de mitres de papier : la mitre et le

20 san-benito de Candide étaient peints de flammes renversées, et de diables qui n'avaient ni queues ni griffes ; mais les diables de Pangloss portaient griffes et queues, et les flammes étaient droites. Ils marchè­rent en procession ainsi vêtus, et entendirent un

25 sermon très pathétique, suivi d'une belle musique en faux-bourdon. Candide fut fessé en cadence, pendant qu'on chantait ; le Biscayen et les deux hommes qui n'avaient point voulu manger de lard furent brûlés, et Pangloss fut pendu, quoique ce ne soit pas la cou‑

 

30 turne. Le même jour, la terre trembla de nouveau avec un fracas épouvantable.

Voltaire se plaît par ailleurs à décrire d'une manière facétieuse des coutumes qui donnent au spectacle plus de pittoresque et d'étrangeté. Il s'amuse à faire l'ethnologue et s'attache en particulier à détailler la coiffure d'infamie que portent les condamnés : le san-benito. Il raffine avec malice sur la disposition des «flammes« et des «diables« : «La mitre et le san-benito de Candide étaient peints de flammes renversées, et de diables qui n'avaient ni queues ni griffes; mais les diables de Pangloss portaient griffes et queues, et les flammes étaient droites « (1. 19-23). La direction des flammes annonce, on l'apprend plus loin, la peine de mort si elles sont «droites «, ou la remise de cette peine si elles sont «renversées«. Dans son reportage, l'auteur feint même de s'étonner qu'on ne brûle pas Pangloss comme les autres : «[Il] fut pendu, quoique ce ne soit pas la coutume« (l. 29). La raison de cette dérogation sera donnée au chapitre XXVIII : un orage éteignant le bûcher, Pangloss est pendu. Il échap­pera malgré tout à la mort.

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