Fables et fabulistes
Publié le 04/08/2011
Extrait du document
La Fontaine, Horace, Esope, Roman de Renart, L'avugle et le paralytique, etc...
INSTRUIRE EN AMUSANT
LES FABULISTES GRECS
FABLES ET MYTHES
ROME ET LA FABULA
FABLIAUX ET YSOPETS
«
LA FONTAINE REVU ET CORRIGE
L'Ouvroir de litterature potentielle a ete
mime par Raymond Queneau (1903- 1976).
Plus que dune ecole litteraire, ii
s'agit d'un cercle amical, ou Ion faisait mine de prendre au serieux des travaux
consistant a jouer sur les differentes
versions possibles d'un meme texte litteraire.
Plus le texte est connu, plus le
detournement est comique : La
Fontaine sera donc la principale victime
des Oulipistes, qui ont notamment fait
subir a a La dgale et la founnie le Modeste, comme tous les auteurs
medievaux, Marie a attribue ses fables
au roi saxon Alfred In Grand; certaines,
pourtant, sont directement heritees de
l'Antiquite, comme ate renard of le
corbeau a.
D'autres sont d'origine
-
petit jeu du S+7 : chaque substantif,
adjectif ou verbe du poeme est
remplace par un mot situe sept entrees
plus loin dans le dictionnaire.
En void le
debut :
LA CIMAISE ET LA FRACTION
La cimaise ayant chaponne tout
l'eternueur
Se tuba fort depurative quand la
bixacee fut verdie :
Pas un sexue petrographique morio
de mouflette ou de verrat.
Elle alla crocher frange
Chez la fraction, sa volcanique
Et I'histoire ne s'arrete pas la, car le
poete Herve Le Tellier a repris ce titre
pour composer un autre texte :
Une cimaise, seule, du haut de sa
corniche,
S'ennuyait a crever comme un chien
dans sa niche.
Pour occuper son temps, elle fait des
divisions
Et se trouve soudain devant une
fraction.
.
Quel curieux animal...
v s'etonne la
cimaise,
contemplant le quotient : trois divine
par treize.
lesquelles «L'ane sense» et «Le cerf et la
brebis», preparant la voie a des auteurs
moins connus comme Avianus, Syntipas,
Aphthonius, Ademar ou Romulus.
FABLIAUX ET YSOPETS
Quels que soient le talent et ['influence
de Phedre, le classique des classiques
reste longtemps Esope, et c'est
notamment grace a lui que le genre
de la fable survit au Moyen Age.
Des
recueils en langue vulgaire (c'est-h-dire
en francais) commencent a circuler au
xle siècle, et on les nomme «ysopets»,
en reference a l'auteur grec.
Le plus
celebre ysopet reste celui bait par
Marie de France au she siecle.
saxonne, et certaines semblent
nouvelles : De eremita raconte le
stratageme d'un ermite agace par les
commentaires perpetuels de son
serviteur sur le peche originel.
II attrape
une souris, la pose sous une ecuelle,
puis it commande au serviteur de
garder soigneusement l'ecuelle.
Le
vilain, bien sea, ne peut resister a la
tentation; et la souris lui echappe.
«Cesse de blamer Adam et Eve pour
leur peche, et occupe-toi de tes propres
faiblesses», lui dira ('ermite!
A cote d'une tradition lettree bien
represent& par Marie de France, une
tradition orale se developpe, plus
populaire, et dont les recits du Roman
de Renart sont un bon exemple.
A vrai
dire, si les ressorts classiques de la meandres de l'histoire litteraire.
Le
grand nom, ici, c'est bien evidemment
Jean de La Fontaine (1621 -1695), qui
va reprendre la tradition et la porter
jusqu'a son point de perfection.
II
faudra du temps pour qu'il admette
l'originalite de son apport.
II se donne
en effet au depart comme un simple
traducteur, ne visant qu'a restituer en
francais les ecrits d'Esope.
Les six premiers livres de fables, qui
paraissent entre 1668 et 1671, soot
&dies au Grand Dauphin, fils de
Louis XIV et heritier de la couronne
de France.
Ils visent a «instruire et
divertir», reprenant a la lettre In
programme de l'apologue antique.
Au fil des editions (1678 et 1694), la
personnalite litteraire de l'auteur
s'affirme de plus en plus, et le livre VII
promet « un air et un tour nouveau ».
De fait, La Fontaine fait appel a des
traditions plus variees, puisant aussi
bien dans ['heritage medieval que dans
la litterature indienne (Pilpafi et
renaissante (le genre des emblemes).
Au total, il invente peu de sujets, mais
deploie son genie dans l'art de
('anecdote, la theatralisation, la liberte
du ton, faisant de la fable un condense
de tous les genres.
La virtuosite avec
laquelle it joue par exemple sur la
longueur des vers (ce que l'on appelle
In « metre») donne a ses poemes une moraliser.
On pourrait
citer lean-Pierre
Claris de Florian
(1755-1794), qui fut
celebre en son temps
et dont on lit encore
quelquefois les fables les plus connues :
a nuteur et les souris», «L'avare et son
fils», Caveugle et le paralytigue».
d'education, mais aussi de l'Allemand
Lessing (1729-1781), ce dernier decidant
d'ailleurs de reagir en publiant ses
propres fables, plus morales...
Un peu plus Lard, le poete russe Krylov
(1769-1844) va relancer In genre, en
articulant sa vocation pedagogique sur
une remise a I'honneur du folklore de
son pays, dans une perspective que Ion
pourrait nommer romantique : it s'agit
pour lui de faire redecouvrir des
traditions populaires, dont la richesse
est negligee au profit d'oeuvres imitant
platement les realisations du
classicisme francais.
La fable, des lors,
apparait non plus seulement comme un
instrument d'education, mais comme le
creuset de cet «esprit national » que les
romantiques veulent promouvoir.
La tentative de Krylov reste cependant
isolee, et, au
xlxe siecle, la fable
West guere pratiquee
en France et en
Europe que par
des imitateurs de
La Fontaine, dont les
oeuvres s'imposent
avec l'instauration progressive de
I'enseignement obligatoire.
Les contes en vers de Voltaire (1694-
1778) semblent tout aussi proches
de ('esprit de la fable, meme s'ils
conservent In nom de contes.
Les auteurs du Ville siècle tendent
preferer les personages humains
fable continuent a fonctionner, it
semble que la visee morale soit
legerement subvertie, car les aventures
de Renart le goupil ne sont pas toujours
exemplaires...
Les «fabliaux», qui mettent le plus
souvent en scene des humains, sont de
la meme eau.
Ils continuent a enoncer
une morale, mais l'essentiel semble etre
la victoire du rire contre une victime qui,
bien souvent, est un puissant : cure
ripailleur victime de sa gourmandise,
riche bourgeois que trompe sa
femme...
Le beau role echoit souvent
des marginaux, ou aux femmes.
Courts
(quelques centaines de vers), reposant
souvent sur quelque bon mot, ces contes a rire ont laisse une empreinte
durable :
Rabelais,
La Fontaine,
Voltaire
encore s'en
z,sont inspires.
Passes en
prose, ils
contribuent
constituer a la
Renaissance
In genre de la
nouvelle, qui voit s'illustrer Marguerite
de Navarre et Bonaventure des Periers.
LE MOMENT LA FONTAINE
La vocation morale de la fable antique
se perd dans le fabliau, et il faut
attendre In xvie et surtout In xvne siecle
pour voir reapparaltre une tradition
qui semblait s'etre egaree dans les variete et une fraicheur rarement
atteintes en francais.
La souplesse et
l'ingeniosite du vers et de la strophe
permettent une expressivite maximale,
la poesie se voyant dot& des
possibilites de la prose.
On comprend, des lors, que ce talent mis au service d'un genre pedagogique
et moral ait fait de La Fontaine I'un des
grands classiques scolaires.
Quelle
cruaute, pourtant, dans ses poemes aux
antipodes de toute mievrerie, oh In
monde animal est place sous le signe
de la force, de la predation.
La nature
est carnivore, chez La Fontaine, et la morale des fables est souvent digne des
plus belles pages de Machiavel.
C'est
sans doute ce reafisme qui fait la force de ses fables - un realisme paradoxal,
si l'on se rappelle que In genre est voue
a ('imagination et a la fantaisie.
LUMIERES DE LA FABLE
Apres La Fontaine, plus rien ne sera
jamais comme avant.
Ses heritiers
directs se placent explicitement dans
son ombre, reprenant ses procedes pour se contenter de les inflechir,
generalement du cote de la morale.
Les auteurs des Lumieres trouvent dans
le cote pedagogique de la fable un
interet certain, qui rejoint leurs propres
preoccupations d'instruire et de aux animaux.
Peut-titre est-ce du fait de
la cruaute du monde animal; certains
ecrivains des Lumieres n'hesitent pas
intenter un veritable proces a la fable,
en remarquant quit n'est peut-etre pas
tres judicieux de faire apprendre aux
enfants des poemes ou Ion voit a la fin UNE RENAISSANCE
La fable, dont on oublie peu a peu
In caractere feroce et la virtuosite
stylistique, devient alors le genre
scolaire par excellence, celui qu'aucun
ecrivain digne de ce nom n'oserait plus
pratiquer.
II faut attendre le xxe siecle
pour qu'on en redecouvre les
possibilites, et cela se fera sur le mode
du jeu et du detournement : on connait
ainsi les pastiches de Pierre Peret et les
jeux verbaux de l'Ouvroir de litterature
potentielle (Oulipo).
Les surrealistes ouvrent la voie.
Si un
Robert Desnos (1900-1945) donne
d'abord quelques pastiches moqueurs
avec les morales immorales de Rrose
Selavy, il finit parprendre goat a
ce genre dedie a
l'imaginaire.
Ses Chantefables,
composees aux heures les plus
noires de
('Occupation,
apparaissent comme une eclaircie de
fantaisie en 1944.
La traditionnelle «morale" qui achevait
nombre de fables disparait corps et
bien dans ce renouvellement.
Chez un
111 poete comme Jean
-
fraiches pour lire a
Pierre Beencou
(ne en 1917; Fables Tardieu (1903-1995)
ou un prosateur tel
Jelin, 1986), la fable
offre une occasion de s'echapper dans
l'imaginaire, tout en evoquant des
sujets susceptibles de relever de la
morale au sens large : c'est-a-dire des
mceurs, de la facon dont les hommes se
conduisent les uns avec les autres.
Mais la fable reste avant tout du
domaine de la fitterature enfantine;
dans la lignee de Desnos, une poetesse
comme Anne Sylvestre s'affirme ainsi
comme l'une des vraies heritieres
d'Esope et de La Fontaine avec ses
Fabulettes a lire...
et a chanter : les
fables d'aujourd'hui soot plus cigales
que fourmis.
In loup devorer I'agneau...
C'est
('argument de Rousseau (1712-1778)
dans Emile (1761), son grand bake
tvAV, aor,...
»
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