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Gérard de Nerval, « Le château de Saint-Germain » dans Promenades et Souvenirs

Publié le 30/03/2011

Extrait du document

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Le narrateur retrouve avec beaucoup de plaisir Saint-Germain, qui est pour lui « une vitre de souvenirs «. Il se propose d'en visiter « le château bizarre «. Il vient de s'arrêter dans un café de la place du marché.    On me servit une chope de bière. Il y avait au fond trois cloportes ; — un homme qui a vécu en Orient est incapable de s'affecter d'un pareil détail.    — Garçon ! dis-je, il est possible que j'aime les cloportes ; mais, une autre fois, si j'en demande, je désirerais qu'on me les servît à part.    Le mot n'était pas neuf, s'étant déjà appliqué à des cheveux servis sur une omelette ; mais il pouvait encore être goûté à Saint-Germain. Les habitués, bouchers ou conducteurs de bestiaux, le trouvèrent agréable.    Le garçon me répondit imperturbablement :    — Monsieur, cela ne doit pas vous étonner ; on fait en ce moment des réparations au château, et ces insectes se réfugient dans les maisons de la ville. Ils aiment beaucoup la bière et y trouvent leur tombeau.    — Garçon, lui dis-je, vous êtes plus que nature ; et votre conversation me séduit... Mais est-il vrai que l'on fasse des réparations au château ?    — Monsieur vient d'en être convaincu.    — Convaincu, grâce à votre raisonnement ; mais êtes-vous sûr du fait en lui-même ?    — Les journaux en ont parlé.    Absent de France pendant longtemps, je ne pouvais contester ce témoignage. Le lendemain, je me rendis au château pour voir où en était la restauration. Le sergent-concierge me dit, avec un sourire qui n'appartient qu'à un militaire de ce grade :    — Monsieur, seulement pour raffermir les fondations du château, il faudrait neuf millions ; les apportez-vous ?    Je suis habitué à ne m'étonner de rien.    — Je ne les ai pas sur moi, observai-je ; mais cela pourrait encore se trouver !    — Eh bien, dit-il, quand vous les apporterez, nous vous ferons voir le château.    Gérard de Nerval, « Le château de Saint-Germain « dans Promenades et Souvenirs, 1854-1855    Vous ferez de ce texte un commentaire composé. Vous pourrez, par exemple, en étudiant le caractère théâtral de la narration, vous interroger sur la drôlerie de l'anecdote et sur l'image que donne de lui-même G. de Nerval.

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« I.

La construction. Le passage est construit comme une succession de scènes ou de saynètes possédant chacune leurs unités commedans le théâtre classique. Première scène : l'unité de lieu est le café, l'unité d'action est la présence des cloportes ; on relève deux interlocuteurs (le narrateur et le garçon) et desfigurants (« les habitués, bouchers ou conducteurs de bestiaux ») Deuxième scène : l'unité de lieu est l'entrée du château, l'unité d'action est le droit de visite.

Il n'y a de nouveaudeux personnages, le narrateur et le gardien.

Chaque saynète s'ouvre sur un paragraphe narratif qui sert detransition.

La seconde s'achève en revanche sur une réplique théâtrale, la chute : « Eh bien, dit-il, quand vous lesapporterez, nous vous ferons voir le château.

» 2.

Les rapports de la narration et du dialogue. Ceux-ci sont sous le signe de la disproportion. Le dialogue : importance quantitative et qualitative. Le comique : l'originalité des caractères, l'absurdité des situations et bien sûr des répliques en font l'élémentprincipal. La narration réduite au minimum (cf.

le nombre de phrases) ne sert que de faire-valoir, d'introduction, de transition. 3.

Intérêt pour les indications scéniques. Ayant adopté le dialogue comme expression privilégiée, l'auteur s'attache aux indications scéniques comme dans legenre théâtral. — Le physique des personnages : le gardien (« un sourire qui n'appartient qu'à un militaire de ce grade »). — Les attitudes : la gaieté suscitée par la plaisanterie du narrateur chez les consommateurs. — Le ton : « le garçon me répondit imperturbablement ». 4.

L'influence du théâtre s'exerce également dans les différents types de comique utilisés. Le comique de situation : — les cloportes au fond du verre de bière ; — l'interdiction de visiter le château. Le comique verbal : — la plaisanterie du narrateur ; — le pseudo-raisonnement du garçon et l'éventuel jeu de mot sur « bière » (la boisson et le cercueil). Le comique de caractère : — le garçon ; — le gardien. Transition. Ce dialogue vif, allègre est au service d'un certain sens de l'absurde.

L'anecdote bafoue en effet, les règles de lalogique. II.

La logique bafouée. 1.

La succession des événements et des répliques n'obéit pas à la logique, mais aux associations d'idées. — La présence des cloportes, elle-même incongrue, fait le lien entre l'Orient (lieu de voyage de Gérard de Nerval) etSaint-Germain.. »

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