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"Je n'ai pas oublié, voisine de la ville" de BAUDELAIRE

Publié le 14/09/2006

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baudelaire

  Je n'ai pas oublié, voisine de la ville,

 Notre blanche maison, petite mais tranquille ;  Sa Pomone de plâtre et sa vieille Vénus  Dans un bosquet chétif cachant leurs membres nus,  Et le soleil, le soir, ruisselant et superbe,  Qui, derrière la vitre où se brisait sa gerbe,  Semblait, grand oeil ouvert dans le ciel curieux,  Contempler nos dîners longs et silencieux,  Répandant largement ses beaux reflets de cierge  Sur la nappe frugale et les rideaux de serge.

On notera que les premiers mots «Je n'ai pas oublié« gouvernent ce poème qui n'est qu'une seule et longue phrase. Or, l'insistance que l'on perçoit là sonne comme un voeu désespété: «Je ne veux pas oublier«. Baudelaire s'arc-boute à cette image pour résister à la mort dans la vie, au temps qui apporte la destruction et l'oubli nécessaires au devenir. Baudelaire est comme un enfant qui refuserait de grandir. Il revient inlassablement à ce point fixe qui pourtant le nie, car il sait aussi que cette intimité radieuse est au prix du renoncement à soi-même.  Baudelaire restera écartelé entre la nostalgie du sein maternel et l'aspiration à une vie libre, la soif d'identité. C'est par son refus de trancher entre ces-deux appels contradictoires, par sa fidélité à cet écartèlement qu'il ouvre une ère nouvelle de la poésie.

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