La place de «De la cour» et «Des grands» dans l'économie des Caractères
Publié le 14/08/2014
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Les cinq premiers chapitres « Des ouvrages de l'esprit « (I), « Du mérite personnel « (II), « Des femmes « (III), « Du coeur « (IV), « De la société et de la conversation « (V) évoquent la société des salons, dans toutes les activités qui y sont liées : la littérature, les femmes et le coeur, la conversation et les relations sociales. Les chapitres I et II, en particulier, commencent par définir en quelque sorte le projet du moraliste puisqu'ils étudient respectivement les qualités du style chez l'écrivain et les qualités morales chez l'homme. Ils fournissent donc une première image idéale de l'écrivain, en évoquant d'une part ses goûts littéraires, d'autre part ses aspirations morales. On y découvre par quels moyens esthétiques et au nom de quelles valeurs éthiques le moraliste va juger les hommes.
«
« De la ville » constitue, avec « De la cour », une antithèse et un parallèle.
La cour et
la ville définissent, au
XVII 0 siècle, une division essentielle de la réalité sociale.
La ville
désigne d'abord Paris par rapport à Versailles, mais plus qu'un lieu, elle est un espace imag
inaire où l'on réunit en esprit tout ceux qui n'ont pas accès à la faveur royale.
La ville, c'est
donc toute la bourgeoisie, mais c'est aussi toute la noblesse qui n'a pas accès à la cour et qui
suit et imite toutes les modes de la cour.
Pour la ville, la cour représente un modèle à la fois
social, linguistique et mondain.
La ville et la cour sont le seul clivage social mis en évidence
par La Bruyère.
Ce clivage a une forte implication sociale et politique.
À travers lui,
La Bruyère dessine, presque inconsciemment (car cette opposition lui paraît naturelle), une
nouvelle société qui ne compte pas encore, celle
de la ville, mais qui est en train de « mon
ter» et qui se trouve exclue de la proximité du pouvoir.
À l'intérieur du chapitre « De la
cour», des distinctions affinent cette première division (la« ville» s'élargit ainsi à la
«province»: remarques 6, 11, 12, 67, 68).
« De la cour » présente la figure centrale du courtisan.
Celui-ci est un personnage qui,
par rapport aux habitants de la ville, est un privilégié qui a accès au sanctuaire du pouvoir.
Mais
il doit lutter sans cesse pour s'y maintenir et avancer; toute son activité consiste
à parvenir.
«Des grands», par opposition à« De la cour», évoque la catégorie sociale qui est en
place, c'est-à-dire la haute noblesse, à égalité avec le roi du point de vue de la naissance, et
l'entourage immédiat du roi.
Cette catégorie se caractérise par sa hauteur et son mépris
à!' égard de toutes les autres catégories sociales.
« Du souverain ou de la république » (X) domine l'ensemble.
Le titre revient à
désigner le roi comme incarnation de la république, c'est-à-dire de l'État.
Les liens de ce
chapitre
avec« De la cour» et« Des grands» sont évidents : La Bruyère y juge (avec beau
coup d'égards) le pouvoir suprême en évoquant l'opposition entre le roi et
h: tyran, la
guerre, les relations du roi et du peuple, mais aussi celles que Louis XIV entretient avec
ces courtisans qu'il maintient dans la servitude et avec les grands qu'il s'efforce de
rabaisser pour qu'ils ne fassent plus d'ombre au pouvoir royal.
L'ordre des chapitres montre ainsi que le courtisan
de« De la cour» se sent supérieur
aux gens de
« la ville » mais inférieur aux grands.
De même, « les grands » méprisent les
simples courtisans mais ils sont dominés par le souverain.
Ill.
Les chapitres XI à XVI : de la société à Dieu
Après cette série de chapitres sur la société, la perspective de La Bruyère s'élargit,
avec« De l'homme» (XI),« Des jugements» (XII), «De la mode» (XIII), «De quelques
usages
» (XIV), «De la chaire» (XV), « Des esprits forts » (XVI), à une observation plus
générale de l'homme.
Cette partie de I'œuvre, plus tournée vers la morale et la religion,
aboutit, dans
«De la chaire», à un jugement sur l'Église, suivi d'une série de remarques
opposant
le chrétien à 1'« esprit fort», c'est-à-dire à l'homme du monde qui oublie Dieu.
Mais les chapitres intermédiaires (
« Des jugements », « De la mode » et « De quelques
usages
») sont encore centrés principalement sur le cadre social de la cour et apportent
encore des renseignements sur le courtisan et les grands.
Ainsi, les chapitres VIII et IX entretiennent un lien étroit avec les autres parties de
J'ouvrage.
Les Caractères, complexes dans leur construction, exigent du lecteur une
démarche subtile :
- la lecture de chaque remarque comme
si elle constituait une unité indépendante;
- une insertion de la remarque dans le contexte du chapitre, car il existe des séries de
remarques qui se font écho entre elles;
- une interprétation du chapitre par rapport aux chapitres voisins..
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