La poétique d'Aragon
Publié le 02/08/2014
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La poétique d'Aragon
Les Yeux d'Elsa prolonge les recherches entreprises dans le Crève-cœur. Un tournant, amorcé en 1932, se confirme avec la guerre : aux audaces de la jeunesse surréaliste a succédé une prise de conscience, personnelle et politique. Derrière un apparent retour à la versification classique se dessine une évolution qui allie tradition et modernité.
le* I - UNE PROBLÉMATIQUE DE L'INTERTEXTUALITÉ
Des emprunts délibérés
Aragon revendique ouvertement les emprunts qu'il fait à ses lectures : « car j'imite.(...) Tout le monde imite. Tout le inonde ne le dit pas, « (« Arma virumque cano «) Il donne lui-même des exemples de ce qu'il doit à ses devanciers : le poème intitulé « Imité de Camoëns « qui reprend un sonnet du poète portugais, des vers de

«
E X P 0 S É S F C H E S
Un usage renouvcl~
Aragon tnontre qu'il n'y a là qu'apparcnce, exemples à \'appui.
Son travail sur
la rime consiste
avant tout
ü en assouplir au n1aximum le fonctionnement :
-.par la rime eitjambée qui se répartit sur la fin d'un vers et le début du suivant.
« héli&!iQui •> et « risque » ( « La nuit de mai ») ou « colon1bes/R_ien >> et« on1bre >>
{«La Nuit d'exil»): -par la rime complexe qui décompose le son riiné en plu
sieurs
mots:« si on» rimant avec« apparitions»(« La Nuit d'exil,,) ou« m'affa..;
111en1» avec« ma femm81' («Cantique à Elsa», ouverture).
Il use aussi dee rimes intérieu.ra dans certaines strophes du « Grand descort de
France
>>,qui permettent deux dispositions différentes de la strophe et donc deux
sens différents en \'absence de ponctuation.
li évoque enfin le travail sur les diffé~
rents mètres (alexandrin.
hexasyllabc) quïl effectue dans le recueil.
À cet égard, la
préface« Arma virumque cano »est une re1narquablc auto-analyse par Je poète de
ses propres procédés
comme de ses intentions.
Loin de revenir à la tradition, il ex
plore les ressources encore inexploitées d'un système et tente de \'élargir.
IJll> 111 -LA VALEUR D'UNE POÉTIQUE
Faiblesse et beauté
« L ·art des vers est l'alchimie qui transforme en beauté les faiblesses » (174) :
la volonté d'Aragon est *'"1.ltanément de recourir aux règles de versification et de
les transgresser pour en élargir l'usage.
Ce que la tradition appelle une faiblesse,
par exemple faire rimer un singulier
et un pluriel« séparés/gré»(« Cantique à
Elsa »)devient ainsi une trouvaille dans la mesure où le « s » de séparés, inséré
dans le vers
« Ce ne sont plus les jours du vivre séparés », évoque les deux
mcn1bres du couple séparé.
Dans sa
jeunesse, Aragon définissait le surréalisme
conHne « l'emploi déréglé el passionnel du stupéfiant ùnage " (Le Paysan de
Paris).
Si les deux adjectifs ne peuvent s'appliquer aux Yeux d'Elsa.
en revanche
la profusion et la richesse du registre confirment que ce mode d'expression reste
déterminant dans sa poétique.
L'héritage national
La démarche d'Aragon est inséparable du moment historique.
Son retour à la
versification traditionnelle
n'est pas@abandon de la modemieé, mais une•ta
il.ve concertée d'ins-c ztte dernière dans la continu.ité de l'hiritage ~.
aij:)rs que la France est envahie.
coupée en deuxf&-l'unité nationale memtœe.
Le
recours.
»
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