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La Rochefoucauld moraliste.

Publié le 20/06/2011

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La Rochefoucauld (1613-168o) fut d'abord un vaillant soldat et un frondeur. Déçu dans ses espérances politiqués, il fréquenta, de 1656 jusqu'à sa mort, les salons de Mme de Sablé, de Mme de La Fayette, etc. En 1665, il publia ses Maximes, qui lui donnent un des premiers rangs parmi les moralistes. La Rochefoucauld a une philosophie systématique, résumée dans la maxime n° 171: "Les vertus se perdent dans l'intérêt comme les fleuves dans la mer." L'amour-propre, au sens d'amour de soi, explique, selon lui, tout ce que nous prenons pour des actes de vertu. — Il y a du vrai dans ce pessimisme, en ce sens que nous nous abusons souvent sur la qualité de nos propres actes; mais La Rochefoucauld lui-même a reconnu, en adoucissant ses maximes dans la dernière édition, qu'il avait tort de généraliser, et que nier la vertu serait décourager l'effort loyal de tant d'honnêtes gens qui travaillent sans cesse à devenir meilleurs.

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« «On fait souvent du bien pour pouvoir impunément faire du mal.» «Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit.» (Ibid., 72, 121 et 210) La succession brillante de formules lapidaires ne doit masquer ni le projet ni la cohérence de l'ouvrage.

Sans avoirécrit un traité didactique, La Rochefoucauld brosse, par touches successives, à la manière d'un peintre, un portraitmoral et psychologique de l'homme. LES AVATARS DE L'AMOUR PROPRE Dans son exploration de l'homme, La Rochefoucauld aboutit à une idée fondamentale, celle de l'amour-propre.

Aprèsun épigraphe et une première maxime consacrés aux vices et aux vertus, cette notion constitue d'entrée de jeu lethème des maximes 2 à 4.

Mais c'est dans la maxime 563, particulièrement longue, que La Rochefoucauld développeavec précision la notion d'amour-propre : «L'amour-propre est l'amour de soi-même, et de toutes choses pour soi ; il rend les hommes idolâtres d'eux-mêmes,et les rendrait les tyrans des autres si la fortune leur en donnait les moyens ; il ne se repose jamais hors de soi, et ne s'arrête dans les sujets étrangers que comme lesabeilles sur les fleurs, pour en tirer ce qui lui est propre.» Ainsi l'amour-propre est le moteur de nombre de nos actions et gouverne tous nos sentiments.

C'est une forceomniprésente et omnipotente : «Il y a dans la jalousie plus d'amour-propre que d'amour.» «Nous ne ressentons nos biens et nos maux qu' à proportion de notre amour-propre.» (Maximes, 324 et 339) «Rien n'est si impérieux que ses désirs, rien de si caché que ses desseins, rien de si habile que ses conduites ; sessouplesses ne se peuvent représenter, ses transformations passent celles des métamorphoses et ses raffinementsceux de la chimie.

On ne peut sonder la profondeur, ni percer les ténèbres de ses abîmes.

[...] Il est tous lescontraires : il est impérieux et obéissant, sincère et dissimulé, miséricordieux et cruel, timide et audacieux [...].

Ilest dans tous les états de la vie, et dans toutes les conditions ; il vit partout, il vit de tout, il vit de rien.» (Ibid., 563) En réalité, la puissance de l'amour-propre est telle qu'il est à l'origine non seulement de nos vices mais aussi de nosvertus, ou prétendues telles : «Ce que les hommes ont nommé amitié n'est qu'une société, qu'un ménagement réciproque d'intérêts, et qu'unéchange de bons offices ; ce n'est enfin qu'un commerce où l'amour-propre se propose toujours quelque chose àgagner.» « La fidélité, qui paraît en la plupart des hommes n'est qu'une invention de l'amour-propre pour attirer la confiance.C'est un moyen de nous élever au-dessus des autres, et de nous rendre dépositaire des choses les plusimportantes.» (Ibid., 83 et 247) Car, pour La Rochefoucauld, il n'est guère de vertu qui ne soit en réalité vice, comme le dit d'emblée l'épigraphe : «Nos vertus ne sont le plus souvent que des vices déguisés.» Ce qu'il précise dans sa maxime 182 : «Les vices entrent dans la composition des vertus comme les poisons entrent dans la composition des remèdes.

Laprudence les assemble et les tempère, et elle s'en sert utilement contre les maux de la vie.» Oeuvre de vieillesse d'un homme désabusé, à qui ses échecs successifs ne laissent plus guère d'illusions sur leshommes, les Maximes reflètent une conception profondément pessimiste de la nature humaine.

Ni tout à fait bon ni tout à fait mauvais, l'homme, nous dit La Rochefoucauld, se fraie son chemin dans le monde usant des armes que luifournit l'amour-propre, armes que l'on qualifiera tantôt de vices, tantôt de vertus.

Et c'est dans cette constanteambivalence qu'on peut sans doute admettre la seule note positive des Maximes : le fait que chacun de nous veuille se parer des plus grandes qualités, déguiser le mal en bien, prouve que nous restons sensibles à la valeur du bien,même si nous sommes incapables de 1 ' atteindre : «L'hypocrisie est un hommage que le vice rend à la vertu.» (Ibid., 218). »

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