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Le langage poétique permet-il de transfigurer voire de sublimer la douleur ?

Publié le 22/02/2012

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  Introduction :               « Les plus désespérés sont les chants les plus beaux. Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots » écrit Alfred de Musset (1810-1857) dans sa Nuit de mai. La poésie par les thèmes qu'elles évoquent renvoie souvent à la douleur ou au ressenti de la mort c'est-à-dire à une émotion difficilement extériorisable dans toute sa complexité. Et pourtant, le poète parvient par le truchement du langage poétique à produire le beau à partir de ce qui semblerait s'en éloigner. Néanmoins, il est opportun de s'interroger sur cette volonté de traduire en mots cette douleur. Coucher sur le papier ses sentiments de douleur, ne serait-il pas le meilleur moyen de les dépasser en les verbalisant ? Dans ce cas, le langage poétique aurait cette vertu de transfigurer la douleur, c'est-à-dire de la métamorphoser voire de la rendre supportable et belle malgré l'effroi qu'elle évoque à travers la sublimation. C'est donc de l'essence et de la puissance du langage poétique qu'il est question.             Si le langage poétique permet de transfigurer voire de sublimer la douleur par la magie du verbe (1ère partie), celle-ci passe par la puissance de la symbolique (2nd partie) ce qui nous demande si justement la poésie ne serait pas fille de la douleur (3ème partie).
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« reflets d'argent, / Le mystérieux secret le secret éternel, / De la vie et du jour, de la nuit et du temps, / Avec toutmon amour je le mettrais à tes pieds.

/ Mais moi qui suis pauvre et n'ai que mes rêves,/ Sous tes pas je les aidéroulés.

/ Marche doucement car tu marches sur mes rêves ». Transition : Ainsi le langage poétique possède véritablement cette puissance ou cette capacité de transfigurer la douleur pouren faire du beau.

Néanmoins, cette sublimation passe-t-elle par la puissance évocatrice du symbole. II – De la symbolique comme sublimation a) Or le langage est par essence poétique, comme le dit Rousseau dans son Essai sur l'origine des langues « le sens propre fut trouvé le dernier […] D'abord on parla en poésie ».

Le langage n'est donc absolument pas en premierlieu instrumental : « On ne commença pas par raisonner, mais par sentir.

On prétend que les hommes inventèrent laparole pour exprimer leurs besoins ; cette opinion me paraît insoutenable.

[…] De cela seul suit que l'origine deslangues n'est point due aux premiers besoins des hommes […] Des besoins moraux, des passions.

Toutes lespassions rapprochent les hommes que la nécessité de chercher à vivre force à se fuir.

[…] des accents, des cris,des plaintes.

Voilà les plus anciens mots inventés, et voilà pourquoi les premières langues furent chantantes etpassionnées avant d'être simples et méthodiques.

» C'est pourquoi, le sens propre ne fut pas le premier puisqu'on neparla d'abord qu'en poésie.

Or quel est la vocation du poète ? Il est celui qui va au devant du divin, il recherche àrendre aux hommes l'accès possible aux signes divins.

Et il est bien alors un mystique ou ce magicien.

Le langage aalors une portée proprement ontologique.

En effet, la parole poétique place le poète face à l'être même.

Et c'estbien ce que l'on peut voir avec Mallarmé lorsqu'il parle de la poésie comme d'un chant qui convoque « la notion pure », « idée même et suave ».

Ce rôle de convocation est proprement révélateur et c'est là tout le pouvoir de lapoésie comme magie du langage. b) Il faut donc bien voir que les limites d'une certaine forme de langage qui ne seraient pas aptes à rendre comptede la douleur sont comblées elles-mêmes par une autre forme de langage : ici le langage artistique.

Et c'est bien ceque l'on peut voir dans §49 à §57 : avec les Idées esthétiques ou l'alliance gratuite entre imagination etentendement.

Par ailleurs, Kant , dans les paragraphes 49 et 57 de la Critique de la faculté de juger , parlait de la capacité créatrice de l'homme comme d'une capacité à montrer, grâce à des Idées esthétiques, l'indicible, même sipar-là on ne peut prétendre épuiser ce qu'elles nous "donnent à penser" ; et il nous montrait par-là qu'il y a unmoyen spécifique, ne dépendant pas du concept, de "montrer" ce qui ne se laisse pas mettre en discours.

Ce qui estde l'ordre de la figuration peut seul, apparemment, prétendre nous dire, mais pas sur le mode conceptuel, ce qui estabsolu, car n'étant pas alors assujettie au concept, l'imagination est libre.

La douleur fait justement partie de cetindicible ou du moins de cette incapacité qu'à le langage à le rendre proprement et c'est pourquoi l'évocation decelle-ci par la poésie permet justement son dépassement et sa transfiguration. c) Dans ce cas, si la sublimation fonctionne c'est parce qu'il faut en référer à la puissance symbolique de la poésie.Et de ce point de vue, il est alors intéressant de s'attacher la valeur du symbole et à sa théorisation comme le faitHegel dans l' Esthétique en tant que le langage peut faire signe vers autre chose que lui et c'est bien là sa fonction ; il est symbole donc vise autre chose que lui-même : « Le symbole est d'abord un signe.

Mais, dans lesigne proprement dit, le rapport qui unit le signe à la chose signifiée est arbitraire… Il en est tout autrement dusigne particulier qui constitue le symbole.

Le lien, par exemple, sera employé comme symbole de la magnanimité ; lerenard, de la ruse ; le cercle, comme symbole de l'éternité.

Mais le lion, le renard possèdent en eux-mêmes lesqualités dont ils doivent exprimer les sens… Ainsi, dans ces sortes de symboles, l'objet extérieur referme déjà en lui-même le sens à la représentation duquel il est employé.

» Il n'y a pas de rupture alors ni d'ineffable.

L'ineffable c'estl'indétermination, le flou, l'imprécis, l'obscur : « Ce qu'on nomme l'ineffable n'est autre chose que le non-vrai,l'irrationnel, ce que simplement on s'imagine.

» Hegel, Phénoménologie de l'esprit §463 .

Et peut-être sans doute pour cela que la poésie est le lieu de prédilection pour parler de la mort dans la mesure où elle est le seule modecapable de nous la figurer.

Perrier « Pour un vitrail » : « Lorsque la mort viendra / Je voudrais que ce soit comme aujourd'hui / Un grand soir droit laiteux et immobile/ Et surtout je voudrais/ Que tout se tienne bien tranquille/ Pourque j'entende/ Une dernière fois respirer cette terre/ Pendant que doucement s'écarteront de moi/ Les mainsaimées/ Qui m'attachent au monde ». Transition : Ainsi le symbole est véritable moyen de la poésie pour atteindre justement cette sublimation ou transfiguration afinde dépasser l'indicible du langage en donnant plus à attendre qu'à lire.

Mais face à cette difficulté d'apprécier lemonde ou de le dire : la poésie n'est-elle pas toujours issue d'une douleur ?. »

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