Devoir de Philosophie

Le mal - RIMBAUD. Poésies

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

rimbaud
Tandis que les crachats rouges de la mitraille Sifflent tout le jour par l'infini du ciel bleu ; Qu'écarlates ou verts, près du Roi qui les raille, Croulent les bataillons en masse dans le feu ; Tandis qu'une folie épouvantable broie Et fait de cent milliers d'hommes un tas fumant ; — Pauvres morts ! dans l'été, dans l'herbe, dans ta joie, Nature ! ô toi qui fis ces hommes saintement !... Il est un Dieu qui rit aux nappes damassées Des autels, à l'encens, aux grands calices d'or ; Qui dans le bercement des hosannah s'endort, Et se réveille, quand des mères, ramassées Dans l'angoisse, et pleurant sous leur vieux bonnet noir, Lui donnent un gros sou lié dans leur mouchoir ! RIMBAUD. Poésies, 1870 Les oppositions lexicales sont très nombreuses : les deux premiers quatrains évoquent la guerre, les deux tercets une vision de Dieu dans une église (mais il s'agit en fait d'une fausse opposition : il y a plutôt entre les deux visages du mal ainsi présentés une relation de cause à effet). L'opposition essentielle concerne les couleurs (le rouge de la guerre, le noir et l'or de l'église opposés au bleu du ciel infini) et les images de mort et de violence (crachats, croule, feu, tas fumant) contrastant avec l'atmosphère paisible de la nature (été, herbe, joie) : le sens profond du poème se trouve dans ces antithèses très calculées. Au premier vers on remarque une métaphore (« crachats rouges ») : c'est une comparaison où le mot « comme » est sous-entendu. La couleur rouge s'oppose avec d'autres couleurs, plus loin dans le texte : « le ciel bleu » par exemple, comme la violence humaine contrastant avec la sainteté de la Nature, et sa douceur. « Crachat » ici évoque à la fois un bruit et un sentiment : le mépris.

Liens utiles