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LE MATIN DU MONDE - Jules Supervielle

Publié le 17/01/2022

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supervielle
Alentour naissaient mille bruits Mais si pleins encor de silence Que l'oreille croyait ouïr Le chant de sa propre innocence. Tout vivait en se regardant, Miroir était le voisinage, Où chaque chose allait rêvant A l'éclosion de son âge. Les palmiers trouvant une forme Où balancer leur plaisir pur Appelaient de loin les oiseaux Pour leur montrer leurs dentelures. Un cheval blanc découvrait l'homme Qui s'avançait à petit bruit, Avec la Terre autour de lui Tournant pour son coeur astrologue. Le cheval bougeait les naseaux Puis hennissait comme en plein ciel, Et tout entouré d'irréel S'abandonnait à son galop. Dans la rue, des enfants, des femmes, A de beaux nuages pareils, S'assemblaient pour chercher leur âme Et passaient de l'ombre au soleil. Mille coqs traçaient de leurs chants Les frontières de la campagne Mais les vagues de l'océan Hésitaient entre vingt rivages. L'heure était si riche en rumeurs, En nageuses phosphorescentes Que les étoiles oublièrent Leurs reflets dans les eaux parlantes. Jules Supervielle, Gravitations, 1925. Vous ferez de ce poème un commentaire composé. Vous pourrez, par exemple, montrer comment de cette fresque à la fois visuelle et sonore se dégagent des impressions qui suggèrent le bonheur rêvé par le poète. INDICATIONS • La poésie de Jules Supervielle, et en particulier, le recueil Gravitations est souvent peuplée d'apparitions, de présences inattendues. • Le titre du poème Le Matin du Monde évoque la Genèse (création du Monde) biblique : le monde créé par Dieu est l'Eden, le Paradis terrestre, où tout est harmonie. C'est ce que nous retrouvons dans le monde rêvé par le poète. • Remarques rapides de forme : c'est un poème composé de huit quatrains d'octosyllabes. Les rimes sont régulières (croisées) dans les deux premières strophes (celles qui évoquent le mieux l'harmonie primitive) puis deviennent irrégulières, tantôt embrassées (5e quatrain), tantôt croisées (6e quatrain), tantôt mariées à des assonances (7e quatrain) ; on constate cependant que dans chaque quatrain deux vers au moins riment entre eux, ce qui maintient une constante à travers tout le poème.

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