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Le personnage d'Électre de Jean Giraudoux

Publié le 06/01/2020

Extrait du document

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haine qu'elle chemine vers l’hypothèse de l'assassinat de son père. Sans cette haine, Électre ne soumettrait pas sa mère à d'innombrables interrogatoires, qui finiront par lui faire découvrir la vérité. 

 

D’emblée Électre accuse sa mère d’avoir laissé tomber par terre Oreste enfant; elle cherche à faire avouer à Clytemnestre qu'elle ne s’est pas comportée en véritable mère (I,4). Elle la suspecte ensuite d'avoir un amant, dont elle veut à tout prix obtenir le nom (II, 6). L'aveu par Clytemnestre de sa liaison livre à Électre la clé de l'énigme : l'infidélité de Clytemnestre s'explique par le dégoût que la reine éprouvait pour le roi des rois. C'est ce dégoût, comprend Électre, qui est à l’origine du crime.

 

La haine d'Électre s'exerce immédiatement, sans cause bien définie à l'origine et qui ne se justifie que progressivement et après coup. Électre ne hait pas Clytemnestre parce qu'elle sait que celle-ci était une mauvaise mère. Elle la hait d'abord pour découvrir ensuite que c'était une mauvaise mère.

 

Électre ne sépare pas en définitive sa passion de la vérité de son rejet de sa mère.

 

Un comportement inquiétant

 

La pureté d'Électre soulève les mêmes interrogations. Clytemnestre la met en doute : « Cette fille, remarque-t-elle, que rongent les désirs nous parle de la chasteté. Cette fille qui, à deux ans, ne pouvait voir un garçon sans rougir » (1,9, p. 61). Comment en outre ne pas être troublé par la façon dont elle imagine son père se préparant à la concevoir : « J'aime comme il s'est dévêtu, de son beau vêtement de noces, comme il s’est couché, comme tout d'un coup pour m'engendrer il est sorti de ses pensées et de son corps même » (I,8, p, 56) ? Ne témoigne-t-elle pas enfin d'une curiosité malsaine quand elle contraint sa mère à lui détailler tes circonstances de sa naissance : « Tu veux m'entendre dire, lui réplique Clytemnestre, [...] que tu as été conçue dans la froideur? Sois satisfaite » (II, 5, p. 91).

 

Un psychanalyste n'aurait guère de peine à interpréter ces réactions comme l'expression d'une sexualité retardée ou

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« fouillera le passé de sa nouvelle famille, et que ne découvrira+ elle pas (1, 2, p.

24)? Électre est une déterreuse de secrets concer­ nant les autres et elle-même.

Pourquoi, se demande-t-elle, hait­ elle sa mère (1, 8, p.

57)? Quels étaient les rapports entre ses parents? À l'origine de son exigence est son refus des compromis et des mensonges.

Comme elle l'explique au mendiant au début de l'acte Il (p.

75), elle préfère au jour la lumière de la vérité.

Le soleil ne doit pas seulement éclairer les visages : il doit aussi les révéler tels qu'ils sont, dans leur bassesse ou leur grandeur.

C'est pour elle affaire de« dignité humaine» (Il, 8, p.

117).

Le mendiant n'a pas tort de la qualifier de« menagère de la vérité » (1, 13, p.

70).

Son exemple est d'ailleurs contagieux.

Agathe le suit, quand, entonnant la « chanson des épouses» (Il, 6, p.

95) elle clame sa haine d'un mari trop bête et trop vieux: « Fini le mensonge.

Électre a raison.

Je passe dans son camp » (p.

95).

Oui pourrait reprocher à Électre son goût de l'absolu et du vrai? Une exigence de pureté S'y ajoute un idéal de pureté.

Électre signifie en grec (alektra) la « non-mariée »; et sa pureté réside d'abord dans sa virginité qu'elle assume fièrement, telle une prêtresse attachée au culte d'une divinité.

Le« droit d'entrée» dans« la confrérie des femmes[ ...

] qui est d'admettre que les femmes sont faibles, menteuses, basses » (11, 5, p.

91) lui semble trop élevé.

L'image de la femme que lui renvoient Agathe et Clytemnestre, toutes deux infidèles à leurs maris respectifs 1 n'a certes rien d'exaltant.

Aussi les vierges, nombreuses dans le théâtre de Jean Giraudoux 2, symbolisent­ elles l'innocence et la liberté.

La pureté morale va de pair avec la pureté physique.

Électre condamne toute forme de lâcheté, aussi bien individuelle que collective.

Un rêve de sainteté l'anime.

Les valeurs éthiques lui paraissent plus essentielles que la réussite et la prospérité matérielles.

Quand Égisthe insiste sur l'urgence de protéger les habitants d'Argos contre l'attaque des Corinthiens, elle lui oppose la nécessité de sauver d'abord leur« regard» (Il, 8, p.

119), 1.

Clytemnestre avait pris Égisthe pour amant du vivant d'Agamemnon.

2.

Par exemple dans Judith.. »

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