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Le portrait de Lisa dans Le ventre de Paris d'Emile Zola

Publié le 03/01/2012

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Dans la continuité de la somme exhaustive et foisonnante que constitue l’entreprise balzacienne, les Rougon-Macquart, « histoire naturelle et sociale d’une famille sous le second Empire «, permet à Emile Zola de mettre en pratique les théories naturalistes du roman expérimental et de montrer l’influence qu’exercent l’hérédité et le milieu sur l’individu. Le Ventre de Paris, troisième tome, publié en 1873, prend place dans le bouillonnement qui régnait aux Halles, alors en pleine expansion, et s’inscrit dans l’histoire familiale par la présence de Lisa, fille d’Antoine Macquart et épouse du charcutier Quenu auprès de qui Florent, évadé du bagne, affamé, vient se réfugier. L’extrait nous présente le jeune homme qui, après avoir longuement contemplé la boutique et ses victuailles, pose son regard sur la charcutière. Comment Zola propose-t-il un portrait à la fois esthétique et symbolique de la « belle « Lisa ? Nous analyserons d’abord l’image lisse mais enthousiaste que perçoit Florent pour mieux mesurer ensuite le traitement pictural impressionniste que donne à voir l’auteur. Enfin nous montrerons comment Zola, à travers une ironie permanente, fait de ce portrait une charge qui révèle les thèses naturalistes.

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« Enfin, la perception de Florent se referme sur une qualité morale : « elle avait un air d’une grande honnêteté ».

Cette sentence finale, au jugement à nouveau lapidaire, clôt l’extrait mais demeure essentielle à la personnalité de la charcutière.

Elle est soulignée par l’hyperbole « grande honnêteté ».

En effet, Lisa est une commerçante.

La prospérité de sa boutique participe sans doute de sa beauté et de son calme jovial mais surtout de la confiance que lui accorde sa clientèle.

Les signes extérieurs de sa respectabilité sont donc immédiatement visibles.

Sa tenue fait l’objet d’un développement à part pour accentuer son caractère irréprochable.

Les moindres aspects de sa toilette sont prétextes à une analyse poussée qui prend la forme d’une revue de détails.

Une phrase longue, complexe illustre ce souci de précision en insistant sur des parallélismes de construction marqués par la répétition de l’adjectif « blanche ».

L’uniforme réglementaire est de mise pour encourager la venue de la clientèle.

Son ordonnancement parfait traduit le contrôle que Lisa a sur elle-même et sur ce qui l’entoure.

Il est renforcé par le champ lexical de la propreté mettant en évidence une moralité sans tache que les adjectifs « sérieuse » et « graves » accentuent.

De plus, les verbes d’état soulignent ces qualités données comme intrinsèques. Lisa nous apparaît ainsi lisse, sans aucune aspérité, sous le regard pénétrant de Florent qui en propose un portrait laudatif mettant en valeur les qualités inhérentes à son métier.

Cependant, si la description d’une profession est un topos naturaliste, elle fait également l’objet d’un traitement esthétique. L’influence qu’exercent les impressionnistes sur le naturalisme est prépondérante.

Rappelons seulement l’amitié qui unit Zola et Cézanne dès leurs jeunes années en Provence et les rencontres permises par ce dernier avec Manet puis Monet.

Soulignons aussi que le romancier commence sa carrière littéraire comme critique d’art et défend cette nouvelle expression de la peinture avec vigueur et constance s’opposant ainsi à la presque totalité de ses contemporains. Préalable au travail esthétique, le tableau requiert une organisation précise afin que notre regard puisse se focaliser sur un élément central.

Le texte obéit donc à une structure très hiérarchisée que souligne sa progression.

L’extrait présente d’abord une impression d’ensemble pour mettre en valeur le personnage principal incarnée par la charcutière.

Cet aperçu fait ensuite l’objet d’un détail systématique dont nous avons rendu compte dans la première partie.

Enfin, toutes les qualités sont résumées dans l’avant-dernière phrase pour mieux se fondre dans la sentence finale à connotation morale.

Notre regard passe ainsi du général au particulier et revient à une vision globale.

Même les détails sont ordonnés de haut en bas puis de bas en haut : nous sommes conviés à examiner successivement le visage, le cou, les bras, les jambes, les pieds avant de remonter aux épaules qui permettent de nous arrêter plus longuement sur la poitrine.

De plus, notons la double opposition entre la verticalité suggérée par Lisa et l’horizontalité marquée par le « seuil » et l’étal, et la droiture, physique et morale, de ce personnage qui contraste avec les courbes de son corps.

Ainsi une telle organisation prépare-t-elle le lecteur à porter toute son attention sur la jeune femme, l’arrière-plan étant celui de la boutique. Le traitement de la lumière est caractéristique du travail du peintre impressionniste.

Zola s’exécute non sans une certaine maestria.

Le soleil darde ainsi de tous ses rayons le portrait de Lisa.

Nous relevons une répétition du substantif qui introduit le champ lexical de la lumière prolongé par le nom « clarté » et l’expression « bain de lumière ».

Le soleil apparaît ainsi au début et à la fin de l’extrait, encadrant, irradiant, transperçant Lisa comme pour l’auréoler d’une aura divine et accentuant, grâce à l’omniprésence du blanc, l’éblouissement de Florent.

La lumière s’inscrit également dans un jeu de reflets qui met en relief son intensité.

L’eau est le révélateur le plus employé par les peintres impressionnistes pour ses qualités dissolvantes qui redoublent les propriétés de transparence.

De fait une impression de translucidité émane de Lisa dont la chair est décrite par l’expression une « blancheur transparente », accentuée par l’adjectif démonstratif « cette » et la graisse des viandes caractéristique.

Cependant, si l’eau est absente du tableau puisque nous sommes dans la charcuterie, Zola en donne une évocation suggestive avec les antithèses « trempée de clarté » et « bain de lumière ».

L’éclat conféré par la lumière met donc en relief la. »

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