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Le thème de la SOLITUDE dans la littéraure

Publié le 20/06/2012

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Le mot ermite signifie solitaire; le choix de la vie religieuse

suppose le renoncement au monde et inclut, conjointement

à d'autres règles, celle du célibat; et dans la vie

conventuelle, de nombreuses heures sont consacrées à la

méditation solitaire. L'ascèse religieuse, par laquelle le

croyant s'efforce de faire le vide en lui-même, dans l'attente

d'une grâce qui l'emplira de la présence d'un Dieu infini,

fait de la solitude une voie royale; et dans l'extase, point

extrême de la quête, le mystique s'anéantit; les vérités qu'il

découvre alors sont, pour reprendre les termes de Pascal,

«d'un autre ordre, surnaturel«.

Solitude et culte du moi

L'idée que se faisaient de leur mission les poètes romantiques

ouvrait très largement leur solitude. Mais la littérature

de la fin du XIX• siècle donne l'exemple d'un mouvement

inverse. Tout entière orientée vers l'analyse de soi, la

recherche d'une lucidité toujours plus grande- que n'équilibre

pas, comme chez Montaigne, le sentiment que «chaque

homme porte la forme entière de l'humaine condition

« 4 de grandeur.

La tradition religieuse d'abord : Jésus se retire au désert, et dans l'histoire de l'Église chrétienne, combien de saints ermites, pour qui la solitude est condition essen­ tielle de l'ascèse! Le chevalier du Moyen Âge est seul pen­ dant la veillée d'armes; les rois, les grands de ce monde, sont seuls, comme les grands fauves: car la symbolique s'étend au règne animal et végétal.

Le lion est le roi des animaux, redoutable et vénéré; le chêne solitaire, roi des arbres.

Signe de force, d'essentielle originalité {celui qui est à l'écart de la foule est au-dessus de la foule, du troupeau, dont « l'instinct grégaire », « l'esprit moutonnier » symbolisent l'irrémédiable faiblesse), la solitude est sainte : sans elle, point de grandeur.

Si, cessant d'envisager la solitude comme un destin, nous la voyons comme une situation humaine, de nouvelles ambi­ valences vont apparaitre.

«Description de l'homme : dépen­ dance, désir d'indépendance, besoin», écrit Pascal 1 • La solitude pose en effet le problème fondamental de la relation entre moi et autrui.

Sur le plan de l'action, mon existence est limitée par celle des autres; mais sans les autres, je n'existe pas.

Et ce qui est vrai de l'action l'est aussi des autres facultés humaines, même de la pensée : après des mois de vie solitaire, le Robinson de Michel Tournier 2 reconnaît à peine l'image que lui renvoie un miroir, et ne sait plus sourire; c'est son chien qui le lui réapprendra: «Et le chien lui souriait, la tête inclinée, et son sourire de chien se reflétait de jour en jour plus distinctement sur le visage humain de son maitre.

» Le thème du double, si fréquent dans la littérature, répond à ce besoin d'inventer, faute d'avoir pu le découvrir dans la réalité, un autre soi­ même, qui rende possible une relation d'échange, rétablisse le lien vital du dialogue, et sauve l'homme du désespoir et de la folie.

Besoin de solitude, car les autres me font éprouver ma dépendance; mais besoin de relation, car les autres me confirment dans mon existence : l'équilibre est fragile entre ces deux aspirations contradictoires.

Dans la société et selon la terminologie modernes, l'incapacité de trouver cet équilibre ou sa rupture donnent naissance à une «névrose»; dans les siècles passés, on parlait de «misanthropie».

1 PASCAL, Pensées, Section II, 126 (Brunschvicg).

2 MICHEL TOURNIER, Vendredi ou Les Limbes du Pacifique, Gallimard éd.. »

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