Leconte de Lisle : « Paysage polaire »
Publié le 09/11/2018
Extrait du document

C'est un lieu de souffrance et de tourment : cf « éperdument » (vers 4) c'est-à-dire à la façon de quelqu'un qui a l'esprit profondément troublé par une émotion violente, « clameurs », « sanglots », « cris aigus », « râles » (bruit rauque de la respiration au seuil de la mort).
En effet, c'est aussi un lieu de mort comme l'indiquent déjà le premier vers mais aussi l'adjectif « sépulcrales ». C'en enfin un monde où règnent des dieux figés dans leur froide impuissance, ce qui constitue une image inédite de l'enfer.
Conclusion
Voilà le tableau d'une vie élémentaire, étrangère à notre civilisation, arrêtée dans une éternité de rigueur et de souffrance dépourvue de tout espoir.
Peint avec une totale impassibilité de la part de l'auteur, ce sonnet manifeste le souci d'une grande rigueur formelle et d'une expression plastique de son inspiration.
Leconte de Lisle manifeste ici son goût de l' »exotisme », entendu au sens large que lui confère l'étymologie
(« goût des choses concernant des pays lointains et n'appartenant pas à notre civilisation », Robert).
Il rend ainsi évidente son appartenance au mouvement parnassien.
Ce qui habituellement est caractérisé par la stabilité l'est ici par le mouvement : « pics convulsifs étirés en spirales », et l'enjambement des vers 3-4 souligne l'élan.
Les repères temporels sont perturbés : cet univers surgit ou plutôt ressurgit d'un passé immémorial : cf « les Dieux brumeux des vieilles races » (v.10), les neiges « antiques », pour s'établir dans un présent éternel que fixent, dans chaque strophe les formes verbales du présent.
3/ Un univers proprement infernal
Le mot « enfer » apparaît, à la rime du vers 5. Il est annoncé par l'adjectif « spectrales », à la rime du vers 2, et repris par les adjectifs « sépulcrales » à la rime du vers 6 et « sinistre », vers 8, c'est-à-dire étymologiquement de mauvais augure, « qui fait craindre un malheur ».

«
Transition
Nous avons bien affaire à un « paysage » au sens pictural du terme, représentant des lieux étrangers sans doute à
l’expérience du poète (il ne donne aucun indice précis de localisation), étrangers en tout cas à celle de la majorité
des lecteurs.
D’ailleurs, le poète ne souligne-t -il pas sa volonté d’accuser l’étrangeté de ce paysage ?
II/ Un monde paradoxal
1/ Un monde « mort »
Ce sonnet évoque un monde « mort » d’où la vie n’est pourtant pas absente.
Le sol, par la métaphore du vers 1, ne paraît être qu’ « écume de mer », c’est-à-dire une matière sans consistance
et, qui plus est, inféconde du fait de l’absence de soleil : l’hypallage du vers 2, « ombre stérile » le souligne.
Toute vie végétale comme toute vie humaine sont absentes.
Pourtant la vie existe : la vie animale (« les grands ours ») et surtout celle des éléments de la nature dans lesquels
elle paraît s’être réfugiée : les « pics » sont atteints de convulsions, ils s’avancent dans le brouillard, ils sont
éperdus, c’est-à-dire profondément troublés, dans leur esprit, par une émotion violente.
Un processus de
personnification est donc à l’œuvre.
De même pour l’évocation du vent qui « arrache à son clairon » « les rires, les sanglots, les cris aigus, les râles ».
2/ Emotion et souffrance
Ce même
alexandrin réunit deux par deux, de part et d’autre de la césure des sons opposés.
De plus, le premier hémistiche évoque des émotions tandis que le second évoque la souffrance ; la distribution des
accents toniques souligne cette opposition (2 + 4 / 4= 2) : « Les rires, les sanglots // les cris aigus, les râles ».
3/ Mouvement et immobilité
Tous les éléments du paysage sont en mouvement, mais les dieux sont dans une immobilité cadavérique : « se
roidissent », « congelés », « lividité ».
Dans ce paysage de désolation, il est étonnant que surgisse le mot de « volupté » qui clôt le poème.
Transition
Nous constatons que s’opère une métamorphose de la réalité.
Celle -ci nous introduit dans un monde qui n’est pas
celui où nous vivons habituellement – et non pas seulement pour de simples raisons géographiques.
III/ Un monde fantastique
1/ Une vision pathologique, source d’inquiétude
Les pics sont atteints de convulsions, les dieux ont la « lividité » des cadavres, les grands ours sont
« épileptiques ».
L’hypallage du vers 13 et, de ce fait, la place de cet adjectif à la rime soulignent l’importance de ces manifestations
paroxystiques qui rappellent les pics « convulsifs » du vers 3.
L’inquiétude s’exprime à travers une vie animale étrange et inquiétante, la persistance d’un grondement sourd à
travers
tout le poème du fait de la récurrence de sons vocaliques nasalisés audibles dès le premier vers où ils sont
soutenus par l’allitération en « m ».
On les retrouve à chaque vers, sauf au vers 10, et parfois à plusieurs reprises dans un même vers (notamment
vers 4,9 et 13).
2/ Un monde insolite qui n’obéit pas aux lois naturelles
Les éléments perdent leurs caractéristiques habituelles : la mer, le ciel, le vent se minéralisent (cf « écume », mot
ambigu qui peut désigner aussi le silicate naturel de magnésium, « rugueux » et « blocs », « fer »).
Les bruits sont aussi matériels que des oiseaux qui « passent à plein vol » (vers 6).
Le « clairon », qui n’est pas de cuivre, est dans l’impossibilité de sonner harmonieusement.
Ce qui habituellement est caractérisé par la stabilité l’est ici par le mouvement : « pics convulsifs étirés en
spirales », et l’enjambement des vers 3-4 souligne l’élan.
Les repères temporels sont perturbés : cet univers surgit ou plutôt ressurgit d’un passé immémorial : cf « les Dieux
brumeux des vieilles races » (v.10), les neiges « antiques », pour s’établir dans un présent éternel que fixent, dans
chaque strophe les formes verbales du présent.
3/ Un univers proprement infernal
Le mot « enfer » apparaît, à la rime du vers 5.
Il est annoncé par l’adjectif « spectrales », à la rime
du vers 2, et repris par les adjectifs « sépulcrales » à la rime du vers 6 et « sinistre », vers 8, c’est-à-dire
étymologiquement de mauvais augure, « qui fait craindre un malheur »..
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