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LES CAFÉS LITTÉRAIRES

Publié le 21/11/2018

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CAFÉS LITTÉRAIRES (Paris, xviiie-xxe siècle). Le mot café, d’origine arabe, écrit indifféremment « caphé », « caffé », « café », apparaît au milieu du xvue siècle pour désigner la boisson extraite de la fève du caféier. A la fin du xviie siècle, il s’applique par métonymie au local où cette boisson est servie : d’abord « cabaret de café » (Furetière), « maison de café » (Bayle), enfin « café » {le Café, comédie de J.-B. Rousseau, 1694). Les premiers cafés furent ouverts à Marseille, par où le produit arrivait en France, puis vers 1670 à Paris, où Francesco Procopio créa en 1675 un établissement qui devait devenir célèbre : le Café Procope. Au début du xviiie siècle, ils se multiplièrent; outre le Procope, rue des Fossés-Saint-Germain, véritable foyer officieux de la Comédie-Française, sa voisine de 1687 à 1770, il faut citer le Café de Gantois, rue Mazarine (cf. Mailly, les Entretiens des cafés de Paris, 1702), le Café Laurent, rue Dauphine, le Café de la Régence au Palais-Royal, où Diderot situera le dialogue de son Neveu de Rameau.

 

Entre les salons aristocratiques, à direction féminine, et les cabarets populaires, le café occupe un créneau stratégique dans la société du siècle des Lumières. Autour d’une boisson jugée intellectuellement stimulante (cf. Tissot, De la santé des gens de lettres, 1768, qui en déplore pourtant l’abus), dans un lieu à clientèle exclusivement masculine et qui devient leur territoire propre, les « gens à talents » de la République des Lettres éprouvent leur identité, trouvent un confort relatif, discutent politique et littérature, jouent aux échecs ou aux dames, échangent des informations que recueillent les nouvellistes aux aguets comme le Frélon de Voltaire (le Café ou l'Écossaise, 1760) [voir FréronJ. Le café prend ainsi l’allure d’une véritable institution, une « espèce de tribunal » (Marmontel), un « bureau académique » (Mercier) toujours prêt à faire tomber les pièces nouvelles : les chefs de claque, Mouhy, La Morlière, y recrutent leurs agents, et les auteurs doivent filer doux : « Le café m’avait paru dans les meilleures dispositions pour moi » (Beaumarchais, le Barbier de Séville, 1775).

 

Vers le milieu du siècle, le café devient un forum informel où se débattent les idées et se nouent les solidarités philosophiques. Au Procope notamment, Diderot, Voltaire, d’Alembert, Marmontel côtoient poètes faméliques, marginaux cultivés comme le célèbre Neveu, sans oublier les espions de police chargés de surveiller ces foyers d’agitation : pour dépister les indiscrets, Marmontel et Boindin conviennent d’un code où Dieu s’appelle « M. de l’Etre », l’âme « Margot » et la liberté « Jeanne-ton ». D’après Mercier qui les décrit comme « le refuge ordinaire des oisifs et l’asile des indigents » (Tableau de Paris, 1783, chap. lxxi), on compte à la fin du xvme siècle « six à sept cents » de ces établissements dans la capitale. Mais sous la Révolution ils perdirent de leur importance et de leur pouvoir au profit des clubs.

 

Le XIXe siècle vit leur éclatement. Certains se spécialisèrent dans la bohème littéraire (Murger, puis Verlaine paraîtront au Procope), le public étudiant (la Mère Moreaux), les gens de théâtre (le Café des Variétés, faubourg Montmartre, qui en 1817 donnera son titre à une

« pièce de Scribe), d'autres dans la clientèle mondaine et demi-mondaine : la Maison Dorée où Dumas possède son cabinet attitré, le Café Anglais, Tortoni sur les boule­ vards.

L'Occupation devait ressusciter, par nécessité.

l'institution du café littéraire: au Flore et aux Deux Magots, les intellectuels parisiens trouvèrent, de 1940 à 1944, le minimum de bien-être dont ils étaient privés chez eux par la dureté des temps (cf.

S.

de Beauvoir, la Force de l'âge).

[Voir aussi BoHÈMEj.

BIBLIOGRAPHIE Aux ouvrages cités dans J'article, il convient d'a j ou te r G.

de Wissant, Cafés er cabarets, Paris, Tallandier, 1928: J.

Mou ra et P.

Louvet, le Café Procope, Paris, Perrin.

1929.

J.-P.

DE BEAUMARCHAIS. »

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