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Les Châtiments, Livre V, 13 (v. 1 à 28). L'EXPIATION - HUGO

Publié le 14/03/2015

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Lecture méthodique

 

L'EXPIATION

Il neigeait. On était vaincu par sa conquête. Pour la première fois l'aigle baissait la tête. Sombres jours ! l'empereur revenait lentement, Laissant derrière lui brûler Moscou fumant.

5            Il neigeait. L'âpre hiver fondait en avalanche. Après la plaine blanche une autre plaine blanche. On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau. Hier la grande armée, et maintenant troupeau. On ne distinguait plus les ailes ni le centre :

10   Il neigeait. Les blessés s'abritaient dans le ventre

Des chevaux morts ; au seuil des bivouacs désolés

On voyait des clairons à leur poste gelés

Restés debout, en selle et muets, blancs de givre,

Collant leur bouche en pierre aux trompettes de cuivre.

15     Boulets, mitraille, obus, mêlés aux flocons blancs, Pleuvaient; les grenadiers, surpris d'être tremblants, Marchaient pensifs, la glace à leur moustache grise. Il neigeait, il neigeait toujours ! la froide bise Sifflait ; sur le verglas, dans des lieux inconnus,

20     On n'avait pas de pain et l'on allait pieds nus.

Ce n'étaient plus des coeurs vivants, des gens de guerre;

C'était un rêve errant dans la brume, un mystère,

Une procession d'ombres sous le ciel noir.

La solitude vaste, épouvantable à voir

25         Partout apparaissait, muette vengeresse. Le ciel faisait sans bruit avec la neige épaisse Pour cette immense armée un immense linceul. Et, chacun se sentant mourir, on était seul.

Jersey. 30 novembre 1852.

[25-30/11/1852]

Les Châtiments, Livre V, 13 (v. 1 à 28).

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« INTRODUCTION Situation du passage Le long poème intitulé« L'expiation »est placé à la fin du cinquième livre.

Ce texte justifie en partie le titre des Châtiments.

Hugo reconstitue en une vaste fresque les épisodes les plus dra­ matiques de vie de Napoléon 1er.

Ces épisodes sont reliés les uns aux autres par une ligne directrice.

Parce qu'il a accédé au pou­ voir par un coup d'État (celui du 18 brumaire de l'an Vlll 1), Napoléon 1er a attiré sur lui la colère de Dieu.

Chaque fois que le sort semble s'acharner contre lui, 1 croit que l'heure du châtiment est venue.

Mais la punition que Dieu lui réserve n'est pas la retraite de Russie.

Ce n'est pas non plus la défaite de Waterloo, ni même l'exil sur l'île de Sainte-Hélène.

C'est une humiliation plus cruelle encore.

Napoléon 1er doit voir, après sa mort, son nom déshonoré par Napoléon 111.

La première partie de ce poème est consacrée à la retraite de Russie.

Celle-ci eut lieu à la fin de l'année 1812.

Après avoir tra­ versé la plaine russe pendant l'été, Napoléon parvint à entrer avec ses troupes dans Moscou.

Mais l'occupation de la capitale ne lui fut d'aucun profit.

La ville avait été abandonnée par la population.

Elle fut incendiée par les Russes eux-mêmes.

Le 19 octobre, le tsar Alexandre ne faisant aucune offre de paix, Bonaparte prit la décision de quitter la Russie.

L'hiver pré­ coce, les attaques continuelles, l'absence d'équipement 2 firent de cette retraite un désastre.

Ce fut la première défaite de la « grande armée »3 .

Axes de lecture Dans ces vers (il s'agit d'alexandrins), Hugo campe un décor grandiose et désolé, dans lequel piétinent les soldats.

L'hostilité du paysage nous fait comprendre le courage héroïque de l'armée.

1.

Le« 18 brumaire de l'an VIII» du calendrier révolutionnaire corres­ pond au 3 novembre 1799.

Bonaparte (qui n'était encore que général) organisa le coup d'Etat qui renversa le Directoire.

Le 19 brumaire (ou le 4 novembre 1799), les pouvoirs étaient confiés à trois consuls: Bonaparte, Sieyes et Roger Ducos.

2.

L'armée était entrée en Russie au mois d'août.

Les soldats n'avaient pas de vêtements chauds pour se protéger du froid.

3.

Nom donné à l'armée de Napoléon 1er 150. »

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