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« Les embarras de Paris » Satires (1666) de Boileau

Publié le 16/11/2011

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1     Tout conspire à la fois à troubler mon repos,        Et je me plains ici du moindre de mes maux :        Car à peine les coqs, commençant leur ramage,        Auront des cris aigus frappé le voisinage 5     Qu'un affreux serrurier, laborieux Vulcain,        Qu'éveillera bientôt l'ardente soif du gain,        Avec un fer maudit, qu'à grand bruit il apprête,        De cent coups de marteau me va fendre la tête.        J'entends déjà partout les charrettes courir, 10   Les maçons travailler, les boutiques s'ouvrir :        Tandis que dans les airs mille cloches émues        D'un funèbre concert font retentir les nues ;        Et, se mêlant au bruit de la grêle et des vents,        Pour honorer les morts font mourir les vivants. 15  Encor je bénirais la bonté souveraine,       Si le ciel à ces maux avait borné ma peine ;       Mais si, seul en mon lit, je peste avec raison,       C'est encor pis vingt fois en quittant la maison ;

      En quelque endroit que j'aille, il faut fendre la presse 20  D'un peuple d'importuns qui fourmillent sans cesse.       L'un me heurte d'un ais dont je suis tout froissé ;       Je vois d'un autre coup mon chapeau renversé.       Là, d'un enterrement la funèbre ordonnance       D'un pas lugubre et lent vers l'église s'avance ; 25  Et plus loin des laquais l'un l'autre s'agaçants,       Font aboyer les chiens et jurer les passants.       Des paveurs en ce lieu me bouchent le passage ;       Là, je trouve une croix de funeste présage,       Et des couvreurs grimpés au toit d'une maison 30  En font pleuvoir l'ardoise et la tuile à foison.       Là, sur une charrette une poutre branlante       Vient menaçant de loin la foule qu'elle augmente ;       Six chevaux attelés à ce fardeau pesant       Ont peine à l'émouvoir sur le pavé glissant. […]

 

 

 

BOILEAU, Satires (1666), « Les embarras de Paris «

 

Nicolas Boileau (1636-1711) est un écrivain qui prend parti pour les Anciens dans la querelle des Anciens et des Modernes. C’est dans cette perspective qu’il imite Juvénal, un poète de l’antiquité romaine. Ainsi, il s’inspire de ses Satires, et notamment, d’un poème intitulé « Les embarras de Rome «, qu’il rebaptise « Les embarras de Paris «. L’extrait de ce texte que nous allons étudier tient à la fois de la facture classique par sa versification régulière (trente-quatre alexandrins aux rimes plates) et de l’inspiration antique par le thème de la ville infernale, Paris se substituant à Rome. Nous pouvons alors nous demander en quoi ce poème est une satire de la ville. Nous analyserons tout d’abord le ton satirique et léger de ce texte, puis, la critique des bruits urbains, et enfin la dénonciation d’une surpopulation dangereuse.

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« BOILEAU, Satires (1666), « Les embarras de Paris » Introduction : Nicolas Boileau (1636-1711) est un écrivain qui prend parti pour les Anciens dans la querelle des Anciens et des Modernes.

C’est dans cette perspective qu’il imite Juvénal, un poète de l’antiquité romaine.

Ainsi, il s’inspire de ses Satires, et notamment, d’un poème intitulé « Les embarras de Rome », qu’il rebaptise « Les embarras de Paris ».

L’extrait de ce texte que nous allons étudier tient à la fois de la facture classique par sa versification régulière (trente-quatre alexandrins aux rimes plates) et de l’inspiration antique par le thème de la ville infernale, Paris se substituant à Rome.

Nous pouvons alors nous demander en quoi ce poème est une satire de la ville.

Nous analyserons tout d’abord le ton satirique et léger de ce texte, puis, la critique des bruits urbains, et enfin la dénonciation d’une surpopulation dangereuse. I/- Le ton sarcastique et léger de la satire A) L’expression d’un mécontentement personnel - Présence de la première personne : « mon » (vers 1), « Je » et « me » (vers 2) : le poète exprime sa subjectivité. - Le Poème exprime divers sentiments qui montent crescendo : « moindre de mes maux », (vers 2), « pis vingt foi » (vers 18). - Il commence par une plainte.

Champs lexical : « je me plains » (vers 2), « maux » (vers 2), « maux » et « peine » (vers 16).

Cette plainte a une origine : il ne peut jamais être tranquille en ville, il y a toujours un élément qui vient troubler son repos : « Tout conspire à la fois à troubler mon repos » (vers 1).

Nous pouvons déjà noter une hyperbole humoristique avec l’emploi excessif du pronom indéfini « tout » et de la locution adverbiale « à la fois ». - La plainte laisse transparaître son agacement dans la 1 ère strophe et sa colère dans la 2 ème strophe (« je peste avec raison », vers 17). - La dimension lyrique de ce poème (1 ère personne et expression des sentiments semble donc factice : nous sommes loin de l’expression de la tristesse et de la mélancolie.

Ici, Boileau exprime des sentiments prosaïques sur un ton léger et sarcastique, respectant ainsi le détournement et l’ironie de la satire. B) Un ton léger et décalé - Le ton choisi est léger : avec les embarras de Paris nous sommes loin de motifs tels que la mort ou la fuite du temps. - Boileau peut donc se permettre d’utiliser un ton léger et décaler : il va amplifier les désagréments de la ville pour les fustiger et exagérer son mécontentement pour nous. »

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