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Les orientales - L'enfant de Victor Hugo (fiche de lecture)

Publié le 22/02/2012

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Or la guerre reflète aussi les sinistres profondeurs de l'être humain. Il semble falloir être un monstre pour décider ou faire la guerre. Ainsi, l'ellipse initiale frappe aussi par le sentiment d'implacabilité et d'impitoyabilité qu'elle dégage, comme si le guerrier n'était plus un homme mais une machine dénuée de raison et de sentiment. D'ailleurs, l'allitération en K dans la première strophe (turcs, chio, qu' qui, coteaux, quelquefois, ch½ur) renforce cette impression de dureté. En outre, la guerre ici a ravagé une île grecque. Or la Grèce était considérée comme le berceau de la civilisation et de la démocratie, et détruire ce berceau, c'est également détruire ce qui est humain en l'homme, c'est-à-dire les arts et les sciences qui différencient l'homme de l'animal. Il ne reste alors que « le roc anguleux », évocateurs des premières cavernes.
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« allusions à des plantes de ces pays orientaux, le tuba ou le lys, par exemple.

D'ailleurs de nombreux écrivains decette époque utilisaient la transposition de leurs Histoires dans des pays lointains afin de critiquer et de dénoncerles régimes politiques d'Europe et leurs actions sans craindre la censure, ou pire encore. Mais cette Nature a beaucoup souffert de la guerre : tant la flore, la faune que les habitants de l'île ont étémassacrés.

L'île n'est plus qu'un « sombre écueil » sur lequel « tout est ruine et deuil », ce monde « n'est plus qu'undésert ».

L'emploi du passé montre ici l'abattement de Hugo devant la guerre, mais dénonce aussi par là la cruautédes ravages perpétrés par les hommes et leurs guerres.

La beauté de la Nature est détruite sans raison et cettedernière devient une victime impuissante de tous ces méfaits.Il ne reste des splendides « palais » , « charmilles », « grands bois », qu'une fleur, « une blanche aubépine », ayantéchappé par miracle aux carnages : elle a été « oubliée ».

Le poète, qui semble s'adresser à un enfant pour donnerun ton plus poignant à ce poème, est obligé de promettre à ce dernier des merveilles de la nature que l'on trouvedans les pays voisins de la péninsule arabique, comme le lys ou le tuba, ou encore « un bel oiseau » qui conjugueraità lui seul la douceur du hautbois et l'énergie des cymbales. Cette nostalgie et cette beauté entraînent l'auteur à espérer un renouveau de cette nature blessée.

On ressent cetespoir grâce à des hyperboles « Qu'un cheval au galop met, toujours en courant, cent ans à sortir de […l' ]ombre [du tuba] » et des adjectif élogieux, « merveilleux… » et à des répétitions de l'adjectif « belle » ou del'adverbe « gaiement ».

Cet espoir permet de croire que la guerre n'aura pas le dernier mot et que la renaissance estpossible. Cet espoir est surtout présent à travers l'enfant lui même.

L'auteur s'attarde à espérer que cet enfant rescapé dumassacre est innocent et qu'il sera reconnaissant envers la nature pour tous ses soins.

On constate que la natureest réconfortante et omniprésente.

Elle est un « asile » pour l'enfant qui y revient toujours pour se rassurer ettrouver la paix et le calme qui lui manquent.

Mais elle ne peut offrir qu'une fleur épineuse pour tout réconfort. On voit ainsi que cette nature est porteuse de paix, d'espoir et de renaissance.

Le poète lie chaque évocation de lanature à un sentiment de bien-être, de tranquillité et de vie, renvoyant à la jeunesse, l'enfance, et l'innocencequ'elles portent… ou sont supposées porter.L'enfant est ici le seul rescapé de l'humanité, une fleur comme l'aubépine miraculée.

Il renvoie aux jeunes filles destemps de paix, jeunes filles disparues.

Il est aujourd'hui seul et triste, comme le saule pleureur auquel ses cheveuxfont penser, porteur de « chagrins nébuleux ».Mais surtout il est d'abord présenté comme un ange : cheveux blonds, aux yeux bleus comme « l'azur », et «l'onde», mais aussi comme le lys, cette fleur précieuse.

Il apparaît également asexué, comme les anges.Il est d'ailleurs pur comme les anges, son épaule est « blanche », comme la « blanche » fleur contre laquelle ils'abrite.La vie et la joie dont il est censé être le porteur sont dans ce poème symbolisés notamment par un rythme ternaireque le poète utilise quand il veut parler de l'enfant ou s'adresser à lui : ainsi du vers 25 : « pour rattacher gaiementet gaiement rattacher », ou du vers 37 : « qui chante avec un chant ».D'ailleurs ce rythme ternaire ou les vers et les répétitions parfois très musicaux lorsqu'il s'agit de l'enfant, ainsi queles différentes allusions à la musique « chant, hautbois, cymbales »font intervenir la musique en tant qu'art.

Cela aussi est représentatif du romantisme où non seulement tous les artsétaient mêlés, et où la musique était considérée comme la porte de l'âme, un moyen d'adoucir les m½urs.

Il s'agitalors pour l'interlocuteur de l'enfant de rentrer dans son âme afin d'y raviver la flamme de l'innocence et de la vie.L'enfant est en effet gage de douceur, comme le reflètent les nombreuses allitérations en CH : « rattacher, blanche,cheveux » ou plus tard « chant, chante » aux harmonies suggestives de douceur et de tendresse.L'enfant apparaît alors non seulement comme une fleur fragile à protéger, mais aussi comme le dernier témoin del'humanité, le dernier espoir aussi qui doit permettre à celle-ci de revivre.

C'est pourquoi il se voit proposé monts etmerveilles pour qu'il croit de nouveau à la beauté du monde, lui qui a vu tant d'horreur : « Que veux-tu ? » lui est-ildemandé, mais ce rejet poétique reste sans réponse. L'enfant reste en effet muet, peut-être traumatisé par les massacres et le « fer » qui l'a malgré tout épargné.L'enfant semble d ‘abord plongé dans une douleur insondable.Son premier mot pourrait d'ailleurs faire croire que la vie et la paix vont reprendre : « Ami » dit-il, ce qui provoquechez le poète un sentiment d'affection voire de désir pour celui-ci, comme le montre la montée emphatique du vers40 : « dit l'enfant grec, dit l'enfant aux yeux bleus ».Hélas, cet espoir est rapidement déçu.

Cette rupture est renforcée par la rupture rythmique du dernier vers : « jeveux de la poudre et des balles ».

Cette anacoluthe au rythme binaire réduit brutalement les espérances du poèteet du lecteur à néant, et prouve une fois encore que les conséquences de la guerre sont irrémédiables.

La guerreentraîne la guerre, détruisant la jeunesse et l'humanité, rendant impossible toute volonté de pardon, dans un terribleengrenage de violence. Ainsi, dans ce poème, mais comme dans le reste de son ½uvre, V.

Hugo dénonce la guerre et ses ravages.

Laguerre sort victorieuse de son combat contre les hommes et la nature, et l'enfant, déchiré, victime de la guerre etprotégé de la nature, devient lui aussi un guerrier.

Ainsi, c'est peut-être la plus terrible conséquence de la guerre :enlever aux hommes leur humanité, à ceux qui sont victimes d'une guerre avant de devenir des bourreaux, et à ceuxqui ne luttent pas contre ce fléau.. »

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