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Les romans de Maupassant sont-ils des romans d'éducation?

Publié le 22/02/2012

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Pour certains personnages, il s'agit moins de se former au cours du récit, que de se déformer littéralement: la perte des illusions pour Jeanne, de l'identité pour Pierre (Pierre et Jean), de la tranquillité pour Christiane, de la jeunesse pour Bertin, sont le point commun de l'évolution des personnages. Le roman est à chaque fois l'histoire de la perte d'un équilibre précaire, d'une façade qui se révèle peu à peu mensongère.
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« qu'on croit») amène la possibilité d'un nouvel espoir pour Jeanne ; dans Mont-Oriol, le souhait exprimé par Christiane pour le bonheur de Paul, de même que le visage rasséréné de Bertin mort dans Fort comme la mort, interdisent de penser que l'échec du personnage est consommé, comme si l'histoire pouvait continuer, ou comme si la conclusionétait impossible, comme si le roman revenait à son point de départ. Des personnages qui n'évoluent pas.

Le progrès accompli par les personnages est par ailleurs souvent superficiel : Fort comme la mort s'ouvre sur le tableau de l'impuissance artistique de Bertin, et c'est cette impuissance qui l'amène au suicide, parce qu'il est incapable de transformer sa terreur du déclin en oeuvre d'art; Mariolle constateégalement à la fin de Notre coeur qu'il est toujours un raté de l'amour, comme il était dès les premières pages du roman un raté de l'art : le récit n'a finalement pas raconté autre chose que l'histoire d'un nouvel échec dans leparcours d'un éternel velléitaire, incapable de résister à l'amour d'une femme ; quant au départ de Pierre à la fin dePierre et Jean, il renvoie à son portrait liminaire qui soulignait son incapacité à prendre une décision : l'engagement du personnage se fait sans qu'il manifeste de volonté, grâce à Jean qui organise le départ de son frère, et la famillequi fait jouer ses relations ; de même Christiane, dans Mont-Oriol, n'a pas décidé de devenir la maîtresse de Paul (voir Texte 8, p.

260) : d'ailleurs, à la fin du roman, elle ne choisit d'aimer son enfant que faute de mieux.

Cesromans d'éducation possèdent ainsi la bizarre caractéristique de mettre en scène des héros qui ne progressent pasvraiment, qui demeurent fondamentalement les mêmes. L'apprentissage négatif Cette absence de progrès tient sans doute à la solitude caractéristique des héros de Maupassant. Des questions non posées.

Chacun demeure ainsi incapable de communiquer ses angoisses et ses questions : Dans Une vie (voir Texte 5, p.

246) Jeanne et le comte de Fourville possèdent en commun une fondamentale impuissance à s'exprimer à propos de l'adultère commis par leurs conjoints : Jeanne se tait et laisse faire, le comtese tait et tue.

La conquête de l'amour est également fort différente entre les amants, ce qui amène chacun à setrouver seul malgré la relation (Mont-Oriol) : la grossesse couronne la passion pour Christiane, mais dégoûte Paul ; Mme Walter (Bel Ami) considère comme sacré l'amour, mais celui-ci n'est qu'un instrument de pouvoir pour Duroy; Mariolle et Michèle sont séparés par une conception radicalement différente du sentiment.

Même Duroy, quiprogresse socialement, n'a pas fondamentalement évolué à la fin de Bel-Ami: il reste tout au long du roman le même escroc sans scrupules.

Aucun de ces personnages ne se montre capable d'atteindre les autres, chacun demeureenfermé dans ses propres certitudes, et personne ne progresse. Une éducation à rebours.

Pour certains personnages, il s'agit moins de se former au cours du récit, que de se déformer littéralement: la perte des illusions pour Jeanne, de l'identité pour Pierre (Pierre et Jean), de la tranquillité pour Christiane, de la jeunesse pour Bertin, sont le point commun de l'évolution des personnages.

Le roman est àchaque fois l'histoire de la perte d'un équilibre précaire, d'une façade qui se révèle peu à peu mensongère. (CONCLUSION) Les six romans achevés de Maupassant semblent bien posséder certaines caractéristiques du roman d'éducation,mais l'élément essentiel que représente la progression et, plus encore, la transformation du héros, manque : miroird'un pessimisme radical, ces récits mettent en évidence l'impuissance de l'homme à résister à ses obsessions, sonincapacité à se sauver en profitant d'une expérience douloureusement acquise.. »

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