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Lettres, amour et poésie

Publié le 18/01/2020

Extrait du document

amour

Documents

A - Paul Verlaine, « Lettre », Fêtes galantes, 1869.

B - Guillaume Apollinaire, « Adieu », Poèmes à Lou, 1915.

C - Philippe Jaccottet, « Lettre», L’Effraie, 1953.

D - Pablo Picasso, lettre adressée à Gaby Lespinasse, 1916.

►Vous répondrez d’abord aux trois questions suivantes.

Questions (4 points)

1. À quel(s) genre(s) et à quel(s) registre(s) appartiennent ces textes? Quel est le but de chacun d’eux ? (2points)

2. Quels éléments font de ces poèmes de véritables lettres ? (1 point)

3. Quel élément, dans le document D, joue le rôle que la poésie joue dans les documents A, B et C ? (1 point)

►Vous traiterez ensuite un de ces sujets au choix.

Commentaire (16 points)

Vous ferez le commentaire du poème « Adieu » d’Apollinaire.

Dissertation (16 points)

Selon vous, que peut ajouter à une lettre intime la forme poétique ou artistique (peinture par exemple) ? Vous vous appuierez sur le corpus ci-dessous et sur vos lectures personnelles.

Écriture d’invention (16 points)

Imaginez que Lou n’ait pas répondu à Apollinaire. Il lui réécrit pour la supplier de lui envoyer des lettres, mais dans un registre pathétique (vous n’êtes pas tenu d’écrire la lettre en vers, mais vous lui donnerez un tour poétique).

► Question 1

Les trois textes appartiennent au genre poétique, plus précisément à la poésie en alexandrins. Deux d’entre eux comportent des strophes (A et B), le troisième ne comporte pas de blanc. Le document de Picasso appartient aux arts graphiques : il s’agit d’un dessin (en couleurs, sur l’original) assorti d’un texte.

Le poème d’Apollinaire présente cependant une originalité formelle et en cela il se rapproche du document iconographique. Sous son apparente sagesse poétique apparaît l’éclectisme d'Apollinaire : l’acrostiche, qui consiste à utiliser la première lettre des vers d’un poème ou d’une strophe pour former un mot ou une phrase qui se lit verticalement, remonte à la poésie médiévale. Ici, les premières lettres des trois vers de chaque strophe forment le prénom de la femme aimée : LOU.

Par ailleurs, si le poème n’est pas dans son intégralité un calligramme (procédé qui consiste à reproduire, par la disposition typographique, le dessin d’un objet, d’une personne), les premières lettres de chaque vers, par leur typographie et leur caractère calligraphié, créent un dessin, qui se répète. Apollinaire, familier des peintres cubistes, semble appliquer leur technique du portrait et l’on peut voir dans ces trois lettres le visage d’une femme : le L - en position horizontale figurerait le front, le O l’œil et le U la bouche. Le texte d’Apollinaire se trouve donc à la croisée de plusieurs genres : la poésie et le dessin.

Mais tous ces documents appartiennent en même temps au genre épistolaire. Leur originalité vient de leur appartenance à plusieurs genres.

Les registres des textes sont assez différents. Deux d’entre eux cependant offrent des ressemblances : le poème d’Apollinaire et la lettre de Picasso sont tous deux lyriques. Le lyrisme amoureux apparaît dans la forte présence de la première personne, dans la répétition de « Je t’aime >> dans la carte de Picasso et dans celle, à cinq reprises, du nom « LOU », effet d’insistance et de refrain qui donne au poème d’Apollinaire la tonalité d’une plainte. La multiplication de ce « portrait » en lettres traduit le caractère obsessionnel de la présence de Lou dans l’imagination du poète, qui la « voit », la porte en lui au point de la représenter partout, comme autant de photographies qu’il prendrait d’elle. Les exclamations, les hyperboles « À toi ma vie, à toi mon sang ! » contribuent au lyrisme du poème.

Le poème de Philippe Jaccottet présente une tonalité plus sombre ; il est à la fois nostalgique par son évocation du passé regretté (« Mais plus d’images entre nous ») à l’imparfait, temps douloureux qui recrée le passé

amour

« SUJET i•!.l§il::fü.if'I Lettre Éloigné de vos yeux, Madame, par des soins Impérieux Q'en prends tous les dieux à témoins), Je languis et me meurs, comme c'est ma coutume En pareil cas, et vais, le cœur plein d'amertume, 5 À travers des soucis où votre ombre me suit, Le jour dans mes pensées, dans mes rêves la nuit, Et la nuit et le jour, adorable Madame ! Si bien qu'enfin, mon corps faisant place à mon âme, Je deviendrai fantôme à mon tour aussi, moi, 10 Et qu'alors, et parmi le lamentable émoi Des enlacements vains et des désirs sans nombre, Mon ombre se fondra pour jamais en votre ombre.

En attendant, je suis, très chère, ton valet.

Tout se comporte-t-il là-bas comme il te plaît, 15 Ta perruche, ton chat, ton chien? La compagnie Est-elle toujours belle, et cette Silvanie · Dont j'eusse aimé l' œil noir si le tien n'était bleu Et qui parfois me fit des signes, palsambleu 1 ! Te sert-elle toujours de douce confidente? 20 Or, Madame, un projet impatient me hante De conquérir le monde et tous ses trésors pour Mettre à vos pieds ce gage -indigne -d'un amour Égal à toutes les flammes les plus célèbres Qui des grands cœurs aient fait resplendir les ténèbres.

25 Cléopâtre fut moins aimée, oui, sur ma foi ! Par Marc-Antoine et par César que vous par moi, N'en doutez pas, Madame, et je saurai combattre Comme César pour un sourire, ô Cléopâtre, Et comme Antoine fuir au seul prix d'un baiser.

so Sur ce, très chère, adieu.

Car voilà trop causer, Et le temps que l'on perd à lire une missive N'aura jamais valu la peine qu'on l'écrive Paul Verlaine, Fêtes galantes 1869.

1.

Palsambleu: juron.

L'~PISTOLAIRE •SUJET m 1257. »

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